Fédéralismes comparés

Les États-Unis d’Amérique : un modèle ?

En quoi le fédéralisme américain est-il un exemple à suivre ?

, par Maïa Bouthors

Les États-Unis d'Amérique : un modèle ?

Aujourd’hui, certaines voix [1] s’expriment pour demander que l’UE évolue vers un modèle d’organisation fédérale. Or voilà justement un projet tout à la fois délicat et inédit : inédit étant donné l’échelle géographique de l’Union, ainsi que délicat (vu le très fort ancrage identitaire des populations vivant dans ses États membres...).

C’est pourquoi, s’il nous paraît effectivement intéressant de comparer les systèmes fédéraux existants aujourd’hui de par le monde, on peut néanmoins difficilement faire l’impasse du cas des États-Unis d’Amérique...

Les États-Unis d’Amérique : un cas particulier à examiner très attentivement. Non seulement pour l’étude de son seul système institutionnel. Mais aussi afin d’identifier là quelques éléments ayant permis en Amérique (et pouvant permettre, en Europe...) la mise en place d’une fédération...

En effet, les Pères fondateurs des États-Unis étaient, dès le départ, porteurs d’un projet peu ou prou « fédéraliste ». En effet, avant même leur(s) indépendance(s) acquise(s) (en 1783), les 13 colonies se s’étaient organisées (en 1781) en une Confédération, régie par des « Articles de Confédération ».

De la Confédération à la Fédération

Mais cette « Confédération » a rencontré un certain nombre de problèmes : lesquels étaient essentiellement dus à son inefficacité (l’unanimité étant alors exigée pour toute prise de décision) [2]. C’est pourquoi a émergé, très rapidement, un parti contestataire face aux défaillances de cette confédération : un mouvement dit « fédéraliste » dont le leader était Alexander Hamilton.

Ce parti ’’fédéraliste’’ voulait créer une identité américaine commune aux 13 colonies. En ce sens, il était nationaliste. De même, il se caractérisait également par la volonté de centraliser les institutions (et de les doter de pouvoirs régaliens...) afin de leur donner les moyens d’agir de façon autonome, éventuellement face aux États (dont d’autres voulaient défendre l’autonomie).

Alexander Hamilton

Donc, trouver un compromis acceptable de tous et mettre en place un système permettant la coexistence de ces deux logiques - la logique nationale et celle des États - représentait une réelle innovation. Ce fédéralisme américain ayant donc été conçu comme un compromis pour répondre à cette exigence d’autonomie et de cohésion.

Toutes idées qui ont été formalisées lors de la Convention de Philadelphie (mai-septembre 1787) où la Constitution fédérale fut rédigée. Ainsi, au printemps 1789 (après la phase des ratifications) naissaient les États-Unis d’Amérique, premier régime fédéral de l’Histoire moderne et contemporaine [3].

Un mode opératoire qui a fait ses preuves : la mise en place d’un fédéralisme par la nationalisation de la vie politique

La mise en place du fédéralisme aux États-Unis fut rendue possible grâce à deux éléments essentiels : la diffusion à l’échelle nationale du débat politique et cette même ’’nationalisation’’ de la pratique de la vie politique. Dans les premiers temps, la Constitution rencontra une forte opposition entre ’’centralisateurs’’ et ’’décentralisateurs’’. Et ce n’est que grâce aux divisions de leurs adversaires que les fédéralistes ont finalement pu l’emporter. Donc, comme on le voit ici, le débat politique eut lieu dès le début à l’échelle nationale, entre deux partis d’audience nationale : les « fédéralistes » et les « anti-fédéralistes ».

En tout cas, cela est très intéressant car un bon indicateur du degré de fédéralisme est précisément la « nationalisation » des partis : c’est à dire la ’’constitution d’un espace public légitime à l’échelle de la fédération’’ (espace public transcendant le particularisme des États...). Cette « nationalisation du débat » fut rendue possible grâce à la naissance, durant la guerre d’indépendance, d’un fort sentiment national. La cohésion des ’’Coloniaux’’ s’étant alors réalisée face à l’ennemi - britannique - commun.

Mais pourquoi ce sentiment national a-t-il persisté, une fois l’ennemi disparu ? À ce sujet, Tocqueville a avancé l’idée jugée par lui suffisante et selon laquelle les américains aimaient leur pays : parlant même à ce sujet de « patriotisme intéressé » (car travailler à la prospérité du pays coïncide là avec l’intérêt de chaque citoyen...). Et, aujourd’hui, on constate que cette fierté nationale est toujours présente pour une large partie de la population, sentiment de fierté renforcé par le fait d’être citoyen d’un pays « hyper-puissant » au niveau mondial.

