Assez ironiquement, le Brexit risque pourtant fort de faire perdre au Royaume-Uni ce qu’il avait voulu y recouvrer : son indépendance. Car en quittant l’Union, le pays abandonnerait également son pouvoir d’en fixer les règles. A contrario, les normes décidées à Bruxelles conserveraient un impact fort sur le territoire britannique étant donné le rapport très disproportionné qui s’installerait entre un Royaume-Uni isolé et une Europe unie.
Outre son indépendance, c’est également l’unité du Royaume-Uni, qui pourrait une nouvelle fois être mise à mal. L’Écosse et le Pays de Galle sont bien plus europhiles que la seule Angleterre et pourraient bien se désolidariser d’une politique anglaise d’isolement.
Se posera également le problème de l’Irlande. La République d’Irlande et le Royaume Uni partagent une « zone commune de voyage » depuis 1923. Une sortie du Royaume-Uni ferait de la frontière avec l’Irlande une frontière extérieure de l’Union européenne, ce qui remettrait en cause la libre circulation entre Belfast et Dublin. On assisterait donc à un renforcement de la division entre les deux Irlande, un sujet encore sensible. Pas sûr que les britanniques aient très envie de rouvrir ces blessures encore mal cicatrisées.
Enfin, sans entrer dans les détails, il apparaît clair qu’un Brexit aurait un coût social et économique important. Un récent rapport d’Open Europe conclut ainsi qu’en 2030, en cas de sortie, le PIB britannique pourrait être jusqu’à 2,7% inférieur que ce qu’il aurait été en conservant la situation actuelle. Le think tank estime que le Royaume-Uni pourrait limiter la casse, mais au prix d’une forte libéralisation de son commerce avec le reste du monde, entraînant d’inévitables conséquences sociales. Enfin, il y a fort à parier que nombreux des acteurs de la finance, le cœur de la puissance britannique, choisiraient de se rapprocher davantage de cet immense marché unifié des capitaux que constitue l’Union européenne. Voilà qui explique sans doute le scepticisme avec lequel la proposition de référendum a été accueillie dans la City.
La position des conservateurs britanniques découle surtout d’une logique qui n’est plus adaptée au monde d’aujourd’hui. Que pèse une puissance européenne moyenne comme la Grande-Bretagne dans le monde actuel ? Qui peut croire qu’elle pourrait négocier à armes égales avec les nouveaux géants asiatiques ? Les opinions sont déjà inquiètes aujourd’hui de la tournure que prennent les négociations avec les Américains dans le cadre du TTIP. Qu’en serait-il si nos différents Etats membres devaient négocier seuls face à une partie dix fois plus puissante qu’eux ? Il y a une certaine myopie historique à croire que l’Angleterre pourrait à nouveau régner sur les océans comme au XVIIIe et au XIXe siècles. Seule l’Union européenne garantit aujourd’hui à nos Etats en déclin relatif d’être entendus dans le nouveau concert des nations.
Or, au lieu de contribuer à l’effort commun en vue d’établir une Europe à la fois plus forte, moins complexe, plus lisible pour les citoyens, une sortie britannique fragiliserait une intégration déjà difficile. L’Europe y perdrait la contribution britannique au budget commun (de l’ordre de 14 milliards d’euros), la quatrième en volume dans l’Union après l’Allemagne, la France et l’Italie. Elle y laisserait surtout un appareil diplomatique et militaire, qui, employé seul, sera marginalisé par les puissances émergentes mais qui mis à disposition d’une action extérieure commune, redonnerait aux pays de l’Union européenne le poids qu’ils représentent collectivement.
Pour l’Union, une sortie britannique constituerait un précédent très négatif. Le danger se serait pas tant celui d’autres sorties ultérieures mais davantage l’instauration d’une culture du chantage au sein des institutions européennes : « Donne-moi ceci ou cela ou je quitte le navire ». Encore davantage qu’aujourd’hui, la discussion au conseil ressemblerait à celle de marchands de tapis et le bien commun serait encore moins pris en compte. Bref, ce serait comme une petite mort pour l’esprit communautaire. En conclusion, rappelons que Margaret Thatcher elle-même, dans son célèbre discours de Bruges de 1988 avait défendu l’appartenance de la Grande-Bretagne à l’Union européenne, refusant une « existence isolée et en marge » pour son pays. L’Europe a déjà montré par le passé qu’elle savait prendre en compte les spécificités britanniques. Il n’y a aucune raison, autre qu’électoraliste, pour que le Royaume-Uni et l’Union européenne ne parviennent à un compromis acceptable pour toutes les parties.
