Le fédéralisme est le modèle politique dont le philosophe Emmanuel Kant attendait la paix entre les Etats par l’instauration universelle du Droit.
En effet, le Pacifisme ne suffit pas. Le Pacifisme des Etats, celui des partis politiques ou des idéologies (dans le cadre des internationalismes) ou celui de la conscience individuelle ne suffisent pas. Car effectivement il(s) n’apporte(nt) pas la paix.
Ainsi, d’après Kant, il est bien clair que cette Paix tant désirée ne peut être que la résultante de l’avènement d’un Droit international (effectivement contraignant) par la mise en place d’une (universelle) ’’République d’Etats’’.
De la nécessité de l’ONU, République des Etats
En effet, la paix n’existe qu’à partir du moment où une organisation a le pouvoir d’empêcher les hommes (isolés ou en groupe), de recourir à la violence pour régler leurs différents. Et de les contraindre à régler ces différents par des moyens juridiques, par l’arbitrage des tribunaux et dans le respect dû aux règles du droit. C’est pourquoi, il faut que soit mise en place une République d’Etats, qui s’incarne aujourd’hui dans l’actuelle ONU.
C’est dans cette perpective ’’kantienne’’ - pacifiste et universaliste - que les fédéralistes ont maintenu leur soutien à l’ONU (dont on a célébré en septembre 2005 le soixantième anniversaire) en tant que ’’seule et meilleure institution globale’’.
Des Nations unies dont ils estiment qu’elles doivent jouer un plus grand rôle en ce qui concerne les questions de sécurité internationale et dans l’application des règles de la loi internationale. Mais dont les fédéralistes pensent néanmoins aussi - compte tenu des insuffisances et du manque d’efficacité du système en l’état actuel - qu’une réforme est cependant nécessaire : une réforme institutionnelle allant dans le sens de la recherche d’une plus grande efficacité et d’une démocratisation des Nations Unies.
Pour une réforme du Conseil de sécurité
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Parmi les actuels projets de réforme institutionnelle des Nations unies portés par les fédéralistes il y a, notamment, le projet d’une Réforme du Conseil de sécurité des Nations unies, organe permanent de direction de l’ONU.
Rappelons que le Conseil de sécurité des Nations unies compte aujourd’hui quinze membres dont dix d’entre eux sont désignés par l’Assemblée générale des Nations unies pour un an [2] et dont les cinq autres - qui ne sont rien d’autre que les cinq grands ’’vainqueurs’’ de la seconde guerre mondiale - sont des membres permanents inamovibles (Chine, Etats-Unis, France, Royaume-Uni, anciennement l’URSS et aujourd’hui la Russie).
A la lecture de la composition du Conseil de sécurité des Nations unies on comprend fort bien que l’actuelle composition - arbitraire - de cet organe des Nations unies ne correspond nullement à l’actuelle situation internationale.
Où l’on s’étonne de ne pas y retrouver de manière permanente de grandes puissances émergeantes comme l’Inde ou le Japon, le Brésil ou l’Argentine (etc) ou de grandes puissances régionales comme le Nigeria et l’Afrique du sud, l’Egypte et l’Iran, l’Allemagne et l’Italie. D’où la nécessité d’une réforme de ce Conseil de sécurité...
A ce titre, les fédéralistes soulignent donc la nécessité d’adapter la composition du Conseil de sécurité aux changements survenus dans le système international depuis la fin de la guerre froide et - plus encore - depuis la fin de la seconde guerre mondiale. D’où la nécessité que soit réformé le Conseil de sécurité des Nations unies de manière à ce que toutes les régions du monde y soient désormais équitablement représentées, prémices à une possible réorganisation des Nations Unies sur la base de regroupements régionaux d’Etats
De la nécessité d’un siège unique pour l’U.E au Conseil de sécurité
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Dans cette perspective, les fédéralistes européens se sont prononcés pour que l’Union européenne dispose d’un siège permanent au Conseil de sécurité : siège unique qui remplacerait alors les sièges accordés jusqu’à présent aux Etats européens membres du Conseil de sécurité (France, Royaume-Uni et membres annuels [4]).