De l’observation du modèle à la mise en application : Peut-on envisager, pour l’UE, une « européanisation » de la vie politique ?

Si l’on souhaite la mise en place d’une semblable ’’européanisation’’ de nos vies politiques nationales, il faut alors se pencher sur le cas très spécifique du Parlement européen et des actuels Partis politiques européens. En effet, le Parlement européen (lieu où les députés siègent par identification politique...) est un espace dans lequel on pourrait envisager la mise en œuvre de partis que l’on retrouverait à l’échelle européenne. Mais force est de constater que, pour l’instant, lors des élections européennes, le débat reste pourtant purement national pour la plupart de ces formations.

L’enjeu — ici — serait donc de créer une nouvelle source de légitimité qui dépasse les États : par la création d’un espace public européen. Ainsi, pourquoi ne pas concevoir des partis politiques européens ? En effet, les pays européens étant confrontés aux mêmes problèmes, on pourrait très bien envisager une meilleure coopération entre leurs partis sur des problèmes de dimension effectivement européenne.

L’enjeu étant — là — de concilier des deux logiques : d’une part conserver la logique nationale (indispensable pour gérer des problèmes locaux...) et d’autre part, développer la logique européenne (quasi inexistante aujourd’hui...) pour traiter d’autres problèmes. L’idéal étant que les citoyens puissent acquérir ce double système de référence et se sentir comme appartenant à ces deux sphères. Alors qu’aujourd’hui, si les citoyens de l’Union ont certes à la fois la citoyenneté de leur pays de résidence (ou de naissance) et la citoyenneté européenne, la majorité d’entre eux ne se réfèrent pourtant qu’au cadre national...

Deux héritages clefs : Répartition des compétences et Principe d’applicabilité directe

Aux États-Unis la répartition des compétences entre États fédérés et Fédération est établie dans la Constitution. Ainsi, l’Union a des compétences dans les domaines suivants : affaires étrangères, défense et politique monétaire. Pareillement, elle décide des impôts directs (répartis proportionnellement selon le nombre d’habitants entre les États...). De même, les États fédérés ont des compétences de droit commun : législation pénale, divorces, mariages, fiscalité, police, enseignement, justice.

The Federalist papers

Cependant, comme nous l’avons vu, il existe une large marge d’interprétation des textes constitutionnels. Et les pouvoirs de l’Union se sont historiquement renforcés par une centralisation progressive. Notamment grâce à la mise en place de politiques comme le « New Deal » du Président démocrate Franklin D. Roosevelt [4]. Les deux guerres mondiales ayant également entraîné un renforcement du pouvoir central, principalement dans ses compétences de politique extérieure.

Pour garantir l’efficacité l’Etat fédéral et la pérennité de l’ensemble, les États-Unis ont adopté le « principe de superposition » qui exige la primauté du Droit fédéral et son applicabilité directe, n’en déplaise aux Etats membres. Or, nous pouvons remarquer qu’en seuls termes de Droit - pour ce qui concerne l’Union européenne - les arrêts « Van Gend En Loos » et « Costa contre ENEL » (de 1963 et 1964) affirment également cette applicabilité directe et cette primauté du Droit communautaire sur les droits nationaux (dispositions reconnues par la France : notamment par décision du Conseil d’Etat : par l’Arrêt « Nicolo » du 20 octobre 1989) [5].

Ce ’’principe de superposition’’ s’applique dans le domaine des relations entre les Pouvoirs fédéraux et les États fédérés. Ainsi aux États-Unis, suivant le principe d’autonomie, chaque Etat conserve sa propre organisation : sa constitution, ses institutions et ses modes d’élections. Un principe qui permet de respecter les identités des États pour ce qui concerne la gestion des affaires locales. Et un élément qui, dans le cadre de l’UE, existe déjà, préservant les identités nationales des Etats membres.

Une Présidence stable, une représentation équilibrée des Etats, une représentation claire du Peuple fédéré

Point fondamental de l’organisation institutionnelle étasunienne : la place éminente du Chef de l’Etat. Ainsi, désigné par le peuple (même si c’est au suffrage indirect...), le « Président des États-Unis » a tout le pouvoir exécutif et gouverne la fédération en indiquant les grandes lignes politiques à suivre. Certes, il est irresponsable vis à vis du Congrès mais il existe néanmoins de nombreuses procédures de contrôle de l’activté présidentielle (Commission d’enquêtes, procédure d’Impeachment, etc).

