Les élections législatives du 20 octobre, initialement prévues pour avoir lieu en même temps que les élections européennes en mai 2014, ont été organisées suite à la démission du Premier ministre, le 10 juillet dernier. Un scandale était en effet survenu au Grand-Duché, après que Jean-Claude Juncker ait été mis en cause dans sa gestion du Service de renseignement de l’Etat du Luxembourg (SREL).
Après un passage aux urnes en grand nombre, sans surprise dans un Etat où la législation oblige les citoyens à aller voter sous peine d’avoir à payer une amende, les Luxembourgeois ont donc décidé d’attribuer, sur les 60 sièges à pourvoir au Parlement, 23 au Parti chrétien-social (PCS/CVS), 13 au Parti ouvrier socialiste (POSL/LSAP), 13 au Parti démocratique (PD/DP) et 6 aux Verts/Dei Greng (LV-DG). Alors qu’on s’attendait à une énième reconduction du mandat de Jean-Claude Juncker suite à son arrivée en tête, c’est pourtant une coalition socialiste-démocrate-verte qui a vu le jour, permettant ainsi à Xavier Bettel, maire de Luxembourg-ville et tête de liste démocrate, de former un nouveau gouvernement.
Des élections remarquables, dans un pays peu remarqué
Bien qu’étant le pays le plus riche d’Europe, voire du monde, avec le revenu par habitant le plus élevé de la planète (112 000 euros par an), le Luxembourg brille par sa discrétion, due évidemment à ses 2 586 km² et ses 524 853 habitants, mais également à sa position-tampon entre les États influents que sont la France, la Belgique et l’Allemagne. C’est donc dans l’indifférence européenne générale que se sont déroulées les dernières élections législatives. Elles marquaient pourtant les deuxièmes de l’histoire politique du pays à être organisées de façon anticipée (après celles de 1969) et les premières à ne pas avoir lieu en même temps que les élections européennes depuis l’élection du Parlement européen au suffrage universel en 1979.
Cependant, ces élections doivent être soulignées, tant pour la tournure surprenante prise par les résultats, et la formation d’une coalition de centre-gauche dans un pays catholique traditionnellement conservateur, que pour l’absence de montée de parti populiste, si caractéristique de la vie politique des États voisins ces derniers mois. Bien que très petit et enclavé, le Luxembourg confirme ainsi qu’il est, plus qu’un État européen, un État d’Européens.
Une belle leçon d’espoir politique européen
A l’heure où les dirigeants luxembourgeois avaient confirmé qu’ils accepteront, à partir de janvier 2015, l’échange automatique d’informations fiscales sur les comptes détenus par les non-résidents, mettant ainsi fin au fameux “secret bancaire”, tant décrié par l’Union européenne, on aurait pu s’attendre à la montée d’un sentiment anti-européen, comme c’est le cas ailleurs. Les recettes fiscales liées à l’activité bancaire représentent en effet un tiers des recettes totales du pays, le plaçant ainsi en deuxième position des centres internationaux de fonds d’investissement, derrière les Etats-Unis.
Pourtant les citoyens luxembourgeois ont largement reconduit leur entière confiance dans les partis démocratiques, prouvant ainsi que le repli populiste n’est pas une fatalité et que le choix de l’Europe est toujours le meilleur à faire pour l’avenir. Ce choix a toujours été approuvé et défendu en terres luxembourgeoises - présence des institutions européennes, 15 années de mandat à la Commission européenne pour Viviane Reding, 8 années pour Jean-Claude Juncker à la tête de l’Eurogroupe - et ces élections prouvent qu’il doit être fait de nouveau.
Avec une commissaire pressentie comme pouvant prétendre à être tête de liste pour le Parti Populaire Européen (PPE) aux prochaines élections européennes, et des élections législatives signe d’innovation en matière de coalition gouvernementale, le Luxembourg, bien plus que nous démontrer encore une fois, s’il en était besoin, qu’il est un modèle d’État européen, nous donne une bonne leçon, en nous rappelant que rien n’est jamais joué d’avance, et que l’espoir est permis, surtout quand il est européen.
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