Crise libanaise

Ramener la paix au Moyen-Orient

Réflexions sur le rôle de l’Europe dans le conflit israélo-palestinien

, par Traduit par Benjamin Anoufa, Alexander Hoefmans

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Ramener la paix au Moyen-Orient

Nous avons de nouveau tremblé aux vues des images terrifiantes qui nous parviennent du Moyen-Orient et qui sont retransmises dans le monde entier. Une honteuse entaille de plus à ajouter sur le tableau de guerre. Suite aux tirs de rockets du Hezbollah sur les villes du nord d’Israël, Tsahal a déchaîné les enfers sur l’Etat libanais, à moins que... Il est certain qu’aujourd’hui, la perception d’un conflit joue un rôle d’une importance cruciale. Et ce même si certains affirment qu’analyser l’historicité du conflit ne servirait en rien à l’élaboration de solutions, je veux bien parier le contraire.

Il est étrange de penser que la technologie nous offre la possibilité de témoigner de telles atrocités. On s’attendrait à ce que ce témoignage télévisuel permette de donner à la guerre un nom bestial, qu’il mène à une prise de conscience de l’opinion, renforçant ainsi la pression publique sur les dirigeants du monde. Mais si cela fut le cas durant la guerre de Vietnam, cette théorie a malheureusement montré ses limites lors du conflit israélo-palestinien, une guerre historiquement cultivée, exploitée et souvent en parti ignorée.

L’éminent intellectuel palestinien, feu Edward W. Dit n’a eu de cesse de décrier la déformation qu’a subi la représentation de la cause palestinienne. Fulminant contre, d’une part, ce qu’il a appelé la ’’fusion entre le libéralisme occidental et la représentation sioniste de la crise’’ et, d’autre part, ce qu’il définissait comme la promotion à deux vitesses des droits de l’homme par les Etats occidentaux.

Néanmoins en abordant la question du point de vue israélien, il est tout aussi difficile d’ignorer le raisonnement qui a conduit le gouvernement israélien, son armée et la société israélienne en général, à la constitution d’un Etat Juif et aux politiques conséquentes qui ont depuis lors été mené, comme l’a décrit Ahron Bregman dans « Israeli’s Wars », un ouvrage dont le titre explicite le sens.

N’importe quel expert en « conflict-resolution » vous dira qu’un processus de paix n’est viable qu’aux travers d’une analyse dynamique et complète du conflit. Ceci inclut les faits et les figures historiques, la connaissance des outils en « peace-building » ainsi que l’implication de tous les acteurs du conflit. En effet, toutes propositions faites pour résoudre un conflit doivent être perçues comme juste par les parties impliquées. Et ce qui est politiquement acceptable ne sera validé que par le long terme, c’est à dire par l’Histoire.

L’histoire et la perception que l’on en a, sont non seulement, dans les modèles de « conflict-resolution », le fait des parties directement concernées, mais aussi et souvent celui des acteurs périphériques. L’Europe et les Etats-Unis, nous viennent ainsi, tout de suite à l’esprit quand l’on parle du conflit israélo-palestinien, et même si cela semble injuste vis-à-vis des pays arabes voisins.

La politique européenne au Moyen-Orient pourrait être le test révélateur d’une politique étrangère commune.

La politique européenne au Moyen-Orient pourrait être le test révélateur d’une politique étrangère commune (menant vers une possible politique étrangère européenne unifiée ?). En effet, la crise au Moyen-Orient est l’une des plus complexes que les politiques étrangères doivent affronter, tant de manière générale que pour l’Union européenne en tout particulier. La division entre les Etats Membres, les contraintes sur l’alliance transatlantique, la proliférations des armes nucléaires, le terrorisme, la sécurité d’approvisionnement énergétique, sans parler de la dimension humaine des relations entre l’Occident et les sociétés du Moyen-Orient, sont les questions qui font que pacifier le Moyen-Orient n’est clairement pas une promenade de santé.

Et c’est là où les besoins sont les plus grands, que l’Europe échoue le plus. Historiquement, l’Europe est le plus engagé de tous les médiateurs périphériques présents dans le conflit (les Etats-Unis ont seulement commencé à s’aligner sur la position d’Israël qu’à partir des années 60). L’Europe est très sollicité dans le conflit et donc un médiateur d’une aide précieuse pour conclure un accord entre les belligérants. Assurément l’Europe est plus présente dans les coulisses de la diplomatie que la plupart d’entre nous ne le présument. Même l’ancien commissaire européen aux relations extérieures, Chris Patten, a dû admettre dans son récent de livre « Not Quite the Diplomat » que la politique européenne n’a pas encore atteint sa taille critique, la décrivant comme « un rejet comme pavlovien de toute ligne de conduite pouvant nous mettre à l’écart des Américains ».