Ainsi, le président américain est un visage clairement identifié, une personnalité qui ’’donne une teinte’’ à son mandat. Il est également le seul dirigeant national auquel les électeurs s’identifient : 98% des américains étant capables d’identifier le président (contre 16% seulement pour le Secrétaire d’Etat...). D’où l’intérêt de, peut-être, doter l’UE d’un visage d’un homme ou d’une femme qui soit ainsi capable de donner une impulsion et une énergie, mais aussi une cohérence et une visibilité supérieure à l’action communautaire. (Ce qui était prévu dans le Traité constitutionnel).

Pour ce qui est de la représentation des Etats dans l’architecture institutionnelle : aux États-Unis, le « Sénat » offre deux sièges à chaque État quelque soit la ’’taille’’ de ceux-ci [6].]]. Et cette égalité de représentation permet ainsi de ’’protéger’’ les petits États (qui ont la moitié des sièges au Sénat...). Ce Sénat a d’ailleurs encore des prérogatives de politique étrangère et statue sous un mode de délibération de ’’majorité qualifiée’’ demandant une double-majorité à la fois d’Etats et d’Elus. Ainsi, l’institution de l’UE qui y ressemblerait serait donc le « Conseil ». A une différence près : la prise de décision à la majorité qualifiée (majorité d’États, de population, de votes...) n’y est pas systématique. En effet, l’unanimité perdure dans des domaines dits ’’sensibles’’ (PESC, PESD, JAI), ce qui complique la prise de décision (surtout après l’élargissement).

Le Dôme du Capitole : Congrès des Etats-Unis

Pour ce qui est de la représentation de la population de la fédération : aux États-Unis, celle-ci est représentée à la « Chambre des représentants » dont les députés (ou Représentants) sont élus pour deux ans au Suffrage universel direct, dans leurs circonscriptions mais sur un mode strictement égalitaire quel que soit leur Etat de provenance [7].

Or, si l’UE dispose effectivement aujourd’hui d’un « Parlement » représentant la population de l’Union, force est de constater cependant que cette représentation se fait - aujourd’hui - non pas de manière égalitaire mais de manière dégressivement proportionnelle (i. e : plus les États sont petits et plus leur représentation est forte...).

De même, on constate qu’aux Etats-Unis « Sénat » et « Chambre des Représentants » ont des pouvoirs égaux en matière législative. Or, ce n’est pas exactement le cas dans le système européen actuel : où le Conseil de l’Union dispose d’une prééminence législative encore évidente dans de nombreux domaines ’’jugés sensibles’’. Enfin, juste noter qu’aux Etats-Unis les deux chambres forment ensemble le « Congrès » (et sont totalement indépendantes du pouvoir exécutif...). Or juste préciser que l’UE ne dispose pas d’une institution (ou d’un regroupement d’institutions) de ce type. Et que le Conseil de l’Union (dont les membres ne sont pas, contrairement aux Sénateurs américains, directement élus par les Citoyens) n’est actuellement rien de moins qu’une émanation des exécutifs des Etats-membres.

Les leçons de l’expérience américaine

De l’étude du système fédéral des États-Unis, nous pouvons retirer quelques leçons. Tout d’abord on peut souligner qu’aux États-Unis le fédéralisme s’est adapté par pragmatisme, dépassant ainsi par là même la théorie. Ainsi - très simple - la Constitution de 1787 [8] sa été depuis lors très largement interprétée et réinterprétée par les juges. En effet, si cette Constitution est toujours utilisée aujourd’hui, elle n’en n’a pas moins été rédigée dans un contexte tout à fait différent de celui que nous connaissons actuellement. Ce qui laisse là une grande marge de manœuvre aux juges chargé d’interpréter ses insuffisances (et ses silences...) sur des problèmes qui ne se posaient effectivement pas à l’époque...

Pour ce qui est de l’Europe, si le fédéralisme était bien le projet de Monnet, il comptait cependant pour le mettre en place sur une technique ’’d’engrenage’’ (i. e : sur des projets techniques et concrets devant déboucher tôt ou tard sur une intégration politique...) mais cela n’a que moyennement fonctionné. Or, l’exemple des États-Unis nous prouve qu’il n’est pas forcément nécessaire de vouloir tout prévoir avant de se lancer dans un projet fédéral. Et l’existence d’un ’’modèle’’ institutionnel comme celui des Etats-Unis nous montre très bien qu’un tel ’’système’’ institutionnel peut aussi être assez souple pour pouvoir s’adapter. Et cette flexibilité est un élément tout à fait rassurant.

