Droits de l’Homme et Handicap : la douce amertume européenne

, par Aurélien Daydé

Droits de l'Homme et Handicap : la douce amertume européenne

C’est aujourd’hui la journée européenne des personnes handicapées. Moins d’une semaine après la décision du Conseil de ratifier la Convention des Nations Unies sur le droit des personnes handicapées, la Commission européenne organise la fête et offre le buffet.

Une occasion parfaite pour mettre les petits plats dans les grands et communiquer sur les vertus offertes par les Institutions. Pourtant, aujourd’hui, si le Commissaire offre le champagne, il ne se prêtera pas à l’exercice de la conférence de presse ni à l’article dans les médias européens. Comment expliquer ce silence ? Le plat du jour est peut être mal assaisonné : mise en bouche et éclaircissements.

Antipasti : la journée internationale des personnes handicapées

Célébrée chaque année le 3 décembre, la Journée internationale des personnes handicapées vise à faire mieux connaître les questions de handicap, les droits des personnes handicapées et les avantages qu’il y a à les associer à tous les aspects de la vie politique, sociale, économique et culturelle de leurs communautés. Elle est l’occasion de mobiliser les énergies pour veiller à ce que les personnes handicapées puissent exercer leurs droits humains et participer à la vie de la société sans réserve et dans des conditions d’égalité, conformément à l’objectif qui a été fixé par le Programme d’action mondial concernant les personnes handicapées, adopté par l’Assemblée générale des Nations Unies en 1982.

Depuis 16 ans, la Commission Européenne organise une conférence réunissant les représentants des personnes en situation de handicap et les décideurs politiques. Cette année le thème choisi par Bruxelles dans l’idée d’impliquer les personnes handicapées dans l’élaboration de politiques européennes est la création des conditions pour une vie indépendante.

Le concept d’ « independent living » ou d’autonomie de vie est la philosophie du mouvement des personnes handicapées qui prône la liberté pour tous les individus de faire leur propres choix dans leur vie quotidienne, comme les personnes « valides ». Ca veut dire grandir au sein de sa famille, aller à l’école de quartier, utiliser le même bus que tout le monde et présenter sa candidature à un employeur pour travailler et gagner sa vie, comme tout le monde. Les conditions de la vie indépendante sont celles qui permettent à la société de s’adapter à chaque individu pour donner à tout le monde les mêmes opportunités.

Le rendez-vous du 3 décembre permet à toutes les parties prenantes : activistes, politiques, organisations de personnes handicapées, familles représentant une personne en situation de handicap et Commissaire européen de mieux décider ensemble. La Commission consulte souvent, écoute parfois. La société civile parle d’une voix, présente ses 19 propositions d’action, et tout le monde devrait dîner ensemble pour commenter la journée. C’est dans ce contexte pourtant très saint que se révèle les contradictions politiques de l’Union européenne.

Plat du jour : la Convention des Nations Unies sur le droit des personnes handicapées

En septembre dernier, dans l’article Handicap : à quoi sert la Convention des Nations Unies, le Taurillon avait déjà révélé les saveurs du traité en expliquant les enjeux historiques d’une ratification par les Communautés européennes et le mécanisme complexe de son adoption par les Etats Membres. Aujourd’hui 12 pays de l’Union européenne ont déjà ratifié la Convention, et même la France, pays de la gastronomie et des droits de l’Homme est sur le point d’accéder au traité. Le 26 novembre dernier, la présidence Suédoise a tenu sa promesse et a fait adopter la décision de ratifier la Convention par le Conseil. Une décision trop vite décrite comme sans précédents dans tous les communiqués de presse des organisations de droits de l’Homme.

Il ne reste plus de dessert en cuisine

Le 30 novembre, 5 jours après la décision du Conseil, la Commission a publié un communiqué tardif pour annoncer son choix dans la procédure de ratification. Le traité ne sera confirmé auprès des Nations Unies que lorsque les 27 pays de l’Union auront eux même ratifié la Convention. En sachant qu’il reste 14 ratifications, le premier traité des droits de l’Homme ratifié par l’Union européenne pourrait rester en attente de confirmation très longtemps. Depuis le début de la semaine, les juristes s’affrontent pour interpréter la décision de la Commission. Un chaud froid pour le mouvement des personnes handicapées : la décision est politique, elle permet à chacune des Institutions d’avancer doucement, sans prendre le risque de trop bousculer les Etats membres sur les questions des droits fondamentaux.

Le sujet n’est pas au sommaire de la journée européenne. Quel dommage ! L’article 19 de la Convention des Nations Unies a pour titre : Autonomie de vie et inclusion dans la société. Un excellente base pour explorer ensemble les conditions de la vie indépendante : Il indique en effet que « Les États Partis à la présente Convention reconnaissent à toutes les personnes handicapées le droit de vivre dans la société, avec la même liberté de choix que les autres personnes, et prennent des mesures efficaces et appropriées pour faciliter aux personnes handicapées la pleine jouissance de ce droit ainsi que leur pleine intégration et participation à la société ».

Illustration : Logo de la Convention des Nations Unies

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