1. Le 30 mars 2015 à 21:48, par Guillaume Bucherer En réponse à : Le Brexit : un danger tant pour l’Union que pour le Royaume-Uni
Merci pour ce bon article.
Il y avait une citation du professeur Verluise qui disait « L’UE est un navire que nous construisons alors que nous sommes déjà dans l’eau ».
Certes l’UE n’est pas parfaite... et l’opinion britannique s’est vraiment renversée lors de l’interdiction de l’UE d’exporter la vache folle, mais que voudrait dire le projet d’une Union européenne sans le géant britannique ?
Comme ils ont dit aux Ecossais : We want you to stay !
2. Le 3 avril 2015 à 00:59, par El gaucho francés En réponse à : Le Brexit : un danger tant pour l’Union que pour le Royaume-Uni
« Car en quittant l’Union, le pays abandonnerait également son pouvoir d’en fixer les règles » Lol, comme l’Ue est déchiré par 28 intérêts nationaux divergents, elle ne peut en satisfaire aucun. Conséquence : ce sont les lobbys qui font la loi http://www.lemonde.fr/economie/article/2015/01/27/bruxelles-paradis-des-lobbies_4564346_3234.html?xtmc=lobby_bruxelles&xtcr=3 et pas seulement européens ! Ainsi il suffira aux entreprises britanniques de faire du lobbying pour influencer les décisions.
« un Royaume-Uni isolé et une Europe unie » un royaume-uni souverain et une UE-tour de babel.
Pour les tensions entre les régions britanniques, je ne connais pas assez le sujet.
« Un récent rapport d’Open Europe conclut ainsi qu’en 2030, en cas de sortie, le PIB britannique pourrait être jusqu’à 2,7% inférieur » Le titre montre tout de suite que leur objectivité est toute relative. De plus, des prévisions à 15 ans ne peuvent pas être aussi précises.
« Enfin, il y a fort à parier que nombreux des acteurs de la finance, le cœur de la puissance britannique, choisiraient de se rapprocher davantage de cet immense marché unifié des capitaux que constitue l’Union européenne. » Pk ?
« La position des conservateurs britanniques découle surtout d’une logique qui n’est plus adaptée au monde d’aujourd’hui. Que pèse une puissance européenne moyenne comme la Grande-Bretagne dans le monde actuel ? Qui peut croire qu’elle pourrait négocier à armes égales avec les nouveaux géants asiatiques ? » Ca c’est de la pure idéologie sans fondement. Aller regarder les statistiques du FMI : il n’existe strictement aucune corrélation entre la taille d’un pays et sa prospérité (que je mesure en PIB/hab). Quant à la question des asiatique, je trouve la remarque un peu raciste : il faudrait se grouper entre petits blancs pour se protéger des méchants jaunes. C’est un peu l’idéologie de cette campagne qui avait fait scandale : http://www.agoravox.tv/tribune-libre/article/un-clip-raciste-edite-par-l-union-34217. Ensuite, c’est maintenant que les chinois rient bien car ils peuvent jouer sur les intérêts nationaux légitimes pour répondre à leurs fins : https://www.upr.fr/actualite/europe/destruction-de-l-industrie-photovoltaique-europeenne-les-traites-europeens-responsables De plus, c’est une vision qui témoigne d’un manque de confiance en nous-même et ça, on peut être aussi grand que l’on veut, ça ne réglera pas le problème.
« Elle y laisserait surtout un appareil diplomatique et militaire, qui, employé seul, sera marginalisé par les puissances émergentes » Lol, elle fera encore partie du concert des nations, sera liée par des centaines de traités et surtout pourra enfin pleinement prendre part au Commonwealth.
3. Le 3 avril 2015 à 01:00, par El gaucho francés En réponse à : Le Brexit : un danger tant pour l’Union que pour le Royaume-Uni
"Pour l’Union, une sortie britannique constituerait un précédent très négatif. Le danger se serait pas tant celui d’autres sorties ultérieures mais davantage l’instauration d’une culture du chantage au sein des institutions européennes : « Donne-moi ceci ou cela ou je quitte le navire ». Encore davantage qu’aujourd’hui, la discussion au conseil ressemblerait à celle de marchands de tapis et le bien commun serait encore moins pris en compte." Mais c’est le problème fondamentale de l’UE. Il n’y a pas de peuple européen http://www.sciencespo.fr/ceri/sites/sciencespo.fr.ceri/files/art_mbg.pdf et chacun essaie que la machine commune aille dans son sens, ce qui créé au passage de l’animosité entre les peuples.
pour conclure, je citerais ce proverbe : « tu peux te faire un sac à partir d’un éléphant mais que trouveras-tu à mettre dedans ? » Il ne sert à rien de créer des outils immenses si de toute façon, on ne pourra pas les utiliser. On n’arrête pas d’essayer de trouver un but à l’UE, ce qui prouve que l’on ne voit pas à quoi elle sert et, de toute façon, les 27 autres pays ne sont pas des français et ne veulent donc jamais, tous en même temps, aller dans la même direction que nous.
