Présidentielle 2007 et Europe

L’ennemi de l’extrême droite et de l’extrême gauche : c’est l’Europe

Alors pourquoi nos candidats pro-européen n’en parlent-ils pas plus ?

, par Fabien Cazenave

L'ennemi de l'extrême droite et de l'extrême gauche : c'est l'Europe

Les Extrêmes parlent d’Europe. Mal, évidemment. Mais peu de monde est là pour dénoncer leurs propos : les différents candidats qui sont favorables à la construction européenne ont peur d’aborder ce sujet. Les médias n’en parlent pas. Quand on voit que l’Europe est l’ennemi de l’extrême-gauche et de l’extrême-droite, on se dit que celle-ci mériterait un meilleur traitement.

Dans cette campagne, ceux qui parlent le plus d’Europe, ce sont les extrêmistes. Où son les autres ? Deux ans après le référendum de 2005, qui parlent le plus d’Europe ? Les anciens partisans du Oui pour rattraper leur retard ? Non ! Au contraire, l’extrême-droite et l’extrême-gauche citent à tout propos l’Europe, principal bouc-émissaire. Le problème est qu’ils ont le champ libre pour dire n’importe quoi sans que personne ne leur dise rien. Mais faudra-t-il encore se réveiller avec une autre gueule de bois pour que nos « élites » réagissent ?

L’Extrême Droite, toujours aussi nationaliste.

Où en est-on depuis le 29 mai 2005 ? Nous voyons les extrêmistes profiter de la volonté d’oublier l’enjeu européen pour déverser leur nationalisme, de gauche ou de droite. L’Europe est oubliée par une partie des candidats (Bayrou, Royal, Sarkozy) qui ne veulent pas faire ressurgir les clivages du oui et du non du référendum français.

Ont-ils tort ou raison électoralement ? Les résultats du 22 avril ne nous promettent pas pour autant que nous aurons forcément deux candidats ayant appelé à voter Oui au 2ème tour. Jean-Marie Le Pen notamment est celui qui a le mieux surfer sur la vague du non. Toujours en course pour refaire le coup du 21 avril 2002, il a cependant atténuer son discours pour parler fréquemment mais de manière moins aggressive d’Europe. Cependant, les propos sont clairs, si nos partenaires ne respectent pas sa volonté (retour des frontières, etc), la France sortirait de l’Europe.

C’est ainsi que tous les candidats de l’extrême droite, ceux qui veulent « sauver la France », se disent européen. Tous. Même Philippe de Villiers. Leur grand thème est de dire qu’il veulent une autre Europe, celle des Nations (libérées bien sûr du Diktat de Bruxelles). Mais tous disent qu’ils veulent rétablir les frontières et imposer leur vision de l’Euro à nos partenaires.

L’Extrême Gauche, toujours aussi peu claire sur son « autre » Europe

L’extrême gauche ausi prétend vouloir une autre Europe. Dire non au « Grand Capital », l’Europe libérale. De manière plus dispercée puisque les collectifs du Non n’ont rien donné, surtout pas une candidature unique à la Présidentielle. Là, on ne définit pas trop l’Europe qu’on veut. Par contre, on accepte pas le principe de démocratie à un niveau européen. Extrait du discours de candidature de José Bové : « Nous n’accepterons pas que la nouvelle politique qui aurait été choisie par notre peuple soit interdite par les décisions européennes. » Le nationalisme de gauche marche toujours bien.

D’autres sont plus clairs : « A cette Europe capitaliste, la Ligue communiste révolutionnaire dit non, mais nous appelons de nos voeux l’union et la mobilisation des travailleurs [...] pour construire de véritables Etats Unis Socialistes ». Avec Olivier Besancenot, le discours marxiste qui a toujours été contre la construction européenne est bien en place.

La volonté de ces extrêmes ne correspond pas à notre vision de l’Europe. Ces leaders du non ont donc une vision totalement différente de la notre qui s’inscrit dans la construction européenne dont nous venons de fêter les 50 ans du Traité de Rome. Nous croyons à l’union politique de l’Europe sur le principe de la subsidiarité, cadrée par une Europe fédérale qui nous permettrait de porter nos valeurs dans le monde.

