« L’Europe peut-elle tout maîtriser ? Non évidemment. Mais l’Europe peut maîtriser des enjeux que les États membres isolés ne peuvent parvenir à résoudre », tels furent les mots d’ouverture d’un discours empreint de réalisme et d’humour.
« Je ne veux pas des États-Unis d’Europe »
« L’Union européenne a pris trop d’influence sur le quotidien des européens avec comme résultat une trop grande immixtion ». Juncker juge que l’Union européenne a souvent trop fait dans certains domaines en légiférant à tout va, sans même obtenir l’efficience du résultat attendu. Face à un tel carcan juridique, « il faut désormais moins légiférer mais mieux légiférer » et c’est pourquoi la Commission européenne se donne aujourd’hui pour mot d’ordre de supprimer plus de 400 textes qui ne semblent plus indispensables au système normatif communautaire.
Le président rappelle que l’Europe est la mise en commun des souverainetés nationales et que les États membres sont plus forts si on opère un partage vertueux des compétences. En tant que politicien étatique puis européen, Juncker dit se rendre compte du fossé existant entre la vie politique et l’opinion publique, et qui conduit par conséquent à ce que les citoyens européens ne veulent plus du complexe système bruxello-centré. « Mieux vaut réunir les forces européennes là où les forces nationales sont insuffisantes ».
L’exposé des axes de travail des commissaires européens
Concernant tout d’abord la lutte contre le dumping social, le président rappelle qu’en tant qu’économie sociale de marché, le principe ‘À travail égal, salaire égal’ se doit d’être plus largement respecté. Cette proposition vient au soutien de la révision de la Directive concernant les travailleurs détachés que la Commission souhaite rapidement voir aboutir.
Concernant ensuite l’Espace de liberté de sécurité et de justice (ELSJ), Juncker fait état d’une ferme et ambitieuse volonté d’intensifier une coopération policière plus efficace. Face à un auditorium parisien, la raisonnance de ce propos n’en est que plus intense du fait des craintes terroristes du moment. De plus, il ajoute vouloir renforcer la législation sur le commerce des armes.
Le discours glisse enfin vers des propos prospectifs, quelque peu trop réalistes. Juncker n’hésite pas à dire que démographiquement et économiquement l’Europe est un petit continent qui décline. D’ici vingt ans, plus aucun pays européen ne sera membre du G7. Empreint de son humour luxembourgeois, il rehausse finalement le ton en affirmant que : « d’ici un siècle, les européens ne représenteront que 5% de la population mondiale. Il faut donc relancer la libido continentale ! ».
Encore une ou deux questions Monsieur le Président
Face aux questions de l’auditorium, le président réaffirme être un fort partisan de la politique agricole commune qu’il juge être une question stratégique à absolument maintenir. Il en vient ensuite à s’exprimer sur le TTIP (partenariat transatlantique de commerce et d’investissement). Le commerce extérieur est plus que jamais essentiel dans la mesure où chaque milliard de plus représente 14 000 nouveaux emplois. Un septième des emplois en Europe dépend d’ailleurs du commerce extérieur. Selon lui, si l’Europe ne conclut pas d’accord transatlantique, les américains concluront du côté asiatique et ce sont alors les normes chinoises qui s’imposeront : « et ça, je ne le veux pas » conclut-il fermement.
Quand une dernière question est posée sur le point de savoir si les flux migratoires étaient de nature à fragiliser l’Europe, il répond que le droit d’asile se doit d’être unifié et qu’il faut vite faire face à ce problème structurel. C’est en effet la première fois que la norme européenne n’est pas respectée par autant d’États membres. « On doit arrêter d’attaquer les eurosceptiques : il faut au contraire dialoguer avec eux et expliquer. L’Europe ne peut pas se faire contre les Nations et les citoyens européens, mais elle doit au contraire se faire avec leur étroite confiance et collaboration. L’Europe est capable de grandes choses quand elle sait unir ses forces et ses énergies ».
Les trois mots conclusifs du président Juncker pourraient être la devise que nous devons aujourd’hui conserver en toile de fond dans notre vie de citoyen européen : « Patience, Endurance & Ambition ».
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