En 1999, l’accord permettant la création d’une « Union étatique de la Russie et du Bélarus » a été signé. Ce projet s’est développé d’une manière active jusqu’à la première moitié des années 2000. Les parties avaient jusque là activement échangé sur les différents principes et approches de l’intégration. Des déclarations visant l’unification de la législation, du parlement, du cabinet des ministres, des symboles (drapeau, blason, hymne) et de la monnaie ont également été faites. Chaque pays poursuivait ses objectifs et ses intérêts quand, au début des années 2000, les contradictions politiques et économiques ont amené ce projet d’« Union » à une impasse.
Cependant, le Bélarus ne peut pas exister aujourd’hui sans la coopération économique avec la Russie. L’économie du pays dépend beaucoup du secteur énergétique russe, des subventions et des crédits russes.
L’Europe, au contraire, n’est pas capable de prendre à sa charge le Bélarus. Les sanctions concernant les visas et les avoirs des personnes réputées avoir été impliquées dans la répression interne, appliquées actuellement par l’UE, n’ont pas vraiment d’impacte négatif sur l’économie de la république.
Le Bélarus continue de traiter le pétrole russe et de le transférer en Europe, réduisant ainsi le déséquilibre du commerce extérieur avec la Russie. En 2011, d’après les données officielles de Belsat, l’export depuis la république vers l’UE a été multiplié par 2,1 et a atteint les 15,7 milliards de dollars. L’UE représente ainsi 37% de tout l’export bélarusse tandis que le solde du commerce extérieur s’élève à +7 milliards de dollars.
À titre de comparaison, les exportations vers les pays de l’Union douanière (Russie et Kazakhstan) en 2011 représentent seulement 14,3 milliards de dollars. Le solde du commerce extérieur est descendu à moins de 10,7 milliards de dollars. En raison de la forte augmentation des exportations vers l’Europe, l’économie bélarusse a pu réduire le solde négatif du commerce à 5,4 milliards de dollars en 2011, contrairement au 9,6 milliards de dollars en 2010.
Pour sa modernisation, le Bélarus a besoin d’investissements, de nouvelles technologies et de cadres professionnels. En novembre 2011, l’agence de notation internationale Standard&Poor’s a déclassé le Bélarus et son secteur bancaire dans le groupe des pays soumis aux plus grands risques (avec la Grèce et le Vietnam). Évidemment, avec un tel classement et un risque politique élevé, il ne faut pas s’attendre aux investissements.
La Russie reste ainsi l’investisseur principal mais la Chine se montre très active ces dernières années. L’exode des cadres qualifiés vers la Russie et l’Occident est dernièrement devenu important.
L’union eurasienne
L’objectif stratégique de la Russie est de créer l’Union eurasienne, initiative perçue de façons différentes. Ceux qui regrettent la chute de l’URSS, considèrent que c’est le projet de l’URSS II. D’autres considèrent que l’Union eurasienne doit se construire d’après le principe de l’Union européenne. D’autres encore croient qu’il s’agit d’un projet virtuel et ambitieux d’hommes politiques et qu’il ne sera pas réalisé. Dans tous les cas, Moscou ne laissera pas le Bélarus échapper à son champ d’influence. En 2010, l’intégration a été pratiquement arrêtée suite aux tensions importantes dans les relations entre la Fédération de Russie et la République du Bélarus, et les différends entre les chefs d’États.
En 2011, Loukachenka a néanmoins signé toutes les initiatives d’intégration de la part de Moscou et a obtenu en contrepartie des réductions pour le gaz et le pétrole ainsi que des crédits. Il est peu probable que les changements politiques viennent de l’Occident mais il est certain qu’ils arriveront de l’Orient. Il est possible que le temps des changements politiques vienne après le lancement de tous les accords sur l’intégration.
Aujourd’hui, il vaut mieux avoir au Bélarus un chef d’État isolé et controlable qu’une personne nouvelle et inconnue. L’idée de l’Union eurasienne serait vouée à l’échec si elle était limitée à la coopération et à l’intégration des anciens États soviétiques dans un système économique similaire. Le plus grand succès serait une coopération économique plus étroite de la Russie, du Bélarus, du Kazakhstan et de l’Ukraine avec l’UE.
Quel avenir pour le Bélarus avec la reconduction de Poutine au pouvoir ?
Enfin, le sort du régime politique au Bélarus dépend aussi de la Russie de demain. Ainsi, il est important de comprendre quels sont les scénarios possibles en Russie après les élections. Les manifestations à Moscou ont montré que les autorités russes n’étaient pas prêtes à une telle réaction.
La première option est que « les vis vont se serrer » en Russie et qu’elle prendra le chemin de l’autoritarisme. Je considère ce scénario comme peu probable, mais il correspond à l’esprit bélarusse du régime autoritaire. Le risque de confrontation avec l’Occident, où l’élite russe garde son argent, est très grand. Il ne faut pas oublier qu’en 2014 les Jeux Olympiques ont lieu à Sotchi et qu’en 2018 la Russie accueille le Championnat du monde de football. Sur l’exemple du Bélarus, nous pouvons voir comment les prisonniers politiques et la violation des droits de l’homme peuvent servir de motif pour le refus de Championnat du monde de hockey sur glace à Minsk. Moscou connaît les conséquences d’un boycott d’une compétition sportive internationale après les Jeux Olympiques de 1980.
La deuxième option est que la Russie prenne le chemin de la libéralisation et des réformes politiques avec toutes les conséquences. Ce scénario est le plus inacceptable pour le régime bélarusse car ces processus de libéralisation peuvent aussi atteindre Minsk.
La troisième option réside dans le fait que quelque temps après les élections l’activité politique est en baisse et que tout le monde oublie la promesse du pouvoir de mettre en place des réformes. Ce scénario convient aux dirigeants bélarusse et russe. Nous verrons dans quelques temps le chemin que va réellement choisir la Russie. Je suis enclin à penser que ce sera une synthèse des deux dernières options.
En attendant, au cours de 2012, l’harmonisation de la législation dans le cadre des initiatives d’intégration, l’élaboration des réglementations techniques dans le cadre de l’union douanière entre les deux pays et d’autres projets vont continuer à se développer. C’est un travail minutieux des représentants officiels qui sont de plus en plus favorables à resserrer les liens d’intégration entre les deux pays.
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