Au coeur des grandes controverses européennes
La Pologne : un pays autrefois au coeur du processus de démocratisation en ex-Europe de l’Est et, aujourd’hui, un pays au centre des grandes controverses européennes de ces toutes dernières années.
Que ce soit à propos d’un éventuel modèle social européen aujourd’hui en devenir [2], à propos des orientations géopolitiques touchant aux relations ’’atlantiques’’ entre UE et Etats-Unis [3], ou sur le thème de ses grandes orientations politiques ’’domestiques’’ [4].
Un pays dont, après plus de quinze ans de démocratisation, le paysage électoral est actuellement en pleine recomposition politique.
En effet, dirigée aujourd’hui par le ’’couple’’ des frères jumeaux Lech et Jaroslaw Kaczynski [5], la Pologne est actuellement gouvernée - en tout cas depuis le 2 février 2006 - par une coalition fragile constituée d’une alliance précaire conclue entre les conservateurs du PiS (« Prawo i Spawiedliwosc », i. e : « Droit et Justice »), les populistes agrariens de « Samoobrona » (i. e : « Audéfense ») et les national-cléricaux de la LPR (i. e : « Ligue des familles polonaises »).
« Nice ou la mort ?! »
Une Pologne aujourd’hui au coeur de l’actuelle controverse sur le TCE, Traité constitutionnel européen précisément censé sortir l’Europe de l’ornière institutionnelle du Traité de Nice.
Puisque si tant est que le Traité de Nice aura effectivement été, pour la Pologne, le « Traité de l’adhésion » (et d’une adhésion effectivement tant attendue...), il n’empêche qu’il n’aura en aucun cas été un traité rendant possible un meilleur fonctionnement institutionnel pour l’Union.
Or, réformer l’UE en lui injectant davantage encore de supranationalité semble être une chose décidément bien difficile à obtenir dans le contexte actuel. En effet, après la victoire de M. Lech Kaczynski aux élections présidentielles polonaises du 23 octobre 2005, les perspectives de ratification du Traité constitutionnel européen (par voie référendaire ou parlementaire) ne semblent plus vraiment être à l’ordre du jour : MM. Kaczynski défendant désormais à nouveau l’actuel équilibre institutionnel issu du Traité de Nice.
Une réforme difficile, car non seulement les dirigeants polonais actuels semblent être des chantres de l’Etat-nation et des adversaires résolus de l’intégration européenne... mais leurs actuels principaux adversaires politiques [6] ne semblent être aujourd’hui guère plus conciliants sur ce point [7].
Les lendemains douloureux de l’adhésion
En effet, les lendemains de l’adhésion à l’UE semblent être relativement problématiques en Pologne : un pays marqué par, une fois sa souveraineté recouvrée (avec l’écroulement du bloc communiste), une forte poussée des sentiments nationalistes et eurosceptiques.
Ceci s’expliquant en partie par les importants coûts sociaux consentis lors de sa ’’marche forcée’’ à l’Europe mais, également, par un très traditionnel complexe de ’’grande puissance’’ inscrit dans l’Histoire - riche mais tourmentée - de ce grand pays d’Europe centrale et orientale.
Un regard de la Pologne sur elle-même qui la conduit très régulièrement à nourrir des ambitions, à proposer des orientations bien particulières [8] et à émettre des souhaits voire des prétentions [9] qui ne sont pas toujours très bien comprises de la part de partenaires occidentaux souvent complètement ignorants de son Histoire et de sa spécificité.
Les Polonais, mais qui sont-ils ?
Ainsi, on les a adoré quand ils se révoltaient contre le Communisme avec Solidarnosc. On admiré leur modernisation et leur redressement économique, dans les années 1990-2000 (mais sans se rendre nécessairement toujours très bien compte des coûts sociaux que cela leur imposait...).
On les aime un petit peu moins depuis qu’on les a découvert atlantistes et pro-américains dans l’affaire irakienne [10], âpres à la négociation avant même l’entrée dans l’UE, depuis lors entêtés dans la défense de leurs intérêts à Bruxelles et ’’papistes’’ - notamment à la mort de Jean-Paul II, en avril 2005 - jusqu’au point de bloquer alors le processus de rédaction de la Constitution européenne.
Mais a-t-on seulement essayé de vraiment les comprendre, ces nouveaux parvenus de l’Union européenne qui parfois agacent ? Puisque trop proaméricains, trop catholiques, trop débrouillards, trop têtus, bref : trop polonais. Tour à tour ténébreux, individualistes, excentriques, orgueilleux, brillants ou anarchistes-nés...
Quarante millions de voisins et ’’néo-communautaires’’ polonais : un peuple dynamique et jeune à la démographie encore forte, conscient de son identité et fier de son passé, qu’il nous faut - au-delà des seuls clichés - apprendre à mieux connaître. Puisque nous partageons ensemble, aujourd’hui, la même ’’maison commune’’ européenne...
D’où l’intérêt - précisément - de se pencher attentivement sur le cas de cette Pologne qui (sauf changement institutionnel majeur d’ici là...) assurera la présidence du Conseil de l’Union au second semestre 2011.
D’où l’intérêt de ce dossier, afin de mieux découvrir l’Histoire, ainsi que la vie politique et culturelle de la Pologne : ce ’’poids lourd’’ et ’’pays clef’’ du dernier élargissement et, en tout état de cause, un partenaire européen avec lequel - quoi qu’il advienne - il va falloir compter.
Ronan Blaise (pour la rédaction)
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