4. Le 3 avril 2015 à 10:01, par Guillaume Bucherer En réponse à : Le Brexit : un danger tant pour l’Union que pour le Royaume-Uni
El Gaucho, vous bossez pour l’UKIP ? Elargi, vos commentaires donneraient ceci : « comme le monde est rempli de gens qui ne sont pas français, surtout ne nous risquons pas à partager quoi que ce soit. » Et la France s’est construite comment ? D’un coup ? Le royaume de Bourgogne, le duché des Flandres, l’Aquitaine wisigoth se sont rangés d’un coup sous la coupe du roi de France ? L’UE est un processus qui ne peut prendre que du temps, d’autant plus qu’elle est fondée sur un principe volontaire et pacifique (personne n’a forcé des pays à rentrer).
Donc vos arguments, à mi-chemin entre complotisme et cynisme, témoignent d’une méconnaissance (volontaire ?) de l’UE : la coopération marche très bien, je le vois tous les jours en matière de défense, les intérêts sont bien compris et on ne voit à l’extérieur (c’est normal) que les points de tensions...
Arrêtez de noircir le tableau (Bruxelles paradis des lobbies = vous croyez que le Parlement aurait supprimé les frais d’itinérance avec un lobby aussi puissant que les télécoms ? ; ou « UE sans but », ben si, l’UE a un but qui est bien exprimé dans les Traités". Cherchez à améliorer une chose n’est pas synonyme de reconnaissance de l’inutilité de cette chose...
5. Le 3 avril 2015 à 13:02, par Valéry En réponse à : Le Brexit : un danger tant pour l’Union que pour le Royaume-Uni
« Mais c’est le problème fondamentale de l’UE. Il n’y a pas de peuple européen » : ça n’a strictement aucune espèce d’importance. La vulgate nationaliste veut qu’une organisation politique soit fondée sur une entité mythologique (peuple, nation...) abstraite mais ce n’est en rien la condition réelle d’un fonctionnement démocratique. ce dernier est fondé sur la participation à la définition de la règle de droit par ceux auxquels elle s’applique. Nul besoin de partager un folklore commun ou d’invoquer les mêmes ancêtres pour cela : ça c’est de la littérature.
6. Le 3 avril 2015 à 17:29, par giuseppe marrosu En réponse à : Le Brexit : un danger tant pour l’Union que pour le Royaume-Uni
@ El gaucho francés
« On n’arrête pas d’essayer de trouver un but à l’UE, ce qui prouve que l’on ne voit pas à quoi elle sert »
Cette conclusion me semble une provocation comme l’est le ton general de tes interventions dans ce débat. Elle est aussi completement fausse et, ce qui est plus grave, depourvue de toute logique.
7. Le 4 avril 2015 à 10:15, par Valéry-Xavier Lentz En réponse à : Le Brexit : un danger tant pour l’Union que pour le Royaume-Uni
« On n’arrête pas d’essayer de trouver un but à l’UE, ce qui prouve que l’on ne voit pas à quoi elle sert » : l’"UE pas plus que la France n’a pas besoin de but. Ce sont des institutions politiques qui ont une fonction : définir des règles de vie en commun et mener des politiques publiques. L’idée qu’il faudrait un « but » à ce type d’organes politico-administratif relève d’un romantisme naïf absurde qui transpose des névroses existentielles individuelles là où elles n’ont pas de sens. Ridicule. Les politiques publiques en revanche doivent avoir un but ou plus précisément un objectif, et qui doit dépendre des orientations voulûes par une majorité des citoyens : c’est bienb pourquoi nous élisons des députés au Parlement européen. Reste à faire en sorte que l’UE ait un véritable gouvernement et ne soit pas bloquée par des mécanismes intergouvernementaux post-démocratiques : ceux précisément qu’imposent les nationalistes au pouvoir au Royaume-Uni ou en France.
