Lutte contre la crise énergétique : l’Allemagne fait cavalier seul tandis que la France prône une réponse au niveau européen
Le 20 et 21 octobre 2022 à Bruxelles s’est tenu le Conseil Européen. À cette occasion, les chefs d’État des 27 pays de l’Union européenne ont pu échanger sur les solutions de lutte contre la crise énergétique. À son arrivée, Emmanuel Macron a été interrogé au sujet de l’Allemagne. Ce dernier a estimé qu’il n’était « pas bon » pour l’Europe que son partenaire « s’isole ».
Au mois de septembre, le gouvernement allemand a effectivement annoncé la mise en place d’un programme de soutien aux particuliers et aux entreprises. Il s’agit d’un bouclier tarifaire de 200 milliards d’euros qui a pour but de baisser les prix du gaz et de l’électricité. Cette décision ne fait pas l’unanimité auprès de la Commission européenne et des autres pays de l’Union. D’abord parce que l’Allemagne n’a averti personne de cette décision puis ensuite pour l’égoïsme qui ressort de celle-ci. L’Allemagne a cependant fait front commun, avec la France, pour contester la conformité aux règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) des mesures protectionnistes entrées en vigueur aux États-Unis le 1er janvier 2023.
Dans un tweet du 30 Septembre 2022, le commissaire européen Thierry Breton n’ a pas caché son mécontentement : “Tandis que l’Allemagne peut se permettre un bouclier de 200 milliards d’ euros, certains pays de l’UE n’en ont pas la possibilité !”
Concernant le plafonnement du prix du gaz, là aussi, Olaf Scholz ne s’est pas rangé aux côtés d’Emmanuel Macron qui prônait un plafonnement au niveau européen. Le chancelier craignait que ce dernier détourne les pays producteurs de l’Europe et a de ce fait décidé le plafonnement du prix du gaz sur l’ensemble du territoire allemand à partir de 2023. Mais là encore, il n’a mis au courant aucun de ses partenaires européens.
Plus que la nature de ses actions, les États membres reprochent à Olaf Scholz un comportement taciturne et solitaire notamment pendant les principaux sommets internationaux. Un manque de concertation regrettable pour la consolidation du lien de confiance entre l’Allemagne et les autres pays européens à l’heure où l’entêtement passé de l’Allemagne sur les infrastructures gazières (Nordstream 2) coûte déjà cher à l’UE.
La question d’approvisionnement en gaz a aussi fait débat
Lancé en 2013, le gazoduc Midcat devait relier la Catalogne et le sud-est de la France. Il avait cependant été stoppé en 2019 en raison de son impact environnemental et du coût bien trop élevé de la construction.
C’est avec la crise actuelle que les débats ont été relancés. Étant beaucoup plus touchée par la crise, l’Allemagne cherche à réduire sa dépendance au gaz russe. C’est ainsi qu’avec l’Espagne et le Portugal, elle milite pour relancer le projet du gazoduc Midcat. La France est cependant restée opposée estimant que l’installation de nouveaux terminaux de GNL (gaz naturel liquéfié) dans le nord et l’est de l’Europe, notamment en Allemagne, serait une alternative plus rapide et moins coûteuse que la construction d’un nouveau gazoduc.
Absence du couple franco-allemand dans le domaine de la défense
France et Allemagne se sont engagés séparément dans différents projets de défense. On constate alors que les projets franco - allemands de défense comme le futur SCAF (système du combat aérien du futur ) tournent au ralenti. En Août 2022, l’Allemagne a annoncé la création d’un bouclier antimissile (European Skyshield ) avec 14 membres de l’OTAN (excluant la France) . Il est prévu que le dispositif soit élaboré avec du matériel allemand, israélien et américain. Comment expliquer ce choix ? En raison de son histoire, l’Allemagne accorde en effet beaucoup d’importance à l’Alliance Atlantique. Ne possédant pas l’arme nucléaire, ayant un armée sous-équipée et étant témoin du lancement compliqué de projets de défense européenne tels que l’Eurodrone , le pays n’a pas hésité à se tourner vers l’OTAN pour assurer sa sécurité.
Il faut dire que les dures années de dictature pro soviétique en RDA restent ancrées dans la mémoire collective. Le pays se sent plus que jamais menacé : il était donc impératif de trouver rapidement une solution pour assurer sa défense. La France, quant à elle, a préféré opter pour la dissuasion. Partisane d’une Europe de la défense, elle a néanmoins décidé de s’associer à l’Italie pour faire concurrence avec un autre projet antimissile : le mamba. Notons que ce n’est pas la première fois que l’Allemagne se détourne de l’industrie européenne de défense. En Mars 2022, suite à l’invasion de l’Ukraine, le pays avait bel et bien acheté des F 35 aux États-Unis.
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