L’après 29 mai : surtout plus de débats sur l’Europe

Lors de l’après-29 mai 2005, nous avions eu l’occasion de voir comment nos responsables politiques qui avaient fait campagne pour le Oui s’étaient empressés après le changement gouvernemental de ne plus parler d’Europe. Ceux pour le Non ne faisaient plus partis de l’actualité. Le collectif du Non de Gauche était perdu dans ses divisions. Car au-delà de l’Europe, c’est bien la lutte pour le leadership antilibéral qui était en jeu. Le sujet ne devient pour eux qu’un label pour démontrer leur légitimité. Aujourd’hui 5 candidats espèraient en profiter. Les sondages les créditents de moins de 10%, moins qu’en 2002.

Après le 29 mai 2005, aura-t-on un nouveau 21 avril 2002 ?

Cette montée des extrêmistes de gauches et de droite n’est unique en Europe. En Allemagne, la fusion de l’extrême gauche du Linkspartei (est allemand) et du WASG (ouest allemand) est prévue pour juin. Au Parlement européen, l’extrême-droite vient de constituer un nouveau parti. Partout, les nationalismes ont le vent en poupe.

Les médias ne jouent pas non plus leur rôle. Quand on regarde le traitement européen dans les médias, on ne peut s’étonner que le souffle du débat européen soit retombé. Le Figaro continue à ne pas mettre en ligne la rubrique « Europe », TF1 n’a toujours pas de correspondant pour Bruxelles, les radios de jeunes n’ont pas fait de couverture à l’occasion du 50aire du Traité de Rome. Au final, les candidats des extrêmes peuvent sortir les plus grandes ânneries sans qu’on leur réponde. Les journalistes ne jouent plus leur rôle de cadre, sûrement de peur d’être accusé de partisanisme.

La société civile et les électeurs attendent qu’on leur parle d’Europe

Alors que faire ? La société civile s’est mobilisée à diverses reprises :
 les Etats Généraux de l’Europe
 l’interpellation co-signée par les Jeunes Européens France, Sauvons l’Europe et d’autres associations
 le Grand Jury Européen réunissant des étudiants des Grandes Ecoles et des Universités. Ce sont des rassemblements qui à chaque fois ont montré à quel point les citoyens ont toujours envie de faire bouger l’Europe à l’heure où celle-ci est bloquée.

Les médias font le même constat que nous en cette fin de campagne : la Présidentielle 2007 n’aura pas mis l’Europe à l’honneur. Quel bêtise de laisser ce sujet aux extrêmistes alors que c’est un vrai sujet clivant entre les différents candidats ! Ceux-ci ont pu continuer à remuer le terreau de la peur. Personne n’a osé lever le drapeau européen comme projet de société. Comment réconcilier les européens du oui et du non si ce n’est en proposant une europe politique et fédérale ?

Car le vrai enjeu de l’Europe aujourd’hui, c’est bien de dire que les opposants aux nationalismes, ce sont les européens. D’ailleurs, ne nous trompons-pas : dans ses discours contre l’Europe, Jean-Marie Le Pen, l’ennemi, c’est non seulement l’Europe, mais aussi le Fédéralisme.

Être l’ennemi de Le Pen, cela ne voudrait-il pas dire que nous sommes dans le vrai après tout ?

Illustration : photographie de la publicité de National Hebdo dans la commune du Raincy (93), prise par le Taurillon.

Vos commentaires
  • Le 19 avril 2007 à 19:41, par Nicolas En réponse à : Cesser le centralisme bureaucratique, rendre aux pays leurs prérogatives.

    Bonjour,

    Ce que je ne comprend pas c’est que vous vouliez coûte que coûte que l’on ratifie cette constitution. Le peuple à dit NON donc c’est NON.

    Si les candidats modérés ne réagissent pas aux propos des extrèmes sur l’Europe, c’est qu’ils pensent qu’ils n’ont peut-être pas tort non ?

    Pour moi, il est temps après la phase de centralisme bureaucratique, de décentraliser les institutions européennes en rendant aux états le pouvoir qui leur a été retiré depuis 30 ou 40 ans.

    Ne vous faites pas d’illusions : avec 27 ou 28 pays (je ne sais plus), qui ont chacun leurs ambitions, chacun leurs vision, chacun leurs projet, vous n’arriverez jamais à accorder les violons.

