Le Courrier d’Europe : Kemal Kiliçdaroglu met toutes les chances de son côté

, par Eva Karaduman, Le Courrier d’Europe

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Le Courrier d'Europe : Kemal Kiliçdaroglu met toutes les chances de son côté
Kemal Kiliçdaroglu pourra-t-il détrôner le Président turc Erdogan ? Crédits : Wikimedia Commons

À moins de deux semaines du premier tour d’une élection présidentielle historique en Turquie, le candidat de l’opposition Kiliçdaroglu met toutes les chances de son côté pour décrocher une victoire.

L’opposition, qui s’est finalement accordée pour se ranger derrière un seul candidat il y a quelques jours, est au coude-à-coude avec le président sortant, Recep Tayyip Erdogan, dans les sondages. Kemal Kiliçdaroglu se dit prêt à changer le destin de la Turquie, et sa victoire pourrait modifier la dynamique des relations UE-Turquie.

Reprendre les négociations d’adhésion à l’Union européenne

Après des années de relations houleuses sous l’ère Erdogan menant le Conseil de l’UE à estimer en juin 2019 que “les négociations d’adhésion avec la Turquie sont [...] au point mort”. L’Union européenne est ainsi devenue un sujet clé - et pas moins épineux - dans cette campagne électorale.

Lors d’un dîner organisé à Ankara en compagnie de différents ambassadeurs européens, dont Nikolaus Meyer Landrut, le chef de la délégation de l’Union européenne en Turquie, Kemal Kiliçdaroglu s’engageait à faire de l’adhésion à l’Union européenne sa priorité, alors que les négociations durent depuis déjà plus de 20 ans. Il a notamment promis de résoudre le problème des visas : à l’heure actuelle, les Turcs doivent faire une demande de visa Schengen, longue et coûteuse, pour pouvoir entrer dans l’Union européenne, et cette contrainte éloigne les citoyens turcs du reste de l’Europe.

La fin du visa Schengen ?

Il y a seulement quelques semaines, le Conseil de l’Union européenne et le Parlement européen approuvaient l’exemption de visa Schengen pour les citoyens du Kosovo. Depuis 2016, la Commission européenne se déclare favorable à l’exemption des visas pour les Kosovars, mais aussi pour les Turcs dans le cadre de la signature du pacte migratoire. Néanmoins, la Turquie n’avait pas su respecter les 72 critères indispensables pour permettre l’exemption.

Dans son discours, Kemal Kiliçdaroglu affirmait que 6 des 72 critères n’avaient pas été remplis et qu’ils y parviendraient pour surmonter le problème des visas avec l’Europe “en peu de temps”.

Mais, en dépit des promesses optimistes et du possible apaisement des relations en cas de victoire de l’opposition, il faudra considérer la situation de l’Union européenne. Une potentielle adhésion turque pourrait troubler l’équilibre structurel de l’Union européenne. En raison de sa démographie, la Turquie serait le plus grand État membre, et aurait donc un impact considérable sur les prises de décisions au sein des institutions : elle aurait par exemple le plus de députés au Parlement européen ! De plus, l’UE devrait s’adapter à un contexte géopolitique inédit étant donné que la Turquie se trouve aux portes du Moyen-Orient. L’enjeu de cette adhésion s’intensifie par le scepticisme de l’opinion publique européenne.

“Je suis alévi” : la fin d’un tabou

La campagne électorale a pris un autre tournant lorsque, le 19 avril dernier, Kemal Kiliçdaroglu mettait fin à un tabou. En effet, dans une vidéo publiée sur Twitter, le candidat de l’opposition à la présidentielle revendique son appartenance à la communauté alévi, une minorité religieuse importante en Turquie souvent pointée du doigt, voire réprimée violemment. Par ailleurs, cette déclaration a fait vivement réagir certains membres du parti politique sortant AKP :

Dans cette vidéo visionnée pas moins de 35 millions de fois, le candidat du parti CHP s’adresse directement aux jeunes, sur qui il compte pour l’emporter. Il se présente comme celui qui pourrait être le défenseur des minorités réprimées en Turquie. D’ailleurs, ce 28 avril dernier, le parti politique pro-kurde HDP appelait à voter pour Kemal Kılıçdaroğlu. Pour rappel, environ 20% de la population en Turquie est kurde.

Dans un contexte de société polarisée sur les questions d’identité, cette vidéo peut être vue par la jeunesse turque comme un espoir d’unification et de réconciliation, ce qui semble être très important pour le bien-être et pour le futur du pays. Cela pourrait marquer le début d’un changement historique. L’alliance de l’opposition surnommée “la table des Six” entend bien changer totalement la Turquie, qui a connu différentes crises importantes fragilisant sa puissance.

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