Histoire croisée de la France et de l’Allemagne

L’Europe celtique contre l’Europe romaine

Dans l’Antiquité romaine, le terme « celte » était très imprécis. Il était utilisé par les Romains pour désigner des peuples barbares vivant tant à l’ouest (la Gaule) qu’à l’est du Rhin (la Germanie). Les Romains n’arrivant pas bien à distinguer ces peuples qui avaient des modes de vie comparables, seul le facteur géographique permettait de les différencier. Bien entendu il n’existait aucune solidarité & consciences nationales propres à ces tribus. Elles ne se considéraient nullement « Gauloises » ou « Germaines ». Il a fallu attendre l’impérialisme romain pour que certaines tribus se fédèrent contre l’envahisseur. C’est ainsi que l’on connaît Vercingétorix de la tribu arverne qui entreprit de guider la lutte contre les Romains avant de s’incliner à l’issue de la bataille d’Alésia.

Quelques années plus tard à l’est du Rhin, une tribu soumise à la domination romaine, les Chérusques, se révoltent à l’appel d’un certain Arminius pour conserver leur indépendance. Ce n’est que des siècles plus tard que ces personnages seront repris par ceux qui voudront construire les nationalismes respectivement français et allemand, en particulier au 19ème siècle où le culte de ces « ancêtres mythiques » atteindra son paroxysme. Là où Arminius incarnera la liberté et l’unité allemande, Vercingétorix sera instrumentalisé pour symboliser la dignité de la Nation dans la défaite, en particulier après la guerre franco-prussienne.

Le déclin de l’Empire romain, invasions ou migrations ?

Si l’historiographie française a initialement cherché à promouvoir l’idée de vagues barbares sanguinaires pour expliquer la chute de l’Empire romain d’Occident, l’historiographie allemande a tendance à parler de « Völkerwanderung » (migration de peuples). Rome doit sa perte à quelques facteurs externes mais surtout à des facteurs internes. L’Empire fait en effet face à une grave crise économique et politique. L’autorité impériale se détériore au profit de grands propriétaires fonciers, les potens, analogiquement comparables aux féodaux pendant la période médiévale.

Face à cette crise politique, l’Empire accentue son autoritarisme, accélérant la défiance de ses sujets. Parallèlement, divers peuples germaniques qui viennent de l’Est et du Nord de l’Europe pénètrent le territoire impérial, parfois de manière belliqueuse, mais le plus souvent de manière pacifique. Il s’agit de peuples germaniques tels que les Francs, les Lombards, les Alamans, les Burgondes etc. La culture romaine se perd. Les romains se germanisent à la grande déception de l’Église catholique qui tentera de sauvegarder le peu d’héritage antique restant. La déchéance de Romulus Augustule (dernier empereur romain d’Occident) par le germain Odoacre ne fait qu’officialiser le décès d’un Empire qui était déjà mourant.

La naissance de l’Occident chrétien, un tournant de l’histoire européenne

L’Église catholique romaine ayant évolué conformément aux anciennes structures administratives impériales, elle parvient à atteindre la Gaule, notamment grâce à un certain Martin de Tours, un ancien légionnaire romain qui va implanter des monastères pour évangéliser la Gaule durant le quatrième siècle. Alors que la disparition de l’Empire laisse place à des affrontements entre diverses tribus germaniques, un tournant s’opère à l’issue de la bataille de Tolbiac en 496 qui opposa les Francs de Clovis aux Alamans, une confédération de peuples germaniques.

On dit que celui-ci, alors qu’il voyait la victoire lui échapper, aurait prié « le dieu de Clothilde », son épouse catholique, et qu’il aurait promis de se convertir au christianisme en cas de victoire. Cette dernière a définitivement scellé l’alliance entre les Francs et l’Église catholique romaine...