Élections législatives : l’Italie bascule à l’extrême-droite

, par Lucas Nitzsche

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Élections législatives : l'Italie bascule à l'extrême-droite
Giorgia Meloni / Source Wikimedia Commons

C’est un nouveau séisme pour le Vieux Continent. Pour la première fois, un des pays fondateurs de l’Union européenne sera vraisemblablement gouverné par une coalition menée par un parti postfasciste. Avec 26,5% des voix, le parti Fratelli d’Italia, dirigé par l’ultra-conservatrice Giorgia Meloni, est arrivé dimanche 25 septembre en tête des élections législatives. Mais la coalition prévue avec Matteo Salvini (Lega) et Silvio Berlusconi (Forza Italia) pourrait compliquer la tâche de celle qui souhaite devenir la première présidente du Conseil italien.

À seulement 45 ans, Giorgia Meloni vient d’accomplir ce dont d’autres responsables politiques rêvaient en Europe : “l’union des droites”. À la tête de Fratelli d’Italia, parti fondé en 1946 par des fidèles de Mussolini (dont elle se dit elle-même admiratrice), la potentielle future première ministre a réuni les différentes tendances de la droite italienne aux valeurs conservatrices.

Une nouvelle coalition de droite et d’extrême-droite

Depuis le début de la campagne, elle n’hésite pas à créer la polémique, défendant à tout prix “la famille naturelle” et fustigeant les “lobbies LGBT”, dans l’objectif de créer une union derrière elle et ses alliés. L’alliance était conclue très tôt : si les partis de Meloni, Salvini et Berlusconi remportent suffisamment de suffrages, leur coalition formera un gouvernement pour succéder à celui de Mario Draghi. Avec La Lega et Forza Italia, la nouvelle union devrait ainsi occuper 43% des sièges du Parlement italien.

"Le choix que nous avons est de rester au cœur de l’Europe [...] ou d’en être exclu", disait Enrico Letta il y a encore une semaine. En ayant remporté 19% des voix, Enrico Letta (leader du Parti Démocrate) sauve les meubles, mais doit avouer son échec : les élections italiennes ont acté la défaite de la gauche face à une coalition sans précédent.

L’instabilité économique et politique de l’Italie

L’Italie n’est pas connue pour sa stabilité politique : la durée de vie d’un gouvernement y est en moyenne de deux ans, et la situation politique actuelle ne risque pas d’améliorer l’état des choses. Depuis que l’ancien premier ministre Mario Draghi a perdu la majorité au Parlement en juillet dernier - avant de finalement démissionner -, les responsables politiques s’écharpent pour sa succession. Pourtant, l’abstention record de 36% (contre 26% aux dernières élections) illustre parfaitement le désintérêt croissant pour la politique des Italiens, davantage préoccupés par leur facture d’électricité que par les querelles politiciennes.

Doublement touchée par la crise énergétique et l’inflation, l’Italie supporte une dette qui s’élève à 150% de son PIB. Les Italiens sont les premiers à ressentir le poids de cette situation économique, et après les échecs des coalitions avec les partis de gauche (le Parti Démocrate et le Mouvement 5 étoiles), leur dernier espoir semble résider dans l’alliance de la droite et de l’extrême droite.

Une alliance vouée à l’échec ?

Pourtant, des divergences apparaissent déjà au sein de la nouvelle coalition, et particulièrement entre Giorgia Meloni et Matteo Salvini. Sur la guerre en Ukraine par exemple. Alors que la première plaide en faveur de l’OTAN, condamne fermement l’invasion russe en Ukraine et soutient les sanctions européennes, le leader de la Lega souhaiterait les alléger et sortir du traité nord-atlantique.

À l’échelle nationale, d’autres divergences subsistent, notamment sur la réponse à apporter à la crise énergétique. Matteo Salvini souhaite la mise en place d’un plan de 30 milliards d’euros d’aide, alors que Giorgia Meloni plaide davantage pour une austérité budgétaire. Enfin, la question de l’organisation territoriale italienne divise les deux responsables politiques, Meloni défendant une organisation centralisée, tandis que son partenaire de coalition souhaite donner davantage de pouvoirs aux régions italiennes.

Celle qui brigue la présidence du Conseil a aussi matière à discorde avec son deuxième allié, l’encombrant Silvio Berlusconi. Le député européen avait par exemple provoqué la polémique en déclarant que Vladimir Poutine avait été « poussé » à envahir l’Ukraine, avant de rétropédaler. Le gouvernement qui va se former dans les prochaines semaines devra, comme les précédents, surmonter le défi de la stabilité.

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