La Commission de Venise : kesako ?
De son nom complet, la Commission européenne pour la démocratie par le droit a été créée par un accord élargi du Conseil de l’Europe qui regroupe soixante-et-un États. Sa particularité est que quinze d’entre eux ne sont pas Européens, comme le Canada, la Colombie ou encore le Mexique, mais ont souhaité adhérer à cet accord afin de bénéficier de l’expertise et de l’accompagnement des experts juridiques qui la composent.
Son rôle est de rendre des avis sur différents projets de réforme constitutionnelle en discussion dans les pays membres. L’État peut de lui-même demander un avis à la Commission sur le projet en question ou à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe si l’Etat est membre de plein droit du Conseil de l’Europe. L’objectif est de veiller à ce que les structures juridiques du pays respectent les droits fondamentaux et la prééminence du droit en dépit de l’application du projet de réforme constitutionnelle. Grâce à ses larges bases de données en droit constitutionnel et électoral, la Commission peut efficacement chercher des solutions juridiques par le droit comparé lors de la rédaction de ses avis. La variété des systèmes juridiques avec lesquels la Commission est amenée à travailler constitue sa plus grande force.
Ses membres sont des juristes, juges, enseignants ou politiciens internationaux qui travaillent en lien avec une équipe permanente basée à Strasbourg. Chaque année, la Commission se réunit quatre fois à Venise au sein de la Scuola Grande di San Giovanni Evangelista pour adopter les avis, en présence de tous ses membres.
Ses liens étroits avec la Commission Européenne
La Commission de Venise travaille régulièrement sur des avis concernant des Etats Membres de l’Union Européenne (UE). L’UE n’ayant pas d’organe dédié à l’analyse des constitutions et réformes de ses pays membres, l’expertise de la Commission de Venise devient incontournable.
En réalité, la Commission européenne pour la démocratie par le droit est née du simple constat que la chute de l’Union Soviétique, et avec elle du “Bloc de l’Est”, allait conduire les ex-Républiques socialistes à mener de nombreuses réformes constitutionnelles dans le cadre du processus de lustration (fait d’évincer une partie de la classe politique et des fonctionnaires due à leur participation active à l’ancien régime politique). Lors de sa création en mai 1990, elle a dès lors permis à de nombreux États de reconstruire leur démocratie en conservant l’héritage constitutionnel européen. Depuis, elle a publié 1070 avis et études dont 50 rien qu’en 2021.
Cette expertise, l’une des plus performantes au monde, est donc une opportunité tant pour l’UE que pour les pays candidats. En effet, l’UE a besoin de l’avis extérieur et neutre de la Commission (dont elle finance certains avis) et les États candidats à l’adhésion ont alors tout intérêt à suivre les avis rendus par la Commission de Venise pour passer sans soucis les différentes étapes du processus d’intégration à l’Union Européenne. Le fait d’être partenaire ou candidat à l’UE est effectivement conditionné par la conformité des États à l’héritage constitutionnel européen et aux avis rendus par la Commission.
Cette dernière a donc su devenir en quelques décennies un garant de l’héritage constitutionnel de l’espace européen en se positionnant comme experte de la notion d’état de droit, caractéristique nécessaire à l’intégration de l’Union Européenne.
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