Ainsi le système fédéral américain s’est révélé être un système flexible, capable d’être adapté à l’histoire et aux évènements. Et cette caractéristique se révélerait tout à fait rassurante si on peut effectivement l’adapter à l’UE. Néanmoins, la mise en place d’une fédération nécessite un minimum de cohésion nationale (au sens ’’unificateur’’ du terme) ce qui reste encore à renforcer pour ce qui est de l’UE. Or cela peut se faire en créant, par exemple, des partis politiques à l’échelle européenne. Ou par la création d’un poste de Président(e) de l’UE : personnalité à laquelle les citoyens pourraient s’identifier et à laquelle l’UE pourrait être identifiée.

De même, en seuls termes juridiques, l’UE présente par certains aspects des caractères de fédération. Mais son intégration politique est encore inachevée. En effet, il semble manquer, dans les textes européens, quelque texte exposant une répartition claire, nette et précise des compétences entre les Etats membres et l’UE (laquelle était néanmoins prévue dans le TCE). Or, sans même entrer dans le débat de la répartition des compétences (et des domaines régaliens dans lesquels l’UE devrait être en mesure d’agir plus efficacement que les Etats membres : politique étrangère, par exemple...), il semble cependant nécessaire de pouvoir dire clairement qui fait quoi...

Cependant, la comparaison entre l’Union européenne actuellement en construction et les États-Unis d’aujourd’hui a ses limites.

Car c’est par une centralisation progressive des pouvoirs que cette fédération des Etats-Unis d’Amérique s’est transformée en cet Etat fédéral que l’on sait.

Mais il ne s’agit là que d’un exemple parmi tant d’autres d’une Fédération. Laquelle s’est formée dans un contexte tout à fait différent.

Or le but n’est pas non plus de copier nécessairement le modèle ’’États-Unis’’. Mais plutôt d’en observer et d’en tirer quelques éléments pertinents pouvant nourrir et enrichir quelque projet inédit de Fédération européenne. [9]

- Illustration :

Le visuel d’ouverture de cet article est le premier drapeau officiel des Etats-Unis d’Amérique : Drapeau national américain dans sa version « Betsy Ross » (i. e : avec les seules 13 étoiles des seuls 13 Etats fondateurs) utilisé du 14 Juin 1777 au 1er Mai 1795.

(Sources : Encyclopédie en ligne wikipédia).

Article initialement paru en aout 2007

Notes

[1Comme le PM belge Guy Verhofstad ou les « Jeunes Européens Fédéralistes », dont ce webzine est l’émanation...

[2La faillite du gouvernement confédéral :

« Les Insurgents avaient gagné la guerre, ils n’avaient pas gagné la paix. Le problème politique n’était pas résolu : les mêmes causes dans la paix, produisaient les mêmes effets. Impuissant hier à conduire la guerre, le Congrès ne l’est pas moins à régler les questions nées de la paix : exécution des traités, remboursement des emprunts, négociations commerciales.

À l’épreuve des faits, le gouvernement établi par les articles de Confédération se révèle radicalement inférieur à sa tâche : la clause de l’unanimité des Etats le paralyse. Les affaires publiques vont mal et la situation se dégrade rapidement : les États se livrent à des guerres douannières et commerciales qui les ruinent, les dépenses excèdent les ressources, les caisses se vident, la dette enfle, la monnaie se déprécie ; l’armée se défait ou se mutine, des soldats marchent sur Philadelphie dont le Congrès s’enfuit. L’opinion est inquiête, l’agitation fait tâche d’huile, les puissances étrangères jugent sévèrement cette impuissance et - en cette fin d’année 1783 - c’est l’existence même de la Confédération qui est menacée.

Il est (alors) patent que la victoire, si elle a émancipé les colonies, n’en n’a fait ni une puissance, ni une nation, faute d’un État. Ces années critiques, souvent escamotées dans le récit de la naissance des États-Unis sont capitales pour leur avenir : elles ont gagnés les esprits à l’idée d’une révision des institutions. » ; Sources : « Histoire des États-Unis » par René Rémond : « Que sais-je ? » n°38, édition de 1992 (ici, pages 25 et 26) et « Les institutions américaines » par Françoise Burges : « Que sais-je ? » n°1547, édition de 1992 (ici page 17).

