A compter du 16 septembre 2024, l’Allemagne appliquera un contrôle strict à toutes ses frontières, avait annoncé la Ministre fédérale allemande de l’Intérieur, Nancy Faeser, le 9 septembre 2024. L’objectif affiché et assumé est de faire reculer l’immigration illégale en filtrant méticuleusement les entrées dans le pays. Un phénomène en augmentation d’après les chiffres des demandes d’asile. Une situation qui se rencontre dans toute l’Union européenne mais qui ne fait l’objet de presque aucune coopération profonde.
Quelques semaines auparavant, l’Allemagne était victime d’un attentat au couteau dans la ville de Solingen, dans le Land Rhénanie-du-nord-Westphalie, non loin de la grande ville de Düsseldorf. L’émoi suscité par cet acte des plus condamnables s’est mué en une campagne de pression sur le gouvernement du chancelier Olaf Scholz pour fermer les frontières allemandes. Tous les blocs politiques d’opposition, de l’extrême droite à la gauche radicale, ont milité pour qu’une telle mesure soit appliquée rapidement. En dépit de toutes les réalités, et contre le sens de sa propre histoire, l’Allemagne a choisi de céder à l’une des plus importantes revendications nationalistes.
Elle n’est pas la première à avoir réintroduit des contrôles à ses frontières. Beaucoup de pays d’Europe ont eu recours à cette extrémité, y compris la France suite aux attentats de novembre 2015. De ces expériences, il semble que l’on n’ait rien appris. L’espace Schengen doit avant tout être un espace de coopération et de cohésion, et non d’’entre-soi. Il doit encourager les Etats à coordonner et rassembler leurs moyens pour adresser les défis et les enjeux auxquels la communauté fait face. Au contraire, il semble que ceux-ci aient choisi de ne placer leur confiance qu’en leurs propres capacités et de faire fi du potentiel d’une coopération avancée dans les enjeux communs.
Et lorsque celle-ci prend réellement corps, elle ne concerne qu’un nombre de secteurs restreint, au premier rang desquels la sécurité. L’un des grands piliers d’une politique consciente du rôle que doit jouer l’UE et l’espace Schengen en matière d’immigration s’est trouvé dangereusement malmené par la décision du gouvernement Scholz. Alors qu’elle avait été l’exemple à suivre lors de l’importante vague migratoire de 2015-2016, l’Allemagne a cédé à ses pires réflexes en empruntant la voie exactement inverse, loin de la position que la chancelière Angela Merkel avait voulu mettre en avant à cette époque. Pire que cela, le Gouvernement Scholz va à l’encontre du contrat de coalition qui prône des actions vers une Europe Fédérale. Cette décision entre ainsi en contradiction avec les idées et le programme qu’il prétend défendre.
Du besoin de coopération européenne
A l’heure où le rapport Draghi plaide pour plus de coopération dans divers domaines notamment économiques, la gestion commune des flux migratoires reste malheureusement une chimère. Pourtant, experts, associations, ONG, agences diverses dénoncent depuis longtemps l’absence d’une politique claire et cohérente en la matière, qui permettrait non seulement de maîtriser les flux migratoires aux frontières de l’UE, mais de préserver en plus l’espace de libre circulation intérieur.
En outre, de telles mesures alimentent la vision du monde de l’extrême droite, lui donnant du grain à moudre en confirmant non seulement ses théories, mais en appliquant les mesures que les partis de ce champ politique préconisent par ailleurs. Portant des valeurs de liberté, fédéralistes et antifascistes, nous nous opposons fermement à la généralisation de telles dispositions.
Il est plus que temps que les Etats de l’UE et de l’espace Schengen se penchent sérieusement sur le phénomène migratoire pour le comprendre et l’adresser dans les meilleures conditions, c’est-à-dire dans le respect des droits humains, de l’esprit de Schengen et dans la légalité la plus stricte. Nous appelons les autorités allemandes à ne pas céder aux sirènes alarmistes qui conduisent à prendre des décisions précipitées et inefficaces. Les Etats membres doivent trouver des solutions ensemble en prêtant une oreille attentive aux acteurs du terrain.
En tant qu’initiateurs du partenariat de la JEF Oberrhein, nous avons déclaré vouloir passer outre les simples limites administratives que représentent les frontières. C’est ce geste que réalisent au quotidien des milliers de frontaliers qui traversent la frontière pour travailler, apprendre, visiter, aimer, bref : vivre ce que l’acquis européen a conquis de plus précieux. Une liberté qui est reprise par le réflexe nationaliste de repli sur soi face à chaque difficulté, et contre lequel nos associations fédéralistes se battent depuis 75 ans. Ce combat est plus d’actualité que jamais, et nous ne baisserons pas la garde, dès la première alerte.
Les Jeunes Européens - Strasbourg, JEF Baden-Württemberg, Young European Swiss
N.B : Si vous souhaitez indiquer votre opposition à cette mesure, vous pouvez signer la pétition lancée par la JEF Deutschland.
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