Que sont les critères de Copenhague ?
Les critères de Copenhague sont les critères qui conditionnent l’adhésion des Etats à l’Union européenne. Ayant été énoncés à l’issue du Conseil européen de Copenhague en 1993, nous pouvons les considérer au nombre de trois :
- « le critère politique : la présence d’institutions stables garantissant la démocratie, l’État de droit, les droits de l’homme, le respect des minorités et leur protection ;
- le critère économique : l’existence d’une économie de marché viable et la capacité à faire face aux forces du marché et à la pression concurrentielle à l’intérieur de l’Union ;
- le critère de l’acquis communautaire : l’aptitude à assumer les obligations découlant de l’adhésion, et notamment à souscrire aux objectifs de l’Union politique, économique et monétaire. »
Ce qui peut étonner, c’est qu’il n’existe pas dans ces critères la moindre référence à un standard social. Cela pose la question de l’existence du modèle social européen.
Existe-t-il un modèle social européen ?
Parler d’un modèle social européen est compliqué. Il est plus confortable de parler de différents modèles sociaux nationaux qui sont la conséquence d’un certain idéal social européen.
Le fondement de la protection sociale ainsi que sa légitimité résident dans l’impérieuse nécessité de garder une cohésion sociale et de contenir les inégalités consubstantielles à la liberté dans les limites de l’acceptable. Dans nos sociétés où l’économie de marché est considérée comme un corollaire de la liberté individuelle, la protection sociale est donc le tempérament qui permet de protéger les plus fragiles, garantissant ainsi l’intégrité du contrat social. Ainsi une telle protection est permise grâce à une architecture institutionnelle et juridique permettant une certaine redistribution des richesses opérée le droit fiscal et le droit social, tous deux supposés être au service de la justice sociale.
C’est ce modèle architectural qui constitue le modèle social d’un Etat. En Europe, les modèles respectifs sont le fruit d’une construction propre à chaque culture, ce qui exclut (du moins pour l’instant) l’existence d’un modèle social européen au profit de modèles sociaux nationaux.
L’existence d’un critère social universel est-elle par conséquent impossible ? Non, elle n’est pas impossible. En effet on a précédemment annoncé que les fondements du droit social et du droit fiscal résident dans la nécessité de contenir les inégalités. Or plusieurs mesures existent pour déterminer les inégalités. Sans nécessairement exclure tous les indicateurs, il conviendra en l’espèce de privilégier l’exemple du coefficient de Gini. Celui-ci sert à mesurer les inégalités de revenus et donc le degré de redistribution dans une société. Pris de 0 à 100, on a 0 pour une société ou tout le monde a le même revenu et 100 pour l’autre cas extrême d’un maitre et de ses esclaves. [1]
Si l’on regarde ce coefficient dans l’Union européenne (3), on constate que l’Europe est l’une des régions où les richesses sont le plus redistribués. Ce constat n’est cependant pas suffisant pour se satisfaire de nos politiques sociales respectives. Avec de très fortes différences dans la gestion des inégalités, (exemple de la différence entre les pays nordiques et les autres..) ; avec des tendances à l’accroissement des inégalités dans les pays les plus inégalitaires là où les pays les plus égalitaires arrivent à protéger leurs modèles sociaux en dépit de la conjoncture ; force est de constater que les considérations de justice sociale sont au mieux secondaires dans l’exécution des politiques communautaires, et cela en dépit du fait que les Etats-nations européens sont ceux qui, en moyenne, dépensent le plus pour la protection sociale dans le monde.
Ainsi il incombe aux décideurs européens de renouer avec un des éléments clefs de l’identité européenne en affirmant avec force leurs objectifs de défendre l’Etat providence et leurs modèles sociaux respectifs. En ajoutant par exemple la nécessité de respecter un « intervalle coefficient de gini » [2] dans les critères de Copenhague ou mieux encore dans les actes constitutifs de l’Union, nous conférerions à la notion d’Europe sociale une autorité matériellement constitutionnelle encadrant les pouvoirs législatifs et exécutifs qui seraient soumis à des objectifs de réduction ou de maintien d’un certain niveau d’inégalité. Nul doute que cette innovation politique favoriserait un rapprochement entre l’Europe et les peuples, rapprochement sine qua non à la relance de la construction européenne.
Vos commentaires
1. Le 22 mai 2013 à 14:21, par Scripta manent
En réponse à : Pour l’ajout d’une clause sociale aux critères de Copenhague et aux actes constitutifs de l’UE
Dans la terminologie de l’Union européenne et de ses traités actuels, l’expression « économie sociale de marché » résume bien la situation : le social y est coincé, à l’étroit et à l’ombre, entre l’économie et le marché. Vous dites très justement que « la protection sociale est le tempérament qui permet de protéger les plus fragiles. » Au-delà de ce « programme minimal », l’ambition devrait être, non seulement de « défendre » les plus fragiles, mais de construire un modèle de société non soumis au « fondamentalisme marchand » (selon l’expression de Joseph Stiglitz). Souhaitons que ce débat ne soit pas escamoté pour les prochaines élections européennes ! http://www.citoyensunisdeurope.eu/notes-du-portail-f69/la-course-a-la-competitivite-ou-panurge-au-pouvoir-merkel-austerite-protectionnisme-libre-echange-mondialisation-pascal-lamy-omc-world-policy-conference-t425.html
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