Barroso, Buzek, Ashton et Van Rompuy : des nouveaux visages pour une nouvelle Europe ?

, par Dumitru Drumea

Barroso, Buzek, Ashton et Van Rompuy : des nouveaux visages pour une nouvelle Europe ?

L’année 2009 était particulièrement riche en termes de nominations dans l’UE, suite aux élections européennes du mois de juin d’abord, et à l’adoption du traité de Lisbonne l’automne dernier. Jetons un coup d’œil ensemble sur ceux qui dirigeront l’UE dans les prochaines années.

Le but de cet article n’est pas tant de revenir sur les changements institutionnels et les postes créés au sein de l’UE, mais surtout de traiter ces sujets à travers les personnes qui les ont occupés et les conséquences politiques qu’elles entraîneront.

Jerzy Buzek, symbole de l’Europe réunifiée

Du résultat des élections européennes 2009 il est possible de tirer plusieurs conclusions. La première : l’Europe sera gouvernée par une majorité parlementaire de droite, alors que la gauche a subi une défaite écrasante. Le président du Parlement européen a été nommé : ce sera le Polonais Jerzy Buzek, un représentant du PPE, le premier Est-Européen à occuper cette fonction. Dans deux ans et demi, à la présidence du Parlement européen sera un socialiste.

Barroso, ou la Commission des États

Juste après les élections européennes de juin ont commencé les négociations pour la désignation du président de la Commission européenne. Ici, sans aucun suspense, grâce au soutien de la droite au Parlement européen et au soutien des États membres, contents de sa servitude, M. Barroso s’est vu confirmé dans ses fonctions. A vrai dire, personne d’autre ne s’est présenté. Différents noms sont apparus, notamment celui de Verhofstadt, mais les socialistes, démocrates-libéraux et les verts n’ont pas su présenter une alternative.

Barroso était la candidature peut-être la plus légitime et idéale pour l’UE dans son état actuel. Il est de droite, et donc reflète les couleurs politiques du Parlement européen après les élections du 7 juin 2009, ainsi que les couleurs politiques de la majorité des États membres, dont les plus grands comme la France, l’Allemagne, l’Italie et la Pologne.

Mais surtout, le Portugais est un excellent diplomate et un très bon ami des chefs d’États qui a su mettre la Commission européenne au service du Conseil. Ce sera particulièrement nécessaire avec l’adoption du traité de Lisbonne, qui sacralise le Conseil européen en tant que vecteur politique en Europe. En plus, ce dernier s’est doté d’un président permanent et d’un « Haut représentant » pour la politique étrangère, qui sera également vice-président de la Commission européenne.

Ils parleront au nom de l’UE à l’étranger…

… enfin, c’est ce que se dit. Les fédéralistes qui ont fait campagne pour l’adoption du traité de Lisbonne ont été vraiment déçus. Ils ont bien compris que ce président n’aura pas le même poids politique que le président d’une autre fédération, et la ministre des affaires étrangères n’aura pas non plus le même rôle que ses homologues dans les États membres. Mais quand même, quand ils ont vu Van Rompuy et Ashton nommés à ces postes ils sont vraiment tombés de haut. Les premières réactions peuvent se résumer en deux questions : « qui est-ce ? » pour ceux qui n’ont jamais entendu parler de ces hommes politiques, et « pourquoi ? » pour ceux qui connaissaient les deux personnages, et s’attendaient à autre chose.

Ils s’attendaient à un président avec un fort encrage politique, un excellent communicant et surtout une personnalité connue. M. Van Rompuy n’est pas une telle personnalité. Cet ancien Premier Ministre belge, qui ressemble un peu au Maître Yoda des Stars Wars, est connu (d’un public très restreint) pour son efficacité économique (il a ramené la dette belge de 135% du PIB à 100%) et pour son sens du compromis, car il a su surmonter la crise entre les Wallons et les Flamands. C’est le profil idéal pour le poste du président du Conseil européen, où les 27 États défendent plus souvent leurs propres intérêts, plutôt que l’intérêt général européen. Ceux qui s’attendaient à un président des Européens suite à l’adoption du traité de Lisbonne n’ont visiblement pas compris que les États membres ont nommé un président pour eux-mêmes, qui sera avant tout animateur et modérateur du Conseil, et non pas un personnage politique, qui imposerait ses points de vues, et connu du grand public, ce qui lui permettrait d’avoir une visibilité médiatique accrue.

Pourquoi eux ?

Madame la Baronne Ashton semble être le compromis trouvé pour récompenser les Britanniques de leur loyauté face au traité de Lisbonne, mais aussi pour les aider à avaler la pilule du non-soutien à Tony Blair à la présidence du Conseil. En plus, c’est un moment politiquement très significatif : Londres a reçu le poste du Haut représentant pour la politique étrangère, par rapport auquel il était très réticent.

Mais alors pourquoi elle ? Pourquoi ne pas choisir un David Milliband ou bien un Jack Straw, qui ont une notoriété à l’international ? La réponse est simple : justement parce que ce n’est pas le cas de Mme Ashton, et elle ne pourra pas faire de l’ombre aux États. Pour l’instant en tout cas. Car elle est loin d’être incompétente, et là encore, elle a le profil pour le rôle qui lui a été confié : elle était déjà commissaire britannique pour le commerce extérieur, une compétence exclusive de l’UE. Mme Ashton a donc une riche expérience dans la défense des intérêts européens.

Les nominations européennes de 2009 nous ont montré une fois de plus que l’Europe reste un espace où les tractations diplomatiques l’emportent sur le processus démocratique. Avec le traité de Lisbonne, l’UE a fait un pas de plus vers une Europe plus intégrée certes, mais tout en renforçant la dimension intergouvernementale, avec comme organe politique principal le Conseil européen. L’UE se trouve sur cette voie depuis 1992 et l’adoption du traité de Maastricht, et les nominations aux postes politiques principaux en sont la meilleure preuve. Reste bien sûr à voir ce que feront les personnalités fraîchement nommées de leur responsabilités : joueront-ils le jeu des États ou feront-ils preuve d’une certaine autonomie ? Leur mandant commence le premier janvier 2010. D’ici un an nous pourrons dresser un premier bilan. En attendant, nous leur souhaitons, à eux et au projet européen, bien du courage.

Illustration : Jerzy Buzek, président du Parlement européen élu en juillet 2009

Source : Site officiel du Président du Parlement Européen

Vos commentaires
  • Le 30 décembre 2009 à 07:45, par Martina Latina En réponse à : Barroso, Buzek, Ashton et Van Rompuy : des nouveaux visages pour une nouvelle Europe ?

    Merci pour cette vue d’ensemble. Car il s’agit bien de voir ensemble les visages du présent - qui est, même sans jouer beaucoup sur les mots, un cadeau, bien qu’il se montre parfois difficile à recevoir - pour envisager l’avenir, c’est-à-dire offrir son visage et son action à celle qui nous donne son nom créateur, voire fédérateur, à la familière figure d’EUROPE ;

    nous savons en effet qu’elle incarna sur un TAURILLON l’audace avec la grâce, et ce au Proche-Orient, à l’aurore de la civilisation, mais surtout à l’aube de la démocratie dont elle symbolisa, donc en quelque sorte diffusa, les instruments irremplaçables et toujours indispensables : la technique alphabétique et le savoir-faire nautique. Au seuil de l’An neuf, souhaitons-nous le courage de l’amour et de l’humour EUROPEENS pour construire mieux de jour en jour l’Union dans la diversité, et ainsi la justice dans la paix !

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