23 langues officielles, 2 langues effectivement parlées
Le choix du vélo, pour sa part, s’explique de manière assez lyrique : Sébastien voulait prendre son temps et profiter de tous les endroits traversés. Courageux, il avoue que s’il avait pu y aller « à pied ou en pédalo » il n’aurait pas hésité, désireux de « redécouvrir la lenteur » – sans compter que son bilan carbone est ainsi nul. Européen, sportif et responsable, donc. Quant au sport, justement, il s’est entraîné quelques week-ends avant le grand départ pour habituer son corps à l’effort physique. Avant de partir, il s’est juste assuré que son Blackberry avait une connexion fonctionnelle afin d’être à même de rechercher des campings dans les villes étapes de son voyage.
La question qui revient souvent quand il s’agit de mobilité européenne, à laquelle on ne peut échapper, est évidemment celle de la langue : comment se faire comprendre quand on ne parle pas vingt-trois langues ? « J’avais des petits dictionnaires avec moi : hollandais et allemand car je n’en ai pas trouvé de flamand, mais finalement ça n’a pas posé de difficulté. En fait, beaucoup parlent anglais, j’étais inquiet mais ça s’est plutôt bien passé. Et surtout, les gens que je croisais venaient spontanément me voir, pensant que j’étais moi-même hollandais ou allemand, puisque l’attitude d’enfourcher son vélo pour partir à l’aventure n’est pas très française. » En conclusion, on peut voyager en Europe sans forcément parler local, il suffit essentiellement d’être avenant et de vouloir communiquer pour parvenir à se faire comprendre.
L’histoire comme paysage privilégié
Sébastien Liebus est un passionné d’histoire qui a pris la mesure du pèlerinage historique qu’il effectuait une fois sur place. « Ce voyage était très symbolique, il reste des anciennes tranchées, on passe à côté de cimetières de la Première et de la Seconde Guerres mondiales, on traverse énormément de villes synonymes de grandes batailles (Ypres). À Amsterdam, on rencontre le musée Anne-Frank, pour enfin arriver, en Allemagne, à franchir le Rideau de fer puis le mur de Berlin. » À travers toutes ces étapes, le voyageur fait des rencontres qui l’amènent à s’interroger sur le poids de l’histoire à travers le temps : il cite notamment l’exemple de cet homme de quatre-vingts ans, rencontré à une centaine de kilomètres de Paris. Traumatisé par la Seconde Guerre mondiale, le vieil homme exprime son admiration pour le projet de Sébastien tout en avouant son impossibilité de faire de même : il se sent « bloqué » par rapport à son vécu personnel ; cependant, il incite ses enfants et petits-enfants à apprendre l’allemand et à voyager en Allemagne. D’une certaine manière, cette façon que ce grand-père avait de conseiller à sa famille ce que lui-même ne parvenait à réaliser, cette façon de ne pas entretenir la haine et la rancœur, cela est probablement une belle symbolique de la réconciliation franco-allemande.
D’ailleurs, à travers son voyage, Sébastien a rencontré beaucoup d’Européens, surtout à proximité des capitales, très multilingues. Dans les campings, « cœur de la jeunesse européenne en vacances », quasiment toutes les nationalités étaient représentées. Est-ce à dire qu’à travers le voyage, la rencontre de l’autre, on peut véhiculer, dans nos bagages, un morceau de paix et d’humanité ? D’après Sébastien, « notre génération a pour devoir de construire la paix à travers les voyages. Les régions que j’ai traversées ont beaucoup souffert et la pierre en porte encore la trace (par exemple la cathédrale de Munster, ou encore dans Berlin certains bâtiments ont été conservés, qui portent la marque de la Bataille de l’Europe). C’est important de se dire qu’avec l’Europe et la construction européenne, on a réussi à effacer ça. »
Suivre les commentaires : |