[3La ratification  :

« Pour entrer en vigueur, les Conventionnels avaient disposé que la Constitution devrait rallier neuf au moins des treize Etats. Il a fallut seulement six mois (décembre 1787 - juin 1788) pour que la nouvelle Constitution soit adoptée : même si quatre États (Virginie, New York, Caroline du nord et Rhodes Island) refusèrent plusieurs mois, voire plusieurs années, d’entrer dans la nouvelle nation. Les conditions enfin remplies, le nouveau gouvernement fédéral put entrer en fonction : avec l’élection, le 4 mars 1789, de Georges Washington comme premier président des États-Unis, une époque prend fin, celle des années critiques, une autre histoire commence. » (Sources : « Histoire des États-Unis » par René Rémond : « Que sais-je ? » n°38 édition de 1992, ici page 32).

[4Le « New Deal »  : On désigne sous l’expression « New Deal » (i.e : ’’Nouvelle Donne’’) un ensemble de politiques publiques menées par le pouvoir fédéral qui - dans les années 1930 - concernant les questions économiques et sociales, ont permis au pouvoir fédéral étasunien d’asseoir son autorité au travers la mise en place (entre autres choses) d’un vaste programme de subventions publiques et d’aides d’Etat.

[5En France, l’article 55 de la Constitution prévoit que les traités ont une valeur supérieure aux lois (mais pas à la Constitution : principe juridiques confirmé - en 1998-1999 - par deux arrêts récents du Conseil d’Etat et de la Cour de Cassation).

Mais, en dehors de ce cas de figure spécifique, le principe de primauté de Droit communautaire sur les Droits nationaux joue pour toutes les lois nationales (et même pour les lois postérieures aux Traités) :

« Principe de primauté » régulièrement affirmé par la CJCE, principe accepté par la Cour de Cassation dès 1975 (Cf. Arrêt « Jacques Vabre ») et accepté par le Conseil d’Etat en 1989 (Cf. Arrêt « Nicolo »).

[6Les membres du Sénat étant élus depuis 1913 (17e Amendement) directement par le corps électoral de leurs Etats respectifs (et non plus par la législature de celui-ci). Et ce, pour un mandat de six ans. (Sources : « Les institutions américaines » par Françoise Burges : « Que sais-je ? » n°1547, édition de 1992 : ici page 68).

[7A l’heure actuelle il y a 435 Représentants à la Chambre des Représentants soit, en moyenne, un représentant pour 525/530 000 habitants. Et tous les dix ans le coefficient de représentation et la répartition des sièges par Etats sont révisés par la Chambre des Représentants en fonction du recensement de la population des Etats. Ainsi, actuellement le Névada et l’Alaska ont un seul représentant alors que l’Etat de New York en a 31 et que la Californie en a 52. (Sources : « Les institutions américaines » par Françoise Burges : « Que sais-je ? » n°1547, édition de 1992 : ici pages 66 et 67).

[8Rédigée entre quatre mois, du 25 mai au 17 septembre 1787 (lors de délibérations qui auront compté environ trois cent heures...) la Constitution des Etats-Unis se compose de 89 phases et 4000 mots : sa lecture à haute voix ne demandant qu’une petite demi-heure... (Sources : « Histoire des Etats-Unis » par René Rémond : « Que sais-je ? » n°38, édition de 1992 : ici page 27).

[9Un article initialement publié le 22 août dernier, republié en ce 6 novembre 2006...

Vos commentaires
  • Le 7 février 2007 à 19:09, par Pierre-Michel En réponse à : Les Etats-Unis d’Amérique : un modèle ?

    Je parcours rapidement votre article. J’ignore si vous précisez les lignes suivantes, mais il est très important de limiter la comparaison entre les Etats-Unis d’Amérique et l’Union européenne. Il y a beaucoup trop de différences pour cela. 1°/ Les USA étaient une nation jeune quand ils se sont réunis. 2°/ L’Europe est composée de nations très anciennes -la France a plus d’un millénaire d’existence- qui ont leur propre histoire. 3°/ Les USA partagent une langue commune, l’anglais, quand, nous, Européens, peinont à en choisir une, et devant, ce fait, nous préférons nous en tenir à une novlangue parlée de trop peu : l’esperanto.

  • Le 8 février 2007 à 11:19, par Ronan En réponse à : Les Etats-Unis d’Amérique : un modèle ?

    Il y a beaucoup trop de différences pour cela.

    Re : Pardon, mais je ne partage pas nécessairement ce point de vue.

    1°/ Les USA étaient une nation jeune quand ils se sont réunis.