Et ceci, en conformité avec le projet de Constitution européenne qui prévoit (Cf. TCE : Article III 206 § 2) l’organisation d’une représentation unique de l’UE dans les organisations internationales. Un siège de membre permanent au Conseil de sécurité qui serait alors légitimement occupé par le MAE européen (ou son représentant désigné) qui y représenterai(en)t l’UE au Conseil de sécurité des Nations unies.
Et les fédéralistes de souligner que cette première décision rendrait possible l’évolution progressive du Conseil de sécurité des Nations unies vers une structure plus représentative où toutes les régions du monde y seraient désormais équitablement représentées, premiers pas vers une possible réorganisation des Nations Unies sur la base de regroupements régionaux d’Etats [5].
Pour l’établissement d’une Assemblée parlementaire de l’ONU
[6]
Par ailleurs, afin de combler le déficit démocratique des Nations unies et d’en faire - à terme - un véritable ’’Parlement des Hommes’’, les fédéralistes européens et le Parlement européen [7] se sont aussi prononcé pour l’établissement d’une Assemblée parlementaire des Nations unies (tout d’abord consultative, par la suite décisionnaire dans les domaines de compétences qui lui seraient reconnus...). Ceci ayant pour objectif non seulement de combler le déficit démocratique des Nations unies mais aussi d’associer la société civile mondiale à son fonctionnement.
Techniquement, cette Assemblée parlementaire des Nations unies - ce Parlement des hommes - pourrait être constitué (en conformité avec l’article 22 de la Charte des Nations unies) par une majorité simple de l’Assemblée générale des Nations Unies.
On suppose qu’afin de faciliter les débats, le nombre des parlementaires devrait rester inférieur à un millier de délégués. Chaque pays devrait avoir un minimum de deux parlementaires et se trouver représenté en fonction de sa population (jusqu’à une vingtaine de députés pour les plus grands pays : Inde, Chine, etc.). Enfin, il a été établi qu’une somme de 100 à 120 millions de dollars suffirait pour rendre possible le fonctionnement d’une telle assemblée (i. e : mise en oeuvre de sessions plénières, de réunions de comités et d’un secrétariat général).
Quel prochain Secrétaire général ?
En dehors de ces questions de réformes institutionnelles, il se pose aujourd’hui une autre question plus immédiate... mais dont la réponse qui lui sera apportée n’en n’orientera pas moins toute la réflexion quant à l’évolution future des Nations unies.
En décembre prochain, ce sera la fin du second et dernier mandat de Kofi Annan en tant que Secrétaire général des Nations unies. Et qui va lui succéder ? Normalement, suivant le principe de rotation continentale établi jusque là [8], ce devrait être un asiatique... Mais aujourd’hui rien n’est moins sûr et cela pourrait fort bien être un Européen... [9].
En tout cas, début juillet dernier, anticipant un début de réponse, M. Jean-Dominique Giuliani (Président de la fondation Robert Schuman) dressait un portrait robot du candidat idéal. [10]
En l’occurrence : une femme issue d’une de ces nouvelles démocraties européennes issues de l’Europe centrale post-communiste ayant récemment renoué avec la démocratie. Soulignant qu’il s’agirait là d’une signe fort et d’un message à portée universelle. Et ce, non seulement pour la condition féminine, mais aussi pour la promotion des valeurs européennes sur la scène internationale.
Et M. Giuliani d’avancer un nom correspondant à ce portrait robot, celui de Mme Vaira Vike-Freiberga, actuelle présidente de la Lettonie : intellectuelle francophone et chef d’Etat exemplaire, personnalité éminente capable de hauteur de vue et de courage politique...
Lequel nouveau Secrétaire général (européen) des Nations unies [11] se verrait alors confier la lourde mais nécessaire mission de porter de par le monde le discours et le modèle européens : Un modèle unique, envié et observé avec admiration, celui de ce « continent des guerres » qui a rejeté durablement l’affrontement par l’établissement de l’Etat de Droit et le dépassement des souverainetés.
