Année européenne des compétences et marché du travail : quels enjeux pour l’Union ?

, par Louise Gillis

Année européenne des compétences et marché du travail : quels enjeux pour l'Union ?
Réseau de compétences ⓒ Canva

Pour l’Union européenne, à chaque année sa thématique. Après la jeunesse en 2022, la Commission européenne a décidé de consacrer l’année 2023 aux “compétences”. Dévoilé le jour de la fête de l’Europe, célébrée ce mardi 9 mai, le thème des compétences voit le jour dans un contexte de l’emploi en pleine transformation à l’échelle du continent, alors même que l’apprentissage et l’éducation tout au long de la vie font partie du socle des droits sociaux de l’Union européenne. C’est pourquoi celle-ci souhaite, jusqu’au 8 mai 2024, sensibiliser les citoyens aux défis à venir en matière de transition numérique et écologique ; mais également aux solutions qu’elle propose afin de l’accompagner, tout en essayant d’assurer une certaine justice sociale sur un marché du travail encore très hétérogène entre les 27.

L’année européenne des compétences, mise en lumière de l’Agenda européen en la matière

En choisissant d’investir dans les compétences, l’Union européenne veut renforcer l’employabilité et l’expertise de ses ressortissants ainsi que la compétitivité du continent. En d’autres termes, elle entend garantir de bonnes perspectives professionnelles aux citoyens européens, qu’ils soient déjà sur le marché du travail ou non, dans le but de préserver la compétitivité des entreprises basées sur son territoire.

Mais s’il a fallu attendre le 9 mai 2023 pour que les compétences soient mises sur le devant de la scène, la Commission européenne avait déjà élaboré une stratégie en la matière dès 2020. Celle-ci rassemble les objectifs de compétitivité durable, définie par le Pacte vert ; d’équité sociale, défendue par le socle des droits sociaux ; et de résilience du continent, dont l’objectif est de mieux répondre aux crises futures grâce aux leçons tirées de la pandémie de Covid-19.

Pour ce faire, la stratégie européenne des compétences se traduirait alors en 12 actions identifiées sur 5 ans, dans le but d’assurer le perfectionnement des compétences des citoyens ou leur reconversion professionnelle. Quelques exemples parmi celle-ci : le Pacte sur les compétences devrait mobiliser tous les acteurs des secteurs privé et public, le sujet du compte de formation individuel devrait faire l’objet d’une réflexion au niveau européen, et la plateforme Europass modernisée permettra aux citoyens de mieux évaluer leurs compétences et de postuler à des offres d’emploi adaptées.

En somme, la modernisation des compétences et l’accompagnement des Européens passera par un effort commun entre les institutions publiques et les entreprises privées, dont l’issue est supposée être bénéfique à toutes les parties.

Avancer de concert en matière d’emploi et de politique sociale : coordination nécessaire ou illusoire ?

L’Union européenne à 27 présente des caractéristiques très diverses sur le marché du travail, à tel point qu’il paraît difficile de parler d’un unique marché du travail en Europe. Des grands écarts entre les salaires minimums aux différences de politiques sociales, en passant par des taux de chômage très divers ou encore des enjeux démographiques inégaux, l’exercice à réaliser pour qu’un jour le marché du travail soit qualifié de “commun entre les 27 se révèle épineux.

Cependant, bien que l’hétérogénéité des conditions de l’emploi à travers le territoire semble être une problématique compliquée à résoudre, l’ensemble des Etats membres fait face aux mêmes difficultés en termes de transition numérique et écologique. Par conséquent, plutôt que d’adopter une position résignée face aux disparités des réalités sociales au sein des Etats membres, l’Union européenne œuvre depuis les années 2000 à l’harmonisation des marchés du travail avec la volonté d’instaurer des normes équitables pour tous et de créer des emplois qualitatifs en quantité.

Preuve s’il en faut, les trois dernières éditions de l’enquête Continuing Vocational Training Survey (2005, 2010 et 2015) coordonnées par l’agence Eurostat montrent que l’implication des entreprises dans la formation continue de croître. En 2015, 73 % des entreprises des 28 Etats membres de l’Union (comptant le Royaume-Uni avant le Brexit) ont organisé des formations pour au moins un membre de leur personnel, contre seulement 60 % en 2005 (avec 25 Etats membres, avant l’entrée de la Roumanie, de la Bulgarie et de la Croatie).

Néanmoins, bien que les chiffres prouvent que chaque État membre fait des efforts en termes de formation, l’enquête révèle également des disparités persistantes entre l’ouest et l’est de l’Europe, notamment.

Et concrètement, comment ça se passe ?

Au niveau des attributions de l’Union en la matière, la politique économique, sociale et de l’emploi est une compétence partagée de l’Union européenne qui tombe sous le scope de l’action régionale. Par le biais de cette compétence partagée, l’Union européenne s’attache à réduire les disparités économiques et sociales entre ses régions très diverses. En effet, il revient aux régions de mettre en œuvre les financements que l’Union européenne leur verse à des fins de cohésion dans le respect du cadre de coopération établi entre la collectivité territoriale et la Commission européenne.

C’est par cette coopération entre les régions et l’Union européenne que celle-ci souhaite, à horizon 2030, que 60% des adultes européens suivent une formation chaque année, qu’ils soient employés ou en recherche d’emploi. Quant à l’apprentissage et à la formation internationale, la Commission s’est fixée pour objectif une augmentation de 18% des bénéficiaires du programme Erasmus+. En effet, depuis l’élargissement du dispositif phare de l’Union européenne en 2014, les apprentis, professeurs et demandeurs d’emploi, entre autres, peuvent bénéficier d’une mobilité accompagnée par Erasmus+. Une initiative qui gagnerait à être plus largement connue des citoyens !

En termes de financement des différentes initiatives, les fonds alloués à la stratégie des compétences de l’Union seront majoritairement orchestrés via le Fonds social européen plus (FSE+). Ce dernier, défini comme le principal instrument de l’Union européenne pour investir dans le capital humain et géré au plus proche des territoires, bénéficie notamment d’un budget de 99,3 milliards d’euros pour la période 2021 - 2027.

Enfin, le FSE+ a pour vocation d’accompagner la politique de cohésion en soutenant la cohésion économique, territoriale et sociale dans l’Union. C’est-à-dire la réduction des disparités entre les États membres et les régions, et notamment celles concernant l’emploi.

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