    Re : Certes, mais une nation « jeune » composée de gens venus de « vieux pays » (souvent rivaux et ennemis entre eux...). Personnes qui ont alors dû - pour bon nombre d’entre eux - rompre avec leurs attaches et avec leurs allégeances politiques antérieures. Et cela ne s’est pas toujours fait sans mal (non seulement entre eux mais également avec les européens arrivés précédemment ; sans même parler des populations autochtones...).

    2°/ L’Europe est composée de nations très anciennes -la France a plus d’un millénaire d’existence- qui ont leur propre histoire.

    Re : Certes, mais ces « néo-américains » sont alors venus d’horizons divers. Et ce, avec leurs préjugés, leurs clichés, leurs jugements émis à l’égard d’un autrui avec lequel, désormais - il a fallu construire le « vivre ensemble » sur d’autres bases que les réflexes culturels et « nationaux » antérieurs. Et cela ne s’est - là encore - pas toujours fait sans mal.

    De plus, il me semble qu’en France on a tendance (’’car nous, nous sommes une vieille nation, n’est-ce pas...’’) à sous-estimer les différences pourtant évidentes existant entre les différents Etats de la fédération des USA : pays qui n’est pas uniforme et que souvent - culture de masse télévisuelle mise à part - nous connaissons fort mal.

    Des Etats américains qui ont pourtant tous leur histoire, leurs particularismes, leurs ’’alchimies’’ socio-culturelles, leurs équilibres, leurs mentalités, leurs populations spécifiques et leurs vies politiques propres. Et qui ne sont pas - contrairement à ce que certains d’entre nous imaginent - de seules « circonscriptions administratives » n’ayant pas d’âme et aucune identité spécifique.

    Et qu’on ne vienne pas dire que vivre en Nouvelle Angleterre (dans le Maine ou dans le Massachusetts), en Californie et au Texas, dans les Rocheuses et dans les grandes plaines (du Wyoming ou du Colorado jusqu’en Oklahoma ou en Iowa), sur les grands lacs ou encore dans le ’’sud profond’’ (en Alabama, en Arkansas, en Louisiane ou en Floride), c’est toujours exactement la même chôse...

    Tous Etats entre lesquels, en tout cas, il a donc aussi fallu construire le « vivre ensemble ». Et cela ne s’est pas toujours fait sans mal...

    Au prix même d’une « guerre interne » subie sur leur sol même que nous appellons aujourd’hui « guerre de sécession » et qu’ils appellent - eux - « civil war ». Laquelle reste même, à ce jour (devant la seconde guerre mondiale ainsi que la guerre du Vietnam...), le conflit le plus sanglant de toute l’histoire des Etats-Unis. Conflit qui aura également nécessité l’organisation d’une véritable « réconciliation » nationale (pour beaucoup encore inachevée à ce jour...).

    S’il s’agit donc bien d’examiner la construction de ce « vivre ensemble » aux Amériques (dans un cadre institutionnel, philosophique et politique bien spécifique) avec ce que nous tentons - nous - de faire en Europe, il me semble alors que la comparaison garde donc toute sa validité. Et pas nécessairement au détriment des européens...

    3°/ Les USA partagent une langue commune, l’anglais, quand, nous, Européens, peinont à en choisir une...

    Certes, mais c’est là négliger le fait que - dans les Etats-Unis des débuts - l’allemand (le néerlandais ?!) étai(en)t autant (sinon plus) parlé que l’anglais (et, d’ailleurs, par une population alors pas nécessairement bilingue...). Et qu’aujourd’hui l’espagnol est de plus en plus parlé aux USA (et ce : par une population pas nécessairement bilingue non plus...).

  • Le 8 août 2007 à 19:47, par Ronan En réponse à : Disunited States of America

    Où l’on découvre l’un des nouveaux romans (de SF) du très prolifique (et bien connu dans le ’’milieu’’) auteur ’’étasunien’’ Harry Turtledove : « The Disunited States of America », quatrième volume de sa série « Crosstime Traffic » publié chez l’éditeur ’’Tor’’ en 2006-2007 (ouvrage nominé pour les ’’2006 Sidewise Award for best long-form alternate history’’).

    Une ’’uchronie’’ ou ’’histoire alternée’’ (Cf. http://fr.wikipedia.org/wiki/Uchronie) reposant sur une ’’divergence historique’’ censée avoir eu lieu en 1787, au moment de la fameuse Convention constituante instaurant la fédération que l’on sait. A savoir le ’’What if’’ suivant : ’’The Philadelphia Convention could not agree on a legislative power-sharing formula and so the Constitution was never ratified and eventually the United States broke apart’’.