En tout cas voilà effectivement des projets de réformes très intéressants. Mais il semblerait que les promoteurs de telles réformes oublient de parler de ce qui pourrait être la réforme essentielle des Nations unies, à savoir : la suppression du droit de veto des grandes puissances.
Un droit de veto dont l’existence protège les intérêts égoïstes des prétendus ’’grandes puissances’’ (ou, par l’intermédaire de celles-ci, de leurs ’’alliés’’ privilégiés...). Un droit de veto dont l’existence même décrédibilise l’ONU et génère un climat d’injustice à l’échelle mondiale.
Un droit de veto dont l’existence empêche donc l’avènement d’un Droit international véritablement contraignant, rend impossible l’avènement d’une véritable démocratie mondiale et - par voie de conséquence - empêche donc la mise en place de la « République des Etats » idéale envisagée par Emmanuel Kant.
1. Le 13 septembre 2006 à 08:28, par Valéry En réponse à : Pour une Réforme (fédéraliste) de l’ONU
N’oublions pas cvependant qu’une paix durable - intérieure comme internaitonale - n’est possible que par le règne de la démocratie.
Une réforme des Nations Unies est certes souhaitable mais lui conférer des responsabilités véritables sans droit de veto n’est envisageable que sous réserve que les décisionnaires soient tous des gouvernements légitimes c’est à dire issus d’un processus démocratique.
Le fédéralisme étant lui même une forme de démocratie internationale, il est inenvisageable sans que les Etats participants soient eux même des démocraties.
Or aujourd’hui une grande partie des gouvernements représentés à l’Assemblée générale sont issus de régimes autoritaires voire criminels (la Chine, Cuba, la Corée, l’Iran, la Syrie, La Lybie, l’Arabie Sahoudite, etc.).
2. Le 26 septembre 2006 à 15:49, par Ronan Blaise En réponse à : Une Européenne à l’ONU (suite)
Chacun des rédacteurs et contributeurs de ce webzine s’imposant un suivi des dossiers sur lesquels il a déjà écrit, juste apporter quelques informations complémentaires sur ce sujet.
Déjà, juste préciser que M. Kofi Annan terminera bel et bien son deuxième et dernier mandat en tant que Secrétaire général de l’organisation des Nations Unies le 31 décembre prochain. De même, juste confirmer que Mme Vaira Vike-Freiberga (Pdte de la Lettonie) briguera bien sa succession : comme elle l’a effectivement officiellement annoncé le 15 septembre dernier (i. e : une candidature officiellement soutenue par les trois pays baltes : Estonie, Lettonie et Lituanie).
Néanmoins, juste rappeler qu’en l’absence de critères évidents, de règles claires ou de procédures officielles pour désigner un secrétaire général onusien, sa désignation risque d’être compliquée. Les textes officiels de l’ONU spécifiant juste que le Conseil de sécurité doit unanimement proposer un candidat qui doit être approuvé par l’Assemblée générale. Et en pratique, cela signifie donc que les cinq membres permanents du Conseil de sécurité doivent préalablement s’être accordés sur une personnalité.
Or, la tradition prévoit aussi une rotation géographique des secrétaires généraux. Et cette fois, si jamais cette règle (non officielle et non écrite) devait à nouveau être respectée - après l’Europe (avec l’autrichien Kurt Waldheim), l’Amérique du sud (avec le péruvien Javier de Perez de Cuellar), le Monde arabo-musulman (avec l’égyptien Boutros Boutros Ghali) et l’Afrique noire (avec le ghanéen Kofi Annan) - le poste de sec-gal onusien devrait normalement revenir à un Asiatique.
Mais ce choix se heurte aujourd’hui aux ’’revendications’’ des ’’grands’’. Ainsi, si Paris juge cette ’’revendication asiatique’’ légitime, elle n’en n’exige pas moins (exigence supplémentaire loin d’être satisfaite par aucun des six candidats aujourd’hui officiellement déclarés...) que le prétendant doive parler français (et l’on dit que Paris verrait d’un bon oeil la candidature à ce poste d’un diplomate onusien de carrière comme l’indien Shashi Taroor, l’un des actuels adjoints de Kofi Annan).
