Sans honte
La nuit de la Saint-Sylvestre. Je suis sur une terrasse et j’entends trois jeunes hommes de vingt ans parler de l’intégration des réfugiés. L’un est pour, deux sont contre. J’en ai assez. Je décide de les rejoindre. Quels sont leurs arguments contre l’accueil des réfugiés ? Le terrorisme. De plus, ils pensent qu’il vaudrait mieux que les réfugiés restent dans leurs pays pour lutter et mourir pour leurs patries. Ils font référence à la Seconde Guerre Mondiale en Pologne, au courage du peuple qui s’était battu contre l’occupant. En oubliant qu’Alep ressemble à Varsovie à l’époque de l’Insurrection de 1944, quand la capitale polonaise a été complètement détruite. Ils répètent que si la guerre éclatait en Pologne, tout le peuple aurait eu le courage de lutter pour son pays.
Je leur explique qu’il est impossible d’imaginer ce qu’on ferait pendant la guerre parce que souvent, lors des situations extrêmes, les hommes sont dominés par des instincts indépendants de la nationalité. J’essaye de persuader mes interlocuteurs qu’un réfugié n’est pas forcément un terroriste, qu’en arrivant en Europe par la Mer Méditerranée les Syriens fuyent la guerre, la faim, la violence. Il est étonnant que certains n’aient pas honte d’afficher leur racisme. Ils semblent ignorer que leur comportement viole la Convention européenne des droits de l’homme (article 14 qui interdit la discrimination).
Voix de l’Église et politique du parti au pouvoir
Le 2 janvier, 19h00. J’allume la télé pour regarder un journal télévisé : le primat de la Pologne Wojciech Polak rappelle le message du Pape François : « Ceux qui fomentent la peur des migrants, parfois à des fins politiques, au lieu de construire la paix, sèment la violence, la discrimination raciale et la xénophobie ». Cependant, le parti Droit et Justice (PiS), la formation ultraconservatrice au pouvoir qui se dit être très proche de l’Église catholique et de respecter les piliers du christianisme, refuse non seulement d’accueillir des demandeurs d’asiles mais aussi de soigner les blessés. Le gouvernement polonais n’offre qu’une aide financière qui est bien inférieure à celle des autres pays européens. Heureusement, il y a des citoyens qui soutiennent des organisations ayant pour but d’aider les Syriens telles que Caritas Pologne, Action humanitaire polonaise (Polska Akcja Humanitarna), Mission médicale polonaise (Polska Misja Medyczna), UNICEF Pologne, Syrie libre (Wolna Syria).
Pourtant, le parti Droit et Justice (PiS) est fier de ses décisions et poursuit sa politique de la peur en simplifiant le problème. Par exemple, le vice-président de la Diète de Pologne, Joachim Brudziński a publié sur Twitter un message inquiétant : « Il est dit qu’au Nouvel An il nous manquera des roses en Pologne. Les féministes allemandes les achèteront rapidement pour les distribuer aux taureaux au tempérament de feu, soi-disant "réfugiés" qui peuvent ȇtre encore une fois "poussés" à violer des femmes la nuit de la Saint-Sylvestre ». Les hommes politiques au pouvoir ne comprennent pas que les réfugiés sont en grande partie des femmes, des enfants et des pères. Ce sont des familles qui veulent ou du moins essayent de recommencer une vie normale – beaucoup d’entre eux (des enfants aussi) ont déjà vu la mort de leurs proches.
Vœux pour ce Nouvel An
Au début de chaque nouvelle année, on se fixe des objectifs. Je conseillerais à tout le monde de prendre une bonne résolution : SOIS PLUS TOLÉRANT. Bonne année 2018 !
1. Le 8 janvier 2018 à 12:12, par Natacha Dréau En réponse à : Bonne résolution : sois plus tolérant !
Merci pour votre article prônant la tolérance, l’attention pour les réfugiés ayant tout perdu et souhaitant une vie libre comme tout le monde. La Terre n’appartient à personne. Votre commentaire montre aussi que tous les Polonais ne sont ni extrêmistes ni proches de la politique controversée PiS au pouvoir. Puisse la Pologne, tout en préservant son identité et malgré son passé marqué par les dominations externes, rester un état de droit démocratique. Regardant vers l’avenir. Mon voeu pour 2018 (cela me tenant particulièrement à coeur, vu mes origines maternelles polonaises).
Suivre les commentaires : |