“La bande de Poitiers”
Fils d’expatrié français à Madrid et à Buenos Aires, Stéphane Séjourné retourne en France pour faire ses études à l’université de Poitiers. S’engageant à gauche dans la mouvance socialiste et participant notamment au blocage de sa faculté face au contrat première embauche ou à l’occupation du MEDEF (Mouvement des entreprises de France) en 2006, il se lie d’amitié avec d’autres socialistes (dont Sacha Houlié, aujourd’hui représentant de l’aile gauche de Renaissance) et forme avec eux “la bande de Poitiers” en soutien à Dominique Strauss-Kahn jusqu’à l’affaire du Sofitel en 2012. Il intègre alors le cabinet de Jean-Paul Huchon, président du Conseil régional d’Île-de-France.
Une ascension fulgurante au sein d’En Marche
En 2014, Stéphane Séjourné devient conseiller ministériel d’Emmanuel Macron chargé des relations avec les élus. Avec la “bande de Poitiers”, il contribue au lancement du mouvement En Marche : c’est alors que démarre son parcours européen. En 2019, il est en sixième position sur la liste européenne de LREM, il prend ensuite la tête de la délégation LREM au Parlement européen,la tête de liste, Nathalie Loiseau,ayant fait l’objet de nombreuses polémiques). Puis, il est élu à la tête du groupe libéral Renew en 2021. Il le renforce notamment en attirant de nouveaux députés et développe les alliances avec le Parti Populaire européen (PPE) et les sociaux-démocrates (S&D).
Un an après, il prend également la tête du parti Renaissance et est récompensé de son bilan en étant nommé ministre des Affaires étrangères et de l’Europe au sein du gouvernement Attal. Enfin, après la démission de Thierry Breton, il est nommé commissaire européen par Emmanuel Macron et Ursula von der Leyen.
Une nomination critiquée
La nomination de Stéphane Séjourné en tant que commissaire européen est loin de faire l’unanimité au sein de la classe politique française, notamment à gauche. En effet, alors que Thierry Breton était supposé devenir un poids lourd de l’équipe von der Leyen, permettant de favoriser la pluralité dans une Commission surtout composée de conservateurs du PPE, sa nomination risque d’affaiblir l’esprit de compromis qui prévaut au sein de l’institution.
Les velléités d’autonomie européenne, pourtant affirmées par Emmanuel Macron dans son discours de la Sorbonne d’avril 2024, semblent également s’éloigner en faveur d’un rapprochement sur les positions diplomatiques américaines.
Enfin, dans un contexte politique français troublé, la démission d’un technocrate comme Thierry Breton et son remplacement par Stéphane Séjourné, qui dispose de moins d’expérience exécutive, peut interroger.
De nouveaux défis
Stéphane Séjourné devra affronter de nombreux défis au sein du Parlement européen : tout d’abord, avant même d’occuper son portefeuille, sa nomination devra être acceptée par les parlementaires européens (ce qui a de bonnes chances d’arriver au vu de son expérience parlementaire mais n’est pas assuré). Surtout, même si la France est affaiblie au niveau européen par la démission forcée de Thierry Breton, il hérite tout de même, en plus de la vice-présidence de la Commission, d’un portefeuille clé : celui de la stratégie industrielle.
Le rapport Draghi a ainsi souligné le caractère crucial de ce domaine : la productivité européenne a en effet tendance à stagner par rapport à la Chine mais aussi aux Etats-Unis (alors que les Etats-Unis ont créé 6 entreprises valant plus de 1 trillion de dollars, l’Europe n’a créé aucune nouvelle entreprise valant plus de 100 millions de dollars), nul doute que Stéphane Séjourné aura du pain sur la planche.
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