De même Washington estime que seule la compétence du candidat doit être prise en compte et entend placer à la tête de l’organisation un ’’réformateur’’ qui - si possible - ne provienne pas du sérail onusien (comme Mme Vaira Vike-Freiberga, par exemple). Et l’on se souvient qu’en 1996 le choix de Kofi Annan comme secrétaire gal de l’ONU avait déjà donné lieu à un bras de fer entre la France et les Etats-Unis : les Américains réussissant finalement à imposer leur candidat in extremis au tout dernier moment, dix jours à peine avant le début officiel même de son mandat.
En tout cas, soucieux d’éviter une répétition de ce casse-tête, les membres du Conseil de sécurité ont tenté de déminer le terrain depuis plusieurs mois, jusque là sans succès. Ainsi, deux ’’votes à blanc’’ ont déjà été organisés. Mais ils n’ont pas encore permis de dégager de favori qui convienne à tout le monde parmi les six candidatures déjà officiellement déclarées (i.e : le Sud-Coréen Ban Ki-Moon, ministre des Affaires étrangère, l’Indien Shashi Tharoor, sous-secrétaire général de l’ONU chargé des relations publiques, le Thaïlandais, Surakiart Sathirathai, vice Premier ministre, le Jordanien, Zeid al-Hussein, ambassadeur de son pays auprès de l’ONU et le Sri Lankais Jayantha Dhanapala, ancien sous-secrétaire général chargé du Désarmement). Du coup, France et Etats-Unis semblent être tombés d’accord pour solliciter de nouvelles candidatures. Et ce, selon un principe simple : « Plus il y a de candidats, plus il y a de chance de trouver parmi eux la perle rare ».
En tout cas on voudra bien admettre qu’il est fort regrettable que les Européens ne soient aujourd’hui décidément pas capables de s’unir comme un seul homme derrière la seule candidature européenne (et féminine) aujourd’hui déclarée (et ce, que le candidat en question parle la langue de Molière ou pas...).
3. Le 3 février 2007 à 12:25, par Ronan En réponse à : Pour une Réforme (fédéraliste) de l’ONU
Les mois ont passé. Et (comme en témoignent de nombreuses brèves publiées sur ce webzine...) c’est finalement le sud-coréen Ban-Ki Moon qui a été élu - en décembre dernier - comme secrétaire-général des Nations unies (en remplacement du ghanéen Kofi Annan, sec-gal sortant).
Toujours est-il qu’en ce début février 2006, suite à la conférence internationale tenue cette dernière semaine à Paris sur les questions environnementales, il est désormais très clairement évoqué la nécessité urgente de créer une ONU-environnementale (ONU-E) pour surveiller scientifiquement l’évolution des processus du changement climatique actuellement en cours( et pour gérer politiquement les conséquences de l’actuel réchauffement climatique...).
Et pour remplacer l’actuel « Programme des Nations unies pour l’environnement » (PNUE), créé en 1978 : dont le budget est alimenté par des contributions volontaires des Etats mais ne disposant pas actuellement d’un pouvoir et d’un poids institutionnel suffisant. Bref, il s’agit désormais de passer à la vitesse supérieure et de créer une « agence » des Nations unies ’’ad hoc’’ qui aurait des missions claires, un budget ad hoc et des ’’prérogatives’’ bien supérieures à celles d’un seul modeste « programme ».
Une question ne pouvant être gérée autrement qu’au niveau mondial, un problème très urgent et - ni plus ni moins - une question de (sur)vie ou de mort (sinon pour l’humanité toute entière, tout du moins pour bon nombre de ses humbles représentants...).
4. Le 12 juillet 2007 à 13:55, par Ronan En réponse à : Pour une Réforme (fédéraliste) de l’ONU
« ONU : A quoi sert donc ’’le machin’’ ? » :
Un article de l’historien britannique Tony Judt (in « The New York Review of Books ») à lire (extraits) dans le « Courrier International » n°871 du 12 juillet 2007 (pages 27-28-29-30).
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