L’éducation et la jeunesse dans l’Union européenne : quelles perspectives ?

, par Martin Laprovitera, Maxime Gouiran

L'éducation et la jeunesse dans l'Union européenne : quelles perspectives ?
Image : © European Parliament

La politique éducative est une compétence exclusive des États membres, reléguant l’Union européenne au second plan en la matière. Pourtant, les programmes éducatifs de l’UE ont un impact considérable sur la formation des jeunes européens.

D’après les traités, l’Union européenne a la capacité de compléter les politiques éducatives de chaque État membre et de favoriser leur coopération à travers, par exemple, un soutien financier et des activités dans le cadre des programmes Erasmus+ et Europe créative. Elle peut aussi émettre des recommandations aux États membres en déterminant certains objectifs à atteindre et leur mettre des outils pédagogiques à disposition.

Les Jeunes Européens Lyon ont organisé une visite virtuelle à la Commission européenne le 14 avril passé, et ont échangé avec Renato Girelli et Marta Toykova, respectivement gestionnaires des politiques Equity and social aspects of education (Les enjeux sociaux et d’égalité dans l’éducation, NDLR) et Youth Policies and Programmes (Politiques et programmes pour la jeunesse, NDLR) au sein de la Direction générale de l’éducation, de la jeunesse, du sport et de la culture de la Commission.

L’inclusion et l’égalité : deux questions clefs pour une éducation plus européenne

Considérant les Objectifs de Développement Durable en matière d’éducation et d’égalité établis par l’ONU, la Commission européenne a fixé trois paramètres pour rendre l’Europe plus inclusive en matière d’éducation :

1. Les taux de pauvreté et tendance à l’exclusion : l’objectif est de faire le point sur les progrès faits par chaque État membre à ce propos, mais également sur les réformes qui peuvent être mises en œuvre pour améliorer leurs performances.

2. Le taux de décrochage scolaire : la Commission a également entamé des réformes spécifiques pour essayer de diminuer le décrochage scolaire (les résultats atteints par le Portugal et l’Espagne sont remarquables). Cependant, le décrochage se renforce chez les enfants dont la famille provient d’un pays hors-UE, ce qui démontre la nécessité d’accentuer les politiques de lutte contre l’inégalité.

3. Le taux de participation dans l’enseignement supérieur : l’Union européenne a fixé l’objectif d’une participation d’un 40% pour 2020. Cet objectif a été atteint, néanmoins, Renato Girelli ne semble pas convaincu de l’ambition de cet objectif et souligne que les familles originaires d’un pays hors-UE demeurent les moins incluses dans le système d’enseignement supérieur.

Alors, quelles initiatives pour l’éducation dans les années à venir ?

La Direction générale pour l’éducation, la jeunesse, le sport et la culture propose un travail commun des Commissions pour faire face aux inégalités : elle a présenté un « plan d’action pour l’intégration et pour une Europe plus démocratique » dans lequel le dialogue entre les États membres est essentiel. Renato Girelli souligne l’importance d’introduire « des réformes dans les systèmes éducatifs pour incorporer de plus en plus de contenu européen, et aussi du contenu qui puisse permettre aux étudiants de mieux comprendre la complexité de notre société d’aujourd’hui  ».

Pour cela, des nouveaux cadres de dialogue ont été créés, tels que le Sommet européen de l’éducation (à partir de 2018) qui permet aux Ministres de l’éducation des États membres de se rencontrer et d’échanger sur différentes thématiques et expériences, et surtout sur l’avenir de l’éducation en Europe.

La date du prochain Sommet européen de l’éducation n’est pas encore précisée, mais il se déroulera au cours du mois d’octobre. Selon Renato Girelli, ce Sommet est «  important, parce qu’il met directement en relation les institutions européennes, les gouvernements représentés par les ministres, et les acteurs principaux qui sont les enseignants et les étudiants - et évidemment les directeurs des différents systèmes éducatifs  ».

Quelles stratégies pour les jeunes ?

La stratégie de l’Union européenne pour la jeunesse 2019-2027 est basée sur trois axes principaux : mobiliser (encourager les jeunes à participer de la vie démocratique) ; connecter (les jeunes de toute l’Europe) et autonomiser (ou empower : soutenir l’autonomisation des jeunes grâce à l’activité, l’innovation et la reconnaissance du travail socio-éducatif). Sous la Présidence bulgare en 2018, l’Union européenne a fixé également 11 objectifs pour la jeunesse européenne. Parmi ces objectifs on retiendra : la volonté de connecter l’UE avec la jeunesse, l’égalité de tous les genres et le soutien aux organisations de jeunesse et aux programmes européens.

Pour cela, Marta Toykova a présenté les outils qui seront renforcés par l’Union européenne pour atteindre ces objectifs :

 Une base de données qui rassemble toutes les informations sur les politiques de jeunesse dans chaque État membre
 Un rapport européen pour la jeunesse qui fasse un point sur la mise en œuvre de la stratégie et notamment un “état des lieux” de la situation de la jeunesse en Europe
 Un partenariat avec le Conseil de l’Europe et avec des chercheurs spécialisés dans le domaine de la jeunesse
 Le dialogue de l’UE pour la jeunesse : l’idée est d’atteindre le plus de jeunes possible

En ce qui concerne les échanges de jeunes, la stratégie aborde plutôt l’échange entre jeunes de différents pays en dehors des structures scolaires, toujours à visée éducative. Pour cela, Marta Toykova met l’accent sur le Corps européen de solidarité. Ce programme, lancé en 2016 lors du sommet de Bratislava, a pour objectif de développer un sentiment d’appartenance en organisant des activités “au bénéfice des communautés locales”. Pendant la crise de la Covid-19, par exemple, le programme a permis de créer une solidarité intergénérationnelle entre les volontaires à travers multiples modalités de déroulement.

En outre, le programme envisage d’ajouter le volet aide humanitaire qui permettra aux jeunes de participer, selon des conditions précises, à des actions humanitaires à l’exception des situations d’urgence imminente ou des théâtres de guerre. Les deux gestionnaires ont finalement souligné l’importance du dialogue avec les jeunes et notamment de leur participation à la Conférence pour l’avenir de l’Europe, lancée le 9 mai dernier.

Stratégie cynique ou exercice démocratique ?

L’Union Européenne a fait beaucoup pour les jeunes. Les programmes ERASMUS et les opportunités de stage, d’emploi et de bénévolat ont permis à la jeunesse européenne de profiter de nombreuses opportunités. Mais ces réussites se concentrent sur une tranche d’âge spécifique, de 18 à 25 ans, et ignorent le cas des personnes les plus défavorisées.

La nouvelle stratégie de l’UE se concentre sur ces problématiques et compte renforcer sa position auprès des jeunes. C’est auprès des 16-29 ans que les institutions européennes sont les plus populaires et l’exécutif européen l’a bien compris. Mais la jeunesse est aussi un appui important aux politiques les plus progressistes en matière d’écologie, de démocratie ou d’état de droit.

En se concentrant sur l’inclusion, la place grandissante donnée à la jeunesse dans les initiatives de démocratie participative (comme la Conférence pour l’avenir de l’Europe) ou dans les programmes de soutien à la société civile, l’UE peut espérer rassembler la jeunesse faute d’en avoir été capable avec d’autres tranches de la population.

Mais est-ce vraiment cynique de répondre aux inquiétudes et aux attentes d’une génération angoissée par son avenir ? Ou est-ce que l’UE fait ce que toutes les démocraties devraient faire ?

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