8. Le 4 avril 2015 à 19:05, par tnemessiacne En réponse à : Le Brexit : un danger tant pour l’Union que pour le Royaume-Uni
@ Valéry-Xavier Lentz
"« Mais c’est le problème fondamentale de l’UE. Il n’y a pas de peuple européen » : ça n’a strictement aucune espèce d’importance. La vulgate nationaliste veut qu’une organisation politique soit fondée sur une entité mythologique (peuple, nation...) abstraite mais ce n’est en rien la condition réelle d’un fonctionnement démocratique. ce dernier est fondé sur la participation à la définition de la règle de droit par ceux auxquels elle s’applique. Nul besoin de partager un folklore commun ou d’invoquer les mêmes ancêtres pour cela : ça c’est de la littérature."
Il me semble lire dans vos propos une position des "fédéralistes" vis à vis de ceux qui associe la destin européen à celui de Rome. Je pense toujours qu’il y a un peuple européen et pas que dans la littérature. On rappellera les modes de vies, l’environnement architectural, les références culturelles communes etc... etc...
" l’"UE pas plus que la France n’a pas besoin de but. Ce sont des institutions politiques qui ont une fonction : définir des règles de vie en commun et mener des politiques publiques. "
L’Union et les institutions assurent la paix sociale.
Mais que nous vaut cette belle saillie "L’idée qu’il faudrait un « but » à ce type d’organes politico-administratif relève d’un *romantisme* *naïf* *absurde* qui transpose des *névroses* *existentielles* *individuelles* là où elles n’ont *pas de sens*. *Ridicule*. " ? ça fait 8.
Malheureusement il me semble que vous vous contredisiez :
" l’"UE pas plus que la France n’a pas besoin de but."
"Les politiques publiques en revanche doivent avoir un but ou plus précisément un objectif"
9. Le 8 avril 2015 à 14:56, par El gaucho francés En réponse à : Le Brexit : un danger tant pour l’Union que pour le Royaume-Uni
« complotisme et cynisme » sur le cynisme, il s’agit ici de politique internationele, il convient donc de faire de la RealPolitik. Sur le complotisme, pourriez-vous s’il vous plaît développer votre pensée ?
Sur les lobbies, je persiste et signe : http://www.lemonde.fr/economie/article/2015/01/27/bruxelles-paradis-des-lobbies_4564346_3234.html http://www.slate.fr/story/69297/lobby-bruxelles-visite-guidee
pour les objectifs, tu penses à ça : "DÉSIREUX d’approfondir la solidarité entre leurs peuples dans le respect de leur histoire, de leur culture et de leurs traditions,
DÉSIREUX de renforcer le caractère démocratique et l’efficacité du fonctionnement des institutions, afin de leur permettre de mieux remplir, dans un cadre institutionnel unique, les missions qui leur sont confiées,
RÉSOLUS à renforcer leurs économies ainsi qu’à en assurer la convergence, et à établir une union économique et monétaire, comportant, conformément aux dispositions du présent traité et du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, une monnaie unique et stable,
DÉTERMINÉS à promouvoir le progrès économique et social de leurs peuples, compte tenu du principe du développement durable et dans le cadre de l’achèvement du marché intérieur, et du renforcement de la cohésion et de la protection de l’environnement, et à mettre en œuvre des politiques assurant des progrès parallèles dans l’intégration économique et dans les autres domaines,
RÉSOLUS à établir une citoyenneté commune aux ressortissants de leurs pays,
RÉSOLUS à mettre en œuvre une politique étrangère et de sécurité commune, y compris la définition progressive d’une politique de défense commune, qui pourrait conduire à une défense commune, conformément aux dispositions de l’article 42, renforçant ainsi l’identité de l’Europe et son indépendance afin de promouvoir la paix, la sécurité et le progrès en Europe et dans le monde,
RÉSOLUS à faciliter la libre circulation des personnes, tout en assurant la sûreté et la sécurité de leurs peuples, en établissant un espace de liberté, de sécurité et de justice, conformément aux dispositions du présent traité et du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,
RÉSOLUS à poursuivre le processus créant une union sans cesse plus étroite entre les peuples de l’Europe, dans laquelle les décisions sont prises le plus près possible des citoyens, conformément au principe de subsidiarité,
DANS LA PERSPECTIVE des étapes ultérieures à franchir pour faire progresser l’intégration européenne," Je trouve que beaucoup d’objectif sont per se : l’objectif final est de renforcer l’Union Européenne. C’est un peu long de le commenter. Si c’est ce que tu veux, dis-le-moi.
10. Le 2 mars 2017 à 18:07, par djabou En réponse à : Le Brexit : un danger tant pour l’Union que pour le Royaume-Uni
salem pour moi je vois qu il faut unire les politiciens non les peuples
Suivre les commentaires : |