C’est le parti Droit et Justice (PSI), conservateur, catholique et eurosceptique guidé par Jaroslaw Kaczynski qui a remporté la majorité à la Diète polonaise (le parlement). Avec 37,6% des voix, soit 235 des 460 sièges, il pourra former seul un gouvernement dirigé par le premier ministre Beata Szydlo et constituera un nouveau défi pour l’Union.
Une victoire qui dénote avec le passé de la Pologne
La victoire de la droite radicale de Kaczynski est écrasante, la gauche n’ayant obtenu aucun siège, et marque un détachement de Plateforme Civique, le parti de centre droit au pouvoir depuis 8 ans avec Donald Tusk puis Ewa Kopacz. Elle est la conséquence de la fatigue des Polonais d’un ordre politique monotone et ayant perdu sa popularité, de la marginalisation d’une partie de la population et de l’appel des partis extrémistes et populistes.
Ce changement de tendance semble paradoxal si l’on considère le passé favorable à l’Union du précédent gouvernement. Paradoxe renforcé par le sauvetage de la Pologne par Plateforme Civique qui avait évité la crise financière, en contribuant à faire de la Pologne un pays de croissance et de grande influence parmi les pays de l’Est sur l’Union.
Mais si d’un côté il y a eu croissance, une grande partie de la population n’en a pas profité avec de hauts taux de chômage et une opposition à l’autorité de l’Union par rapport à la gestion de la crise des migrants ou aux rapports à la Russie et l’Allemagne alimentée par le discours du parti Droit et Justice (PiS).
Captant ce mécontent, celui-ci se présente comme une alternative nationaliste, conservatrice et populiste pour les électeurs attirés par les promesses de renforcement des mesures sociales (comme la réduction de l’âge minimum de départ à la retraite), maillon faible de la Pologne. Ou encore une opposition au problème de la crise de réfugiés frôlant les limites de la xénophobie en profitant du climat de crise européen.
Quel futur pour la Pologne ?
Le résultat semble donc se résumer en Pologne a une forte prise de pouvoir du PiS qui a pu placer aux plus hautes charges politiques ses représentants avec le premier ministre Beata Szydlo et Andrzej Duda, élu président en mai dernier, tous deux sous l’aile de Kaczynski.
Si les résultats concrets de l’élection et le respect des promesses faites en campagne ne sont pas exactement prévisibles, le futur plus nationaliste et méfiant envers les institutions de l’Union que la majorité des Polonais a choisi d’adopter est lui plus évident.
L’Union face au renforcement de ses opposants
Tout d’abord il faut considérer le dénominateur commun entre l’opposition à laquelle l’Union européenne fait déjà face et celle qui se réitère par le résultat électoral en Pologne pour comprendre au niveau de l’Union quels seront les enjeux de ce résultat.
D’un côté l’euroscepticisme du parti le rapproche de la position du Royaume-Uni, dont le premier ministre David Cameron semble toujours plus enclin à une transition vers le Brexit. D’autant plus que le PiS fait déjà partie du groupe de Conservateurs et Réformistes critique envers l’Union au Parlement européen.
D’autre part, on peut mettre le PiS en parallèle avec les partis de droite extrémistes, celui de Marine le Pen en France ou de Matteo Salvini en Italie. Par leur dimension populiste, l’opposition aux soi-disant excès d’autorité de Bruxelles minant la souveraineté nationale est systématique, d’autant plus que la crise des migrants bat son plein. Ici le rapprochement est possible surtout avec le premier ministre hongrois Viktor Orban en première ligne de l’opposition aux politiques européennes sur l’immigration et avec des positions toujours plus tranchées contre les vagues de réfugiés cherchant l’asile en Europe.
En général, le cadre se présente donc comme celui d’un manque de confiance multi-niveaux portant atteinte à l’Union. Non seulement pour le manque de coopération qu’il engendre mais aussi pour l’obstruction à l’élaboration de politiques communes, essentielles pour la gestion de la crise des migrants notamment.
On ne peut pas parler dans le cas du PiS d’une opposition directe, qui se situe plutôt au niveau de l’euro, à l’Union dont les avantages sont reconnus. Mais l’élection remet néanmoins en cause l’autorité des institutions européennes et le rôle que celles-ci jouent au niveau des nations en revendiquant plus d’autonomie.
Cette victoire, dont les conséquences sont encore incertaines, se présente donc comme un nouveau défi pour l’Europe naviguant dans une mer de plus en plus déchainée de tendances nationalistes, populistes, eurosceptiques et critiques de son autorité et des règles imposées. C’est un nouveau signal, pas encore d’alarme, mais certainement non négligeable qui met en avant l’importance de renforcer l’attention de l’Union sur son avenir et les choix à conduire pour gérer ses défis.
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