Jean-Dominique Giuliani : « Délaissons la diplomatie et passons à une Europe politique »

, par Pierre-Marie Giard

Jean-Dominique Giuliani : « Délaissons la diplomatie et passons à une Europe politique »

Après le non irlandais, Jean-Dominique Giuliani a écrit sur son blog une proposition pour éviter la crise en Europe : Si les peuples disent non... donnons la parole au peuple !. Le Taurillon l’interroge sur les prochains enjeux que va connaître l’Union européenne.

Le Taurillon : Comment analysez-vous le résultat de ce référendum en Irlande ?

J-D Giuliani : C’est une mauvaise nouvelle, un vote frileux et très largement égoïste, très national comme on en a connu ailleurs dans d’autres États membres. Pour autant il faut le respecter. Les Irlandais devront expliquer les raisons de leur hostilité au Traité de Lisbonne qui améliore la démocratie, la transparence et l’efficacité des institutions de l’Union. Chaque État membre a le droit de se prononcer sur cette réforme institutionnelle.

Nous verrons à la fin du processus quelle sera la situation et les solutions qui permettent de s’en accommoder sans remettre en cause le rapprochement des peuples d’Europe.

Le Taurillon : Quelle influence cela aura-t-il sur le programme de la présidence française du Conseil de l’Union européenne ?

J-D Giuliani : Le programme de travail de la présidence française ne sera pas remis en cause. Qui voudrait s’abstenir de parler environnement ou énergie ? Pour autant, il appartiendra au président français de créer les conditions d’une solution qui emporte l’accord de tous. C’est une lourde et difficile tâche. L’agenda politique de cette présidence devient encore plus important. Mais je pense que Nicolas Sarkozy, avec sa capacité de conviction et de négociation, saura œuvrer utilement pour cela.

Le Taurillon : Dans votre éditorial, vous souhaitez « saisir l’occasion des prochaines élections au Parlement européen, en juin 2009, pour donner aux Européens l’occasion de s’exprimer tous ensemble sur une même question politique », comment comptez-vous personnaliser et européaniser cette élection ?

J-D Giuliani : Je pense que la construction communautaire en est déjà au stade politique qu’envisageaient dès l’origine les Pères fondateurs. Mais ses institutions ne correspondent pas à une organisation politique totalement démocratique. Il est temps de délaisser la diplomatie et de passer à une Europe politique qui politise ses débats et ses échéances électorales.

Je souhaite ainsi des listes transnationales et des accords entres les principaux partis politiques européens qui enjambent les frontières, annoncent le candidat qu’ils soutiendront pour présider la Commission européenne et fasse campagne ensemble. J’aimerais bien aussi qu’un référendum européen, même consultatif, soit organisé à l’occasion de ces élections pour choisir un président stable du Conseil européen.

Le Taurillon : Les Jeunes Européens-France défendent l’idée d’un référendum paneuropéen depuis 2005. Cette proposition peut-elle s’inscrire dans vos recommandations pour donner un sens européen à cette élection de juin 2009 ?

J-D Giuliani : Oui, bien sûr. C’est la même idée. Je l’adapte seulement à la situation pour faire en sorte qu’elle ait une chance d’être au moins étudiée. Il faut créer un espace public européen, que les débats et les clivages soient déterminés au niveau européen et plus seulement au niveau nationale, quitte à personnaliser autour de personnalités européennes, ces combats d’idées et ces échanges de vues.

Nous devons mettre l’Europe en débat le plus largement possible. Il n’y a aucun risque. je crois que les Européens sont presqu’unanimement favorables à l’unification du continent. En revanche, il y a beaucoup de divisions et de débats sur les politiques européennes, leur contenu, leurs contours et leurs modalités. C’est cela qui doit être discuté dans un cadre démocratique.

Jean-Dominique Giuliani est un expert des questions européennes. Il préside la Fondation Robert Schuman, laboratoire d’idées français entièrement consacré à l’Europe.

Il a récemment publié Un Européen très pressé (Editions du Moment, Mai 2008) dans lequel il analyse la politique européenne de Nicolas Sarkozy depuis son élection le 6 mai 2007. Il a également publié Marchands d’influence, les lobbies en France (Le Seuil, 1991) et Quinze plus dix, le grand élargissement (Albin Michel, 2003).

Illustration :
 photographie de Jean-Dominique Giuliani.
 logo de la Fondation Robert Schuman.

Merci à Pauline Desmarest pour son aide et à Jean-Dominique Giuliani pour sa disponibilité.

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