Cette théorie a tristement été démontrée une fois de plus, suite aux embarrassantes conclusions de la conférence de Rome sur l’escalade de la violence au Liban, en Israël et en Palestine. L’Europe n’aurait elle simplement pas encore pris conscience de tout le potentiel pouvant résider dans sa politique étrangère ?

(Document traduit par Benjamin Anoufa, Médiateur des « Jeunes Européens France »).

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Vos commentaires
  • Le 3 août 2006 à 18:10, par Valéry En réponse à : Ramener la paix au Moyen-Orient

    Franchement je ne vois pas très bien ce que l’Europe a à gagner à se mêler de ces affaires là.

    Par ailleurs l’article fait l’amalgame entre la question palestinienne où le conflit a des sources véritables, c’est à dire la situation difficile des palestiniens et la nécessité de trouver une solution viable pour une cohabitation entre les deux peuples, et la question du terrorisme pro-iranien du Hzebollah alors que Israël n’a pas de conflit territorial ni avec le Liban ni avec l’Iran. Les deux question ne sont liées que dans l’esprit malade des terroristes islamistes ou du président iranien mais concrétement ça n’a rien à voir et les solutions sont donc de nature fondamentalement différentes

  • Le 12 août 2006 à 12:00, par Ronan Blaise En réponse à : Ramener la paix au Moyen-Orient

    Ce que l’Europe pourrait gagner à se mêler d’un tel conflit, ce serait apparaître comme un acteur pacifique et médiateur entre les différentes parties : assez neutre pour inspirer la confiance de tous, assez impliquée financièrement dans la région pour obtenir le respect de tous et assez influente pour les obliger à tous s’asseoir à la table des négociations.

    Et pour l’instant, force est de constater que c’est raté : précisément parce que l’Europe actuelle (avec ses gouvernants actuels, avec ses institutions actuelles et avec ses budgets actuels) n’inspire pas la confiance nécessaire aux parties prenantes au conflit, lesquelles ne jugent pas l’aide européenne suffisamment importante pour accorder autant de crédit que ça à la parole de l’UE, laquelle UE n’a actuellement ni la force coercitive (financière ou autre) ni le rayonnement, ni l’influence morale nécessaire dans la région pour traîner tous les protagonistes du conflit à quelque éventuelle conférence de la paix régionale.

    Bref : construire une Europe politique avec des moyens diplomatiques, militaires et financiers véritables pourrait se révéler plus efficace que l’actuelle impuissance à peser sur le cours des choses. (A voir...).

    Pour le reste, c’est là un problème plus compliqué. Peut-on vraiment affirmer ainsi que les questions proche-orientales ne soient pas toutes plus ou moins liées entre elles ? N’importe quel observateur (impliqué ou pas dans les conflits de l’Orient, peu importe...) pourrait pourtant dire que les rancoeurs accumulées dans tel secteur de cette région du monde servent de prétextes à la perpétuation d’autres rancoeurs dans tel autre secteur de la région, lesquelles servent également de prétextes à la perpétuation d’autres rancoeurs dans un autre secteur de la région (etc) (on n’en sort pas...).

    Et si tous ces problèmes (et toutes ces ’’liaisons dangereuses’’) sont peut-être le fruit d’esprits malades, ils/elles n’en n’existent pas moins. Et il me semble illusoire d’essayer de résoudre l’ensemble de ces problèmes uns par uns. C’est pourquoi je crois qu’un jour, il faudra peut-être essayer de réfléchir à quelque solution globale pour la région et à l’organisation d’une grande conférence de la paix pour le proche orient. Reste à espérer que celle-ci soit organisée avant que n’arrive (et non pas après que n’arrive...) quelque redoutable nouvelle conflagration générale. Laquelle n’arrivera pas selon les ’’optimistes’’ dont je ne suis pas (nb : moi, tout bien pesé sur cette question, je suis plutôt pessimiste... Et seul l’avenir pourra venir nous dire si c’est là un sentiment excessif ou pas...).

    Bref, il s’agirait donc - pour une fois - d’essayer de prévenir plutôt que de toujours guérir. Chose à laquelle cette région du monde n’est guère habituée. D’où l’intérêt (peut-être) que l’Europe puisse y tenir distinctement et d’une seule voix le discours de la raison, et qu’elle y soit effectivement entendue. Enorme programme...

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