La Convention fait l’impasse en 2002
"Le message de base est que, en vue de maintenir la confiance, il devrait y avoir aussi peu de changement que possible au système de l’Union économique et monétaire" (septembre 2002)
Tel fut le « message » délivré par le Président du puissant Comité économique et monétaire (Comité écofin) - M. Äkerholm - regroupant les hauts fonctionnaires des Ministères des Finances - lors de son audition par le Groupe de travail de la Convention européenne de 2002 sur la gouvernance économique et monétaire.
"La politique économique - tout en étant considérée d’intérêt communautaire - est une compétence nationale - et la politique monétaire est une compétence exclusive de la Communauté qui l’exerce par l’intermédiaire de la BCE : le groupe de travail confirme cet arrangement (...) Les tâches, le mandat et le statut de la BCE devraient demeurer les mêmes et ne pas être modifiés par une nouvelle disposition du Traité" (octobre 2002)
Telles furent les conclusions du Groupe de travail, présidé par Klaus Hänsch (ancien Président du PE) et comprenant notamment MM. Barnier et Moscovici et Mme Béres.
Et telles furent les conclusions de la Convention elle-même qui devait laisser pratiquement inchangées les principales dispositions du Traité de Maastricht sur l’union économique et monétaire.
On saisit l’essentiel en quelques mots : les Gouvernements et les Institutions (Conseil, Commission et BCE) de l’époque étaient fortement opposés à ce que la Convention « touche » au domaine de l’UEM en général et de la BCE en particulier. Il s’agissait d’une sorte de domaine réservé, trop sérieux et trop fragile pour être remis en question par la Convention. Celle-ci devait malheureusement accepter ce postulat et ne pas remettre en cause « l’arrangement » selon lequel la politique monétaire devient une compétence communautaire mais la politique économique reste une compétence nationale.
Ainsi fut manquée une occasion unique - car sur bien d’autres points la Convention fut très novatrice - de corriger le vice de forme originel du système constitutionnel établi par Maastricht : le déséquilibre entre une union monétaire de type fédéral et une union économique de nature intergouvernementale.
Les Gouvernements reportent à nouveau en 2009
Moins de 10 ans après la pleine entrée en vigueur de ce système en 1999, cette asymétrie mettait en péril l’ensemble de l’édifice à l’occasion de la crise financière mondiale.
Cependant, au lieu d’introduire rapidement le « chainon manquant » par voie d’une révision complémentaire des Traités dès 2009, les Gouvernements tentèrent de colmater la brèche par des mesures limitées et de circonstance, prises dans l’urgence et sous la pression des « marchés » (c’est à dire de la vie économique réelle). Toute allusion à une révision éventuelle était doctement saluée ...et renvoyée au long terme en arguant de la longueur de cette procédure !
À noter que si cette révision avait été lancée dès 2009, elle serait probablement en vigueur aujourd’hui..
Au lieu de cela, on est à présent arrivé à la situation de blocage et d’impasse que l’on connait : le refus de « changer le système » biaisé de Maastricht afin de « maintenir la confiance » (dixit le Comité ecofin) a en fait abouti à sa destruction.
Dernière chance en 2014
Depuis quelques semaines cependant, des allusions de plus en plus précises à une révision des règles de base de l’UEM se font jour ; certaines font même référence à la nécessité non seulement de modifier ces mécanismes mais de renforcer l’ « Union politique » c’est à dire l’ensemble du système institutionnel européen. On devrait savoir, dans les jours qui viennent, si une initiative sérieuse de réforme se dessine vraiment.
Il est clair toutefois que la dégradation, tant du contexte économique et financier que de la confiance de l’opinion publique envers les dirigeants européens, ne facilitera pas la conduite de cette réforme. Il s’agit pourtant probablement - après trop d’atermoiements - de l’ultime opportunité pour l’UE de redresser la barre : si la réforme n’intervient pas dans le cadre des élections européennes de 2014, elle risque fort d’arriver trop tard.
Le docte et constant renvoi au « long terme » d’une décision politique incontournable aura effectivement « tué » l’Union - ou au moins sérieusement handicapé, pour ce même long terme, son processus d’intégration économique et politique.
1. Le 17 septembre 2012 à 14:51, par Kevin Perrottet En réponse à : Les « longtermistes » vont tuer l’union !
hum... drapeau à l’envers :p
2. Le 17 septembre 2012 à 19:02, par Valéry-Xavier Lentz En réponse à : Les « longtermistes » vont tuer l’union !
Un point de vue qui ne fait pas l’unanimité dans notre camp :
http://www.trop-libre.fr/question-ouverte/sylvie-goulard-%C2%AB-la-legitimation-des-decisions-est-%E2%80%98la%E2%80%99-question-du-moment-en-matiere-europeenne-%C2%BB
3. Le 18 septembre 2012 à 00:25, par Loinvoyant En réponse à : Les « longtermistes » vont tuer l’union !
En effet, à mon sens, cet article, sans être fondamentalement faux, confond la prise de décisions, aux formidables conséquences sur le long terme, par des gens qui ne se préoccupe que du cour terme avec les gens se préoccuppant réellement du temps long. C’est plutôt un problème de sémantique : ces longtermistes ne sont en réalité que des courtermistes utilisant l’excuse du long terme pour ne rien faire.
Enfin... c’est comme cela que je l’ai compris.
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