    Des institutions supranationales trop puissantes ne rencontreront jamais l’assentiment des peuples, et les décisions prises ne créeront que des frustations, pour au final aboutir à un rejet.

    Cette Europe finit par faire perdre du temps à tout le monde (en europe) parce que les autres (Chine, Inde, Brésil) n’attendent pas une hypothétique constitution. Que les états reprennent les rênes et s’accordent au besoin de gré à gré, selon les enjeux et les ambitions communes.

    Merci de me publier.

  • Le 19 avril 2007 à 20:25, par Fabien Cazenave En réponse à : Cesser le centralisme bureaucratique, rendre aux pays leurs prérogatives.

    Quel peuple ? Le peuple européen ?

    Si vous voulez améliorer la répartition des pouvoirs entre Etats et Bruxelles, je vous engage dans la voie du Fédéralisme que nous proposons.

    C’est quand même bizarre que vous pensiez avoir raison pour tout le monde en Europe alors que les Espagnols et les Luxembourgeois se soient prononcés en majorité pour le Oui. Autant avoir un référendum européen qui obligerait nos gouvernements à se bouger en fonction du résultat non ?

    Si les candidats modérés s’expriment si peu sur l’Europe, c’est peut-être qu’ils manquent d’un certain courage et qu’ils choisissent la facilité ? Après tout, aucun d’eux n’a dit qu’il fallait sortir de l’Europe. Il y a donc peut-être une partie des gens qui ont voté non qui voudraient une Europe différente... et pas seulement des nationalistes (attention, je ne vous insulte pas).

  • Le 20 avril 2007 à 07:58, par Valéry-Xavier Lentz En réponse à : Cesser le centralisme bureaucratique, rendre aux pays leurs prérogatives.

    C’est amusant pendant la campagne référendaire les adversaires du traités se prétendaient généralement être pro-européens. On se rend compte chque jour depusi qu’ils étaient silmplement des nationalistes : nationalistes identitaires à droiet et sociaux nationalistes à gauche avec toujours la même conviction d’avoir raison contre le monde entier et de l’immense supériorité de notre pays sur tout les plans. Ce sont les mêmes que racole Sarko en tenant des discours anti-allemands et Royal en s’humiliant déhuisée en Marianne à promouivoir des ateliers de couture de drapeau cocorico. La grande caractéristique du coq c’est qu’il chante alors qu’il marche dans la merde.

    Ta vision de la construction européenne est je regrette d’avoir à te le révéler un pur fantasme. Les instituions communes d’une part n’ont rien de centralistes : il suffit de prendre connaissance de leur mode de fonctionnement pour s’en convaincre, et ne sont absolument pas trop puissantes.

    La plupart des intervenants lors du débat référendaire expliquaient qu’il fallait au contraire plus d’Europe : plus de social, plus de poids face aux superpuissances, plus de cohérence et un meilleur fonctionnement. À part les extrèmistes de tout bord ils se disaient avec raison pro-européens et ne rejettaient le traité que parce qu’ils le trouvaient insuffisant de ces points de vue. Ils avioent raison mais s’illusionnaient sur le fait de pouvoir obtenir rapidement un meilleur texte. Comme tu le souligne c’est difficile à 27 : cette erreur risque de nosu être fatalee car tout le temps perdu pour faire avancer l’Europe c’est un retard que nous prenons.

    Ton anti-europeisme est contre-productif et dangereux. Si nos petites nations s’enferme dans un nationalisme stupide nous sommes définitivement perdus : notre suel chance de nous en sortir c’est de mettre nos forces en commun dans une Europe rénovée, tous ensemble ou à quelques uns, et d’adopter un mode de fonctionnement plus efficace qui puisse permettre de définir et de mettre en oeuvre une politique commune.

  • Le 20 avril 2007 à 10:55, par ? En réponse à : Les candidats et l’Europe

    J’ai lu tous les tractes pour la campagne présidentielle de tous les candidats et j’ai relevé tous les passages où ils parlent d’Europe. En effet les extrêmes en parlent de manière négative, certains n’en parlent pas, d’autres de manière modérés. Je vous propose d’aller lire cela sur ce lien :

    http://www.jeunes-europeens.org/forum/viewforum.php?id=13

    Puis vous n’avez plus qu’a cliquer sur un nom. Bonne lecture

    Julien

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