La Pologne entre chute du communisme et intégration européenne

Focus sur la Révolution de 1989 en Pologne

, par Dobroslawa Budzianovska, Traduit de l’anglais par Michel Gelly

La Pologne entre chute du communisme et intégration européenne

La révolution capitaliste-démocratique en Pologne n’a pas été une révolution, et n’a pas eu lieu en 1989. Elle fut en fait le produit d’un processus complexe qui s’est étendu sur des années.

Elle est d’ailleurs évoquée de manière plus appropriée par plusieurs écrivains sous l’appellation « transition » - une série de changements et de métamorphoses ayant conduit l’économie socialiste planifiée à devenir capitaliste et démocratique. Afin de comprendre la nature et les objectifs de ces changements, il faut tout d’abord discuter des événements s’étant tenus avant 1989 et de ceux de 1989, et, ensuite, des événements des années 1990 et de leur impact encore visible aujourd’hui. Élargir le tableau de la « révolution de 1989 » permet une compréhension plus approfondie du sens des changements qui se sont produits.

L’impact de Solidarność

Les événements les plus liés à ce qui a eu lieu en 1989 sont sûrement les grèves organisées par le syndicat polonais Solidarność (« Solidarité »). Ce syndicat fut le premier à être non-communiste et indépendant en Europe centrale et orientale. Le gouvernement polonais tenta de s’y opposer au cours des années 1980, alors que le syndicat constituait le point central des mouvements d’opposition. Solidarność coordonna les grèves dans toute la Pologne qui se tinrent en 1988. Le PZPR (Parti Polonais des Travailleurs Unis), ou force motrice de la Nation comme il eut l’habitude de s’auto-qualifier, fut contraint avec le gouvernement de se conformer aux revendications de Solidarność ; à l’été 1989, des tables-rondes furent organisées avec des représentants de l’opposition.

Il en résulta quelque chose qui peut être perçu comme révolutionnaire, à savoir les bases pour des premières élections parlementaires semi-libres. Cependant, une question se pose ici : est-ce que les tables rondes ont constitué le point d’orgue de la « révolution » de 1989, ou ont-elles simplement été la conséquence naturelle des aspirations libérales du pays qui furent auparavant exprimées à maintes reprises, à travers des grèves, de travailleurs comme d’étudiants. C’est vraisemblablement dans cette deuxième explication qu’on trouve la réponse, sans diminuer l’importance de l’année 1989, car sans les événements qui la traversèrent, la mise en place de réformes fondamentales n’aura pu avoir lieu par la suite.

Des transitions désynchronisées

Parler simultanément de la chute de l’Union Soviétique et de la libération démocratique de l’Europe centrale et orientale constitue une erreur courante. En fait, dans les années 1990, la Pologne s’apparentait, sur les plans politique, institutionnel ou économique, plus au chaos qu’à une démocratie dotée d’un système stable de marché libre, comme, par exemple, le Royaume-Uni. C’est dans ce contexte que le terme ‘transition’ entre en jeu. Le pays a dû passer à la fois par une phase de redéfinition et traiter la question du passé socialiste. Au cours des années 1990, le Ministre des Finances Leszek Balcerowicz a mis en place une série de réformes, comme une partie du plan Balcerowicz, qui avait pour but de mettre fin à l’hyper-inflation ainsi que de stabiliser l’économie du pays et le budget de l’État.

C’est seulement aujourd’hui qu’il est clair que, sans cette thérapie de choc, la transition polonaise vers le capitalisme n’aurait pas été possible. A travers ces réformes, la Pologne a transformé son économie et s’est convertie en État capitaliste avec succès. La vie politique fut de loin plus intéressante, sans pour autant dire qu’elle était capable de donner une autre impression que l’anarchie.

