Depuis quelques semaines, une nouvelle secoue le milieu du cinéma, celle de l’inclusion des services audiovisuels dans le mandat de la Commission Européenne pour négocier le partenariat transatlantique de commerce et d’investissement, entre l’Union européenne et les États-Unis d’Amérique cet été. Ce mandat sera voté à la majorité qualifiée des Etats membres le 14 juin. Dès lors, le France est vent debout pour défendre l’exception culturelle . Mais si l’on pourrait croire qu’il s’agit encore une fois d’une exception française, Aurélie Filippetti, Ministre de la Culture et de la Communication, l’a rappelé dans un communiqué « La France n’est pas seule ».
En effet, 14 autres ministres européens de la Culture (Allemagne, Autriche, Belgique, Bulgarie, Chypre, Espagne, Grèce, Hongrie, Italie, Pologne, Portugal, Roumanie, Slovénie, Slovaquie) ont cosigné la lettre, d’initiative française, adressée à la Commission européenne ainsi qu’au ministre irlandais dont le pays assure la présidence de l’Union Européenne en ce moment.
A cela s’ajoute une pétition intitulée "L’exception culturelle [1] n’est pas négociable" et signée par plus de 5000 cinéastes européens avec pour chefs de file les frères Dardenne, Pedro Almodovar, Ken Loach ou encore Michael Haneke. Et fait encore plus intéressant, le grand producteur américain Harvey Weinstein (Scream, Le seigneur des anneaux, The Artist) est même venu sur la Croisette défendre le cinéma européen dans toute sa diversité et son originalité.
Quid de la position de la Commission européenne face à cette avalanche de soutiens ?
A son habitude, José-Manuel Barroso a ménagé la chèvre et le chou en déclarant lors d’une conférence commune avec François Hollande le 15 mai dernier "On ne doit pas à notre avis exclure le secteur audiovisuel des négociations avec les Etats-Unis, mais, en même temps, on doit rendre clair que l’exception culturelle n’est pas négociable". Comprend qui voudra … L’inquiétude est donc grande chez les professionnels. D’autant plus que la tendance actuelle montre que les industries de contenus ne sont plus celles qui produisent le plus de valeur ajoutée mais bien celles liées aux supports et dans ce domaine, les entreprises américaines sont les prééminentes (Amazon, Netflix …). La non exclusion des services audiovisuels du mandat de négociation pourrait donc avoir des conséquences dommageables pour les industries créatives de notre continent.
Ce débat appelle à une nécessaire réflexion sur l’état de la culture en Europe, sur sa définition même et sur la place de nos industries culturelles dans le monde. Car si en France et dans 14 autres pays européens, il est important de considérer la culture non pas seulement comme un moyen d’échange commercial mais aussi comme un bien à dimension non marchande créateur de lien social, il reste 12 autres pays tels que le Royaume-Uni ou les Pays-Bas qui ne se sont pas engagés dans cette voie. Or même s’il est vrai que certains commissaires y compris le premier d’entre eux semblent peu enclins à exclure les services audiovisuels de l’accord de libre-échange, rappelons que le 14 juin, ce sont les Etats Membres qui voteront le mandat de négociation.
A quand une politique commune de la Culture ?
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