Barroso revit grâce au Parlement européen

, par Fabien Cazenave

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Barroso revit grâce au Parlement européen

Le discours sur l’état de l’Union marque le grand retour de José Manuel Barroso sur la scène européenne. Mis à mal par l’activisme de Nicolas Sarkozy et d’Angela Merkel, son discours réalisé devant le Parlement européen a été remarqué… et applaudi. Quel enseignement tiré de cet « évènement » ? La Commission européenne a besoin du Parlement européen pour exister politiquement face aux Etats et leurs dirigeants.

Pour une fois, José Manuel Barroso fait face aux Etats et est prêt à leur rappeler une vérité toute simple : une simple coordination entre Etats ne veut pas dire que c’est l’Europe. Ainsi il explique que « la réalité aujourd’hui c’est que la coopération intergouvernementale n’est pas suffisante pour sortir l’Europe de cette crise, pour doter l’Europe d’un avenir. Tout au contraire, un certain intergouvernementalisme risque de mener à la renationalisation et à la fragmentation. Un certain intergouvernementalisme pourrait être la mort de l’Europe unie telle que nous la voulons ».

José Manuel Barroso - State of the Union Address 2011 : « European Renewal »
LeTaurillon

Faire avancer l’Europe autrement que par la voie diplomatique

« Nous devons compléter notre union monétaire pour une union économique. Nous devons achever les objectifs de Maastricht. C’est une illusion de penser que nous pourrions avoir une monnaie commune et un marché unique avec une approche intergouvernementale. Pour que la zone euro soit crédible – et ce n’est pas un message venant seulement des fédéralistes, mais aussi des marchés – nous avons besoin d’une véritable approche communautaire. Nous avons besoin de plus d’intégration dans la zone euro, de compléter l’union monétaire avec une vraie union économique ».

Le président de la Commission européenne pointe avec justesse l’incapacité diplomatique en Europe à prendre les décisions suffisamment vite pour rassurer les investisseurs et les bourses. Il est à noter qu’il privilégie l’avancée de l’Europe par le biais de la zone euro. Après tout, il est vrai que tous les membres de l’Union européenne sont censés adopter la monnaie unique…

Il critique aussi fortement le problème de l’unanimité au Conseil européen : « Aujourd’hui nous avons une Union européenne où les Etats les plus ‘lents’ dictent leur vitesse aux autres Etats membres. [...] Un Etat membre a bien sûr le droit de ne pas accepter une décision. C’est une question, comme ils disent, de souveraineté nationale. Mais un Etat membre n’a pas pour autant le droit de bloquer les mouvements des autres car les autres ont aussi leur propre souveraineté nationale et s’ils décident d’aller plus loin, ils doivent aller plus loin ».

C’est une manière pour lui de remettre la Commission européenne au centre du jeu, à raison. Pourtant, il y a clairement des manques dans son discours pour asseoir cette vision du fonctionnement de l’Europe.

Pourquoi ne pas plus s’appuyer sur le Parlement européen ?

José Manuel Barroso n’a pas su éviter un écueil dans son discours : sa légitimité face aux Etats membres va venir du Parlement européen or il n’en parle pas… Il n’a pas parlé par exemple des actuelles négociations sur le budget européen dans son discours alors que le Parlement européen le soutiendrait tout de suite dans cette démarche. Il a besoin de s’appuyer sur les eurodéputés pour dire « les citoyens européens me soutiennent mais les dirigeants européens me bloquent ».

Pareillement, il aurait pu aborder la question du programme d’aide alimentaire pour les plus démunis où les Etats empêchent toute avancée sur ce dossier. En réalité, M. Barroso veut garder sa position un peu à l’écart dans les institutions avec une Commission européenne s’occupant uniquement de « l’intérêt général européen ». Un leurre sur lequel la Commission a su jouer jusqu’à présent pour exister face aux Etats dans la construction européenne. Ce n’est plus suffisant aujourd’hui.

Ce discours n’a pu être aussi fort politiquement que parce qu’il s’exprimait devant le Parlement européen. C’est le cadre dans lequel la Commission peut devenir un véritable acteur de la vie européenne. Refuser de s’accorder un tel soutien, c’est prendre le risque fatal de voir rejeter toutes ses futures propositions par les Etats membres qui ont une légitimité démocratique supérieure pour le moment. Cela ne serait pourtant plus possible avec une Commission gouvernant l’Europe en étant responsable devant un Parlement européen qui représente déjà les citoyens d’Europe…

Les réactions politiques… européennes

On ne peut que regretter que les seuls à réagir à ce discours soient les députés européens : Marielle de Sarnez, Martin Schultz, Franziska Brantner, Joseph Daul…

A la sortie de l’hémicycle, quelques réactions au discours de Barroso
Ce mercredi 28 septembre José Manuel Barroso prononçait devant les députés européens son discours sur l’état de l’Union à Strasbourg. Toute l’Europe a recueilli à la fin de la séance les réactions de Joseph Daul, Franziska Brantner, Liem Hoang-Ngoc et...
www-touteleurope-eu

(voir l’article de Touteleurope.eu sur le discours)

Aucune réaction n’a été faite du côté des chancelleries européennes, ni du côté de l’Elysée en France. Aucune référence à ce discours politique pourtant clivant dans le débat pour la primaire citoyenne chez les Socialistes et les Radicaux de Gauche aussi. Ceci est très regrettable car cela démontre que nos responsables politiques nationaux ne voient pas l’Europe comme un vrai levier pour l’avenir de nos citoyens.

Crédits : European Parliament

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