Concrètement, les premières élections parlementaires totalement libres n’eurent lieu qu’en 1992 tout comme l’entrée en vigueur de la « petite » Constitution –la Constitution complète en vigueur aujourd’hui ne l’est que depuis 1997. Plus généralement, les nombreux scandales, la discréditation des élites politiques, le renversement des gouvernements, les Premiers Ministres changeant en moyenne tous les deux ans, furent des éléments centraux de cette nouvelle vie politique. Il fallut cependant attendre les années 2000 pour voir les derniers liens entre le PZPR, les autres partis et les politiciens disparaître après que ces derniers se soient définitivement compromis au point de devoir quitter la scène politique, et permettre l’émergence des deux forces politiques principales d’aujourd’hui, la Plateforme Civile (PO) et Droit et Justice (PiS). La Pologne des années 1990 n’était pas vraiment politiquement libre, l’opinion publique était encore sous l’influence indue du socialisme. Néanmoins, la démocratie polonaise y a fait ses classes et se dirige désormais vers un futur politique stable.

Il fallut cependant attendre les années 2000 pour voir les derniers liens entre le PZPR, les autres partis et les politiciens disparaître après que ces derniers se soient définitivement compromis au point de devoir quitter la scène politique, et permettre l’émergence des deux forces politiques principales d’aujourd’hui, la Plateforme Civile (PO) et Droit et Justice (PiS). La Pologne des années 1990 n’était pas vraiment politiquement libre, l’opinion publique était encore sous l’influence indue du socialisme. Néanmoins, la démocratie polonaise y a fait ses classes et se dirige désormais vers un futur politique stable.

De l’accord d’association de 89 à l’adhésion de 2004

Le rôle de l’Union européenne constitua à la fois la fin et le moyen dans ce processus de transition. A partir du moment où la Pologne sortit de sa “révolution“ pour devenir un pays libre, elle aspira à devenir partie intégrante de la nouvelle Europe unie. En fait, elle commença les négociations avec les Communautés européennes dès 1989, signant avec elles un Accord d’Association. Elle intégra finalement l’Union européenne le 1er mai 2004. Les changements que la Pologne a dû entreprendre afin d’intégrer l’Union ont contribué à moderniser son économie et son organisation étatique. Elle a rendu le pays plus adapté aux réalités actuelles et la prépara à prendre un rôle actif dans la constitution de sa vie politique, économique et sociale, en conformité avec les valeurs et les conventions de l’Union européennes. L’Union européenne a régulé et assisté de manière juste le processus de transition politique, ce qui était recherché par le pays.

Ce ne sont pas les seuls événements de 1989 qui ont apporté les changements démocratiques ou la liberté de marché à la Pologne. Ces changements sont plus complexes et se sont déroulés sur le long terme. Il est impossible d’identifier quels changements ont exactement conduit à la révolution. Il faut les considérer dans leur ensemble comme une modification de l’organisation et du système d’État. Ainsi, laissons le jugement des événements de 1989 aux historiens, qui peuvent le faire à travers la perspective du temps et d’un contexte bien plus large. Pour les jeunes européens, ces événements resteront le symbole d’un extraordinaire courage civil et d’une volonté politique, qui devraient être mis en avant et pris comme exemple.

Illustration : Armoiries de la Pologne

Source : Wikipedia

Vos commentaires
  • Le 18 février 2010 à 06:22, par Martina Latina En réponse à : La Pologne entre chute du communisme et intégration européenne

    Merci pour ces articles sur l’intégration européenne des nations d’Europe Centrale ; oui, les mouvements qui ont courageusement porté leur retour, puis leur vigoureuse contribution, dans L’EUROPE en marche sont exemplaires, à l’image toujours juvénile de notre figure tutélaire et fédératrice appelée EUROPE à l’aube de la civilisation :

    ENLEVEE aux ténèbres originelles, par la force même du TAURILLON solaire et des techniques dont elle est la soeur autant que le visage (nautiques et alphabétiques), dans les airs, sur la mer, depuis l’orient fondateur, elle semble enfin RENDUE à ceux qui portent son nom de « VASTE-VUE », comme si elle était sans cesse à l’oeuvre pour nous faire inventer une intégration harmonieuse, créatrice et démocratique, donc pour mettre au monde ensemble, simplement, patiemment, passionnément, la justice et la paix.

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