Tout avait si bien commencé. Quand il arrive à la tête de la Commission européenne le 1er novembre 2014, Jean-Claude Juncker veut marquer rapidement de son empreinte l’exécutif européen. L’énergique Luxembourgeois aspire à une Europe plus politique, volontaire et ambitieuse. Il promet de redonner son rôle moteur à la Commission, malmenée par les Etats membres sous la précédente présidence Barroso. Ce faisant, il souhaite impulser un nouvel agenda de réformes afin de relancer l’intégration européenne.
Au cœur de ses projets, la politique de l’énergie et du climat devait y tenir l’un des rôles principaux. Dans la lettre de mission qu’il adresse au nouveau commissaire à l’énergie et à l’action climatique, personnalité controversée, l’Espagnol Miguel Arias Cañete, Juncker y décline en cinq points les grands objectifs de la politique énergétique européenne à venir.
Premier point, assurer la sécurité énergétique de l’Union européenne afin de réduire sa dépendance au gaz russe. Puis baisser la facture d’électricité des Européens par la création d’un marché unique de l’énergie entre les vingt-huit Etats de l’Union. Lutter contre la pollution en améliorant l’efficacité énergétique des infrastructures et réduire de 40 % les émissions de gaz à effet de serre par rapport aux niveaux de 1990, conformément au processus de « décarbonisation » de l’économie, sont aussi au programme. Enfin, encourager la recherche et l’innovation dans le secteur des énergies renouvelables.
Au sommet sur le climat à Paris, la Commission entend ainsi jouer « un rôle moteur » et « visionnaire » dans la conduite des négociations, forte de sa réputation de pionnière en matière de politiques environnementales.
Une réforme qui tourne au ralenti
Seulement voilà, un an tout juste après son arrivée, force est de constater que rien ne s’est passé comme prévu pour la Commission Juncker. La crise grecque et l’arrivée continue de réfugiés syriens sur les côtes européennes ont bouleversé tour à tour l’agenda des réformes imaginé par la nouvelle Commission, laissant le plan d’action sur l’énergie à l’état embryonnaire.
De même, si aucun texte législatif n’a encore été proposé par la Commission, celle-ci doit déjà faire face aux réticences de certains Etats qui voient d’un mauvais œil l’accentuation des objectifs de baisse des émissions de gaz à effet de serre et de promotion des énergies renouvelables. C’est le cas de la Pologne, dont 85 % de la production d’électricité dépend du charbon, comme a souhaité le rappeler son nouveau premier ministre, Beata Szydło, en déclarant « qu’il n’y avait pas de futur pour l’économie polonaise sans charbon ». De ce point de vue, et contrairement aux engagements du président Juncker, les différents intérêts stratégiques des Etats membres semblent peser plus que jamais dans le processus législatif européen. Sans oublier que l’impact d’une telle réforme semble limitée à l’heure où les traités cadres de l’Union européenne laissent encore aux Etats la compétence de choisir comme bon leur semble leur « mix énergétique », c’est-à-dire la part des différentes sources d’énergies dans la production nationale d’électricité.
Scandale Volkswagen, le scénario catastrophe
Il ne manquait plus que la révélation en septembre par les autorités américaines d’un vaste système de fraude des voitures de la marque Volkswagen sur les émissions de gaz polluants pour faire voler en éclat l’image pro-environnementale de l’Union européenne. La Commission, bien qu’elle ne soit pas en charge de la mise en œuvre des tests, est elle aussi entachée par les soupçons de corruption, accusée d’avoir fermé les yeux depuis 2013 sur plusieurs études révélant la fraude, sous pression de l’Allemagne et du lobby de l’industrie automobile. Une chose est désormais certaine : l’Union n’arrive pas en position de force aux négociations sur le climat à Paris. A charge pour elle de se racheter une conduite en y négociant le compromis le plus ambitieux en matière de lutte contre le réchauffement climatique.
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