    Un sujet énormément débattu sur le net ; comme ici encore, par exemple : http://users.erols.com/mwhite28/misc/balkanus.htm

    ’’1787 : A fire at the State House in Philadelphia kills several members of the Constitutional Convention, including Washington, Madison and Franklin, and the new nation is forced to pass its early turbulent years without its most important leaders. After new delegates are chosen to replace the old ones, the convention votes to scrap the constitution that was about to be approved, and comes up with another one instead.’’

    ’’1791 : Annoyed at the way the new federal government under John Adams is shaping up, Vermont refuses to join the Union, declaring itself an independent republic instead.’’

  • Le 25 août 2007 à 09:07, par Calvinus En réponse à : Les Etats-Unis d’Amérique : un modèle ?

    Merci, Ronan, de cette utile mise au point. Les réserves de Pierre-Michel sont un condensé des stéréotypes qui nous empêchent de comprendre les Etats-Unis. Le fédéralisme est, partout, équilibre entre le tout et ses parties. Là où le tout et ses parties sont des entités vivantes, l’équilibre varie. Le fédéralisme est gérant d’harmonie et de paix entre les parties.

  • Le 25 août 2007 à 14:34, par Valéry-Xavier Lentz En réponse à : Les Etats-Unis d’Amérique : un modèle ?

    Je me dois d’abonder dans le sens de Ronan. Il ne faut pas sous-estimer les difficultés rencontrées : lors de la création des Etats-Unis, les 13 colonies avaient près d’un siècle d’existence — et des contacts limités par les moyens e communication de l’époque. Cela suffit à ce que chacun se sente déjà une identité particulière, certainement plus forte qu’aujourd’hui. La preuve en est que l’Union ne s’est pas constituée facilement. Les représentants des différents Etats étaient souvent jaloux de leurs prérogatives et c’est uniquement par la nécessité de se réunir contre un ennemi commun qu’est née la Confédération.

    C’est précisément parce que les Etats refusaient se s’unifier sur le mode des grands royaumes européens en un Etat unitaire qu’il a fallu inventer une nouvelle forme d’organisation. Le fédéralisme américain - et donc le fédéralisme tout court - est né d’un compromis entre des intérêts divergents. Il a fallu construire une solution institutionnelle ad hoc et inédite à l’époque pour surmonter les différences. Certaines questions non consensuelles ont été remises à plus tard (notamment l’esclavage) pour ne pas entraver la recherche d’une solution institutionnelle.

    Il faut aussi ne pas se tromper sur la « nation » française : l’idée de nation date du 18e et s’est concrétisée en son sens moderne d’Etat-nation au 19e. Il s’agissait à la Révolution de définir un concept susceptible de légitimer l’existence d’un Etat en l’absence d’un souverain. On a donc substitué une notion abstraite à une personne physique. Si le Royaume de France a en effet plusieurs siècles d’histoire, la nation française a au mieux deux siècles, sachant que le pays n’a des frontières stables - à quelques exceptions près - que depuis 1919 et que son unification linguistique ne s’est achevée qu’après la première guerre mondiale. La moitié des pays Européens n’existent - dans leur frontières actuelles que depuis le 20e siècle.

    Quant à la langue, débat récurrent sur ce site, elle ne constitue pas une condition nécessaire à la constitution d’une entité politique, sauf à vouloir justement construire une nouvelle nation ce que personne ne veux en ce qui concerne l’Europe. Le multilinguisme constitue une difficulté mais qui peut être surmontée. Un très grands nombres de pays et d’organisations internationales fonctionnent très bien avec plusieurs langues officielles.

    A partir de là il faut bien sur relativiser l’exemple américain. La première constitution fédérale représente plus un prototype qu’un modèle de série si tant est que cela puisse exister matière de fédéralisme.

  • Le 26 août 2007 à 16:23, par Fabien Cazenave En réponse à : Les Etats-Unis d’Amérique : un modèle ?

    Bravo pour cet article. J’ajouterai que le modèle fédéral allemand convient mieux à l’Europe dans la mesure où il assure, par le Bundesrat, une participation des entités fédérées au gouvernement de la fédération. De même la fision des Présidences du Conseil européen et de la Commission donnerait un visage à l’Union et serait un progrès démocratique si ce président unique était désigné par accord entre les Etats (Conseil européen) et les citoyens (Parlement) qui sont les deux sources de légitimité de l’Union. Voir pour plus de précisions mon livre Aimer l’Europe.

  • Le 26 octobre 2007 à 21:33, par Ronan En réponse à : Disunited States of America

    A lire dans le « Courrier International » de ce jour (n°886 du 25 octobre 2007, page 22) l’article suivant : « Le Vermont veut faire sécession ».

    Où l’on découvre, par la même occasion, qu’il existe donc plusieurs mouvements ’’séparatistes’’ aux Etats-Unis : au Vermont (i.e : en Nouvelle Angleterre), dans le ’’Deep South’’ (ancien Dixieland sudiste) mais également en Alaska, à Hawaii, au Texas, en Californie voire à... New York. Soit une pierre dans le jardin de tous ceux qui croient que les USA sont un ’’monobloc’’ sans identités locales fortes ni individualités régionales.

    Pourtant, juste préciser que ces mouvements politiques - dénonçant unanimement une ’’hypertrophie du pouvoir fédéral’’ - sont cependant très loin de recueillir l’assentiment des populations concernées dans leurs démarches séparatistes. (Soit une pierre dans le jardin de tous ceux qui ne voient dans les Etats-Unis qu’un ’’Léviathan’’ centralisateur...).

    Cela dit, il est également rappelé que les séparatistes se heurtent - dans leurs démarches - à un obstacle juridique de taille : un jugement de la Cour suprême des USA datant de 1868, le très fameux et très politique Arrêt « Texas vs White » qui stipule - pour tout Etat de la fédération (et ce, même pour ce Texas qui fut pourtant république indépendante avant d’intégrer l’Union, en 1845...) - que les Etats-Unis d’Amérique sont une ’’Union indestructible, composée d’Etats indestructibles’’ (fermez le ban...).

  • Le 31 juillet 2012 à 09:47, par Julien-223 En réponse à : Les Etats-Unis d’Amérique : un modèle ?

    5 ans après, encore bravo pour cet article.

    Un mot retient mon attention : « contestataire ». Le succès des fédéralistes américains ne vient-il pas aussi delà ? du fait qu’ils soient apparus comme contestataires, là où les fédéralistes européennes passent trop souvent et parfois contre leur gré pour des partisans du mainstream ?

  • Le 31 juillet 2012 à 14:02, par Luc L. En réponse à : Les Etats-Unis d’Amérique : un modèle ?

    5 ans après, l’Europe est en pleine crise des dettes, comme l’étaient les USA au moment de leur transformation de confédération en fédération, ce que oublie de dire cet article (par ailleurs très juste et très intéressant) et qui est la raison principale, l’élément déclencheur de cette transformation. Tout comme l’Europe actuelle. 5 ans après, un parti véritablement européen existe (ndlr le Parti Fédéraliste Européen) et s’organise pour mener à bien enfin le projet des « gentils » fédéralistes qui sont en train de devenir plus virulents face à l’urgence de la situation, l’immobilisme des Etats, la montée des nationalismes, de la Chine etc.

    La constitution fédérale européenne devra s’inspirer de la constitution américaine de part les similitudes historiques et de taille mais aussi de celles de la Suisse, de l’Allemagne voire du Canada etc. L’idée est de prendre le meilleur de chaque et de créer notre propre modèle. Même si pour ma part, elle devrait largement s’inspirer de celle des USA, modes de scrutin électoraux mis à part par exemple.

  • Le 3 août 2012 à 23:50, par Un Citoyen En réponse à : Les Etats-Unis d’Amérique : un modèle ?

    La comparaison avec les Etats-Unis paraît séduisante pour suggérer l’émergence d’une modèle similaire au niveau européen. Mais la réalité est en fait toute autre.

    Le début de l’histoire des Etats-Unis est constitué de 13 colonies très homogènes du point de vue des structures familiales et linguistiques, et dont les habitants proviennent en très grande majorité de Grande Bretagne et d’Allemagne. On a donc à faire à des protestants, blancs, industrieux et capitalistes, avec une composante autoritaire forte. Et ce groupe de départ, les WASP, deviendra la structure dominante de l’histoire américaine, les autres peuples venant s’ajouter plus tardivement dans un pays ayant déjà établi des structures anthropologiques et culturelles propres.

    La situation en Europe est bien différente. L’histoire du Vieux Continent est très ancienne. Les langues, les moeurs, les mentalités sont différentes. Les structures familiales et économiques globalement opposées. Essayer de construire un pays à partir de ça serait donc assurément voué à l’échec.

  • Le 15 novembre 2012 à 18:49, par Valéry En réponse à : Les Etats-Unis d’Amérique : un modèle ?

    @Un Citoyen : le commentaire #1 formulait les mêmes réserves et j’y ai longuement répondu